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Au Royaume

Vidéo. Rabat rassemble les pays africains pour traiter la problématique des coûts de transfert de fonds

Les travaux du forum de Rabat sur la réduction des coûts de transfert de fonds de la diaspora africaine se sont ouverts, ce jeudi 12 janvier, dans la capitale du Royaume. L’objectif de cet important rendez-vous est de mettre en place les solutions nécessaires pour réduire les coûts des transferts, qui restent parmi les plus chers au monde, les faciliter et les rendre plus sûrs.

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Il n’est nul doute que la diaspora africaine est la plus importante au monde. Mais, au-delà des considérations liées aux flux migratoires et à toutes les problématiques qui leur sont liées, le volet du transfert d’argent, mais surtout de son coût, se pose avec acuité. «Il est fondamental qu’on traduise la volonté politique en politique volontariste. Il faut sortir du discours de la migration, du plaidoyer…et voir ce qu’on peut faire pour cette diaspora au sein de l’Afrique», a déclaré Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères.

La diaspora africaine est estimée à plus de 150 millions en 2021, dont les deux tiers sont sur le continent africain. Les transferts ont représenté 100 milliards de dollars, dont pas moins de 10 milliards juste au Maroc. «Ce que l’Afrique reçoit comme fonds est plus important que les investissements directs étrangers (IDE). Que la diplomatie se taise et laisse les financiers gérer», a suggéré Bourita.

Sur la base des statistiques publiées par la Banque mondiale, les envois de fonds ont cumulé, sur la dernière décennie, pas moins de 7.000 milliards de dollars dont près de 870 milliards de dollars à destination de l’Afrique, soit une fois et demie le volume des IDE et celui des aides publiques au développement dont le continent a bénéficié.

Ces fonds ont été d’autant plus importants lors de la période de la crise sanitaire, comme l’atteste leur record de croissance de plus de 10% en 2021 à l’échelle mondiale et 14% pour les envois à destination de l’Afrique. Cela s’explique naturellement par l’élan de solidarité familiale.

Cependant, la grande contrainte de cette activité reste la cherté des coûts. «En Afrique, ils sont parmi les plus chers au monde, à 8%, contre 6% dans d’autres régions», a estimé Bourita, qui a ajouté : «Pour chaque 200 dollars envoyés, 16 dollars sont versés par le citoyen africain. Ce qui reste en déphasage avec l’objectif 10 des ODD qui fixe ce taux à 3% à l’horizon 2030». Notons qu’ils peuvent monter à 15% avec un total en valeur de 1,6 milliard de dollars. Il n’est donc pas besoin de montrer l’énorme manque à gagner pour le continent, les conséquences engendrées en favorisant les circuits informels, ainsi que la frustration créée en comparaison avec les autres régions du monde.

Les transferts peuvent représenter jusqu’à 20% du PIB

«Il est donc grand temps d’optimiser la contribution de la diaspora au développement du continent, en rendant ces envois plus sûrs, plus rapides et moins couteux, ne serait-ce que pour favoriser l’inclusion financière», a proposé Robert Dussey, le ministre des Affaires étrangères, de l’intégration africaine et des Togolais de l’extérieur, surtout que ces fonds transférés représentent entre 8 à 10% du PIB et peuvent atteindre jusqu’à 20% dans certains pays.

Au Maroc, les pouvoirs publics ont été sensibles à cette question depuis des années. D’ailleurs, «dès 2009, Bank Al-Maghrib a décidé de lever toute clause d’exclusivité liant les opérateurs internationaux de transferts de fonds à leurs partenaires au Maroc. Ce qui a permis de réduire significativement ces coûts,» a souligné Abdellatif Jouahri, wali de la banque centrale. Cela dit, plusieurs défis restent à relever, en Europe notamment. En effet, plusieurs autorités bancaires de pays de l’Union européenne ont décidé de suspendre l’activité d’intermédiation opérée par les filiales bancaires situées en Europe auprès de la diaspora et pour le compte de leurs maisons mères marocaines. Autrement dit, les conditions de prestation de cette activité vont davantage se durcir si le projet de directive européenne relatif notamment aux succursales de pays tiers est voté en l’état. Ce projet, dont l’adoption est imminente, prévoit l’interdiction pour les banques étrangères non établies dans l’UE d’offrir des services bancaires du pays d’origine directement à leurs clients résidant dans un pays de l’Union.

Ainsi, il s’agit, au terme de ce forum, dont les panels se focalisent sur la proposition de nouveaux modèles et canaux innovants, de miser sur le digital comme levier qui offre des opportunités importantes dans les relations financières et économiques entre la diaspora et son pays d’origine. Il est également nécessaire de renforcer les partenariats, au sein de l’Afrique, entre les centres de recherche, les institutions financières, les incubateurs de talents… et de créer un environnement réglementaire et fiscal incitatif. De même, Jouahri a signalé que le G20 a retenu les monnaies digitales des banques centrales parmi les leviers d’amélioration des paiements transfrontaliers.