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Au Royaume

Younès Boumehdi : Il a rêvé d’avoir sa radio pendant 13 ans et il a fini par la créer

Encore étudiant en France, il commence à  s’intéresser de près aux radios privées.
Dès son retour au Maroc, en 1993, il dépose une première demande de création d’une radio privée.
Entre-temps, il crée deux entreprises au Maroc et en France mais n’a jamais abandonné son rêve.
Hit Radio, créée en 2006, émettra sur 33 fréquences sur les douze bassins nationaux d’ici
à  2011.

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«La démocratie dont je suis partisan, c’est celle qui donne à tous les mêmes chances de réussite, et ensuite à chacun selon sa capacité», disait Henry Ford. Adepte du capitalisme ou pas, qui pourrait remettre en cause l’idée que tout succès doit être reporté aux qualités personnelles, à la conviction, à l’implication et à l’obstination ? Dans tous les cas, si la chance peut y être pour quelque chose, les facteurs cités sont déterminants.
Younès Boumehdi, Dg de Hit Radio, est, à beaucoup d’égard, dans ce cas de figure. Né à Rabat en 1970 dans une famille dont le père est médecin militaire, la rigueur qui lui a été inculquée dès le départ l’a certainement guidée dans ses choix futurs. D’ailleurs, il dit volontiers avoir été «encadré» durant tout son parcours scolaire avant de conquérir  plus tard son autonomie.
A l’issue d’une scolarité sans faute, il obtient un Bac «économie», au lycée Descartes et s’envole pour la France. Il traverse une courte période d’hésitation et s’inscrit d’abord à Sciences Po à Paris, avant de s’orienter, une année plus tard, vers le marketing et la communication. Et c’est à l’European business school, une grande école privée, qu’il obtient un diplôme en 1992. Durant tout son séjour, il s’intéresse à l’évolution des radios en Europe, mais n’avait pas encore de vrai projet en tête. Il fallait qu’il s’occupe en priorité de ses études. D’ailleurs, son père le lui rappelait souvent sans détours : «Je paie 30 000 FF par an et inutile de te dire que tu as intérêt à réussir». Cela ne l’empêche pas d’aller à la découverte de radios comme France culture, Vibration à Orléans, Scoop à Lyon ou encore Box à Bordeaux. Il écoute, visite parfois et s’informe des derniers équipements et techniques.

Des produits chimiques et de la com’ en attendant
Dès qu’il finit ses études, Younès Boumehdi rentre au pays et dépose une demande de licence de radio, juste après avoir assisté à Infocom, assises organisées en avril 1993 à Rabat et qui constituèrent le début d’une prise de conscience des pouvoirs publics pour la libéralisation des ondes. Il comprend, toutefois, qu’il était encore un peu tôt pour cette ouverture, mais s’entête à revenir chaque mois à la charge pour s’enquérir du sort réservé à sa demande.
Au bout d’un moment, il décide de travailler, en attendant d’y voir plus clair. Il est recruté par une société de distribution d’antennes de télévisions et de décodeurs. Cela coïncide avec la période où le ministre de l’intérieur et de l’information voulait instituer une taxe de 5 000 DH sur la parabole. Younès Boumehdi ne s’attarde pas dans ce statut de salarié. Avec un associé, il crée une entreprise de distribution de produits chimiques appelée «Medi Système». En misant chacun 300 000 DH, ils vont avoir la main heureuse car, dès le premier exercice, la société réalise un chiffre d’affaires de 5 MDH.
Dans la foulée, il crée une autre société mais cette fois-ci à Paris. Le cœur du métier est la communication et l’accompagnement de jeunes talents dans le monde de la mode et du design. Le succès est à nouveau au rendez-vous. Sans gros investissements, l’entité est arrivée à atteindre un chiffre d’affaires de 500 000 euros.
Durant cette période qui va durer de 1996 à 2005, Younès Boumehdi est entre le Maroc et la France. Cependant, il n’oublie pas son projet de radio et continue à écrire aux ministre et hauts responsables concernés, entre autres le Premier ministre de l’époque Driss Jettou et le président du Parlement Abdelouahed Radi, qui ont reçu des lettres dans lesquelles il leur demande de faire quelque chose pour son projet en leur rappelant que la fin du monopole datait de 2003 et que le gouvernement marocain a bien autorisé Radio Sawa dès 2002.

Ses émissions osées lui valent les sanctions de la Haca
Tout va changer à partir de 2005, avec l’entrée en vigueur de la loi sur la libéralisation du paysage audiovisuel. Il reçoit un courrier de la Haute autorité de la communication audiovisuelle (Haca) lui demandant de confirmer son intention de créer une radio. Il remet son projet à niveau et présente une demande actualisée en précisant la technologie qu’il choisit et son business plan. C’est une année plus tard que son projet est sélectionné au même titre que neuf autres. Le hasard fera qu’il apprendra la nouvelle alors qu’il assistait, en France, aux festivités du 25e anniversaire de la libéralisation de l’audiovisuel. Il écourte alors sa visite pour être au Maroc le 17 mai 2006 pour les tests. En effet, pour la Haca, il était hors de question de donner l’autorisation à une radio qui ne réponde pas aux normes internationales, de peur de voir l’expérience marocaine de libéralisation tourner court. Les tests sont tout à fait concluants, mais restait la question financière et ce ne fut pas une mince affaire. Il fallait, en effet, réunir en urgence les 15 MDH nécessaires. La première banque qui lui avait promis de lui prêter 40% lui fait faux bond. Finalement, une autre accepte de lui prêter ce montant. Pour le reste, il mobilise ses économies et sollicite ses proches.
Hit Radio commence à émettre dès le 1er juillet 2006. Elle est la première radio privée marocaine à être sur les ondes à Rabat. Le 30 du même mois, elle couvre Casablanca et enfin Marrakech et sa région le 15 août. Aujourd’hui, Younès Boumehdi est aux anges. Mais il n’a pas fini de travailler sur la couverture nationale de sa radio qui émettra sur 33 fréquences sur les douze bassins nationaux d’ici 2011. Son objectif : réaliser un chiffre d’affaires de 15 MDH en 2009 contre 12 millions en 2008. Il garde donc le cap malgré quelques vicissitudes liées à l’activité comme les sanctions de la Haca (une amende de 100 000 DH puis une interdiction d’émettre pendant 15 jours), après des émissions jugées «osées». Mais ce sont les risques du métier.