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Au Royaume

Smigards et faux jumeaux

Aujourd’hui, deux ouvriers payés au SMIG peuvent avoir un salaire différent pour la même durée
de travail. C’est ça
la spécificité marocaine !

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Acombien s’élève le Smig aujourd’hui ? A cette question, plusieurs industriels qui, pourtant, ont des employés payés au Smig, seront bien embarrassés lorsqu’il s’agira de donner une seule réponse. Les initiés, ceux qui ont eu à gérer récemment des problèmes de paie vous répondront qu’il en existe plus d’un. Et c’est vrai. Avant le 7 juin 2004, le Maroc avait un seul Smig – ne parlons pas du Smig agricole – comme tous les pays au monde. A partir de cette date, deux augmentations successives (7 juin et 1er juillet), conjuguées à une réduction du temps de travail (8 juin) ont brouillé la donne. Aujourd’hui, un seul employeur peut se retrouver avec deux Smig. Il sera ainsi dans l’obligation de payer à deux ouvriers, qui il y a un an auraient perçu 1 826 DH par mois chacun, 2 009 DH et 1 842 DH.
Premier problème : une logistique comptable difficile à gérer. Depuis quelques mois, les services comptables des sociétés s’ingénient à paramétrer leurs logiciels de paie pour tenir compte des différents cas et être ainsi en conformité avec la loi. Et encore, il s’agit là de ceux qui auront fait preuve de persévérance. Nombreux sont les autres qui se sont «mélangé les pinceaux» et qui attendent qu’on veuille bien les éclairer.
Deuxième problème : des récriminations sociales à n’en plus finir. Entre les smigards qui travaillent 44 heures par semaine mais qui sont payés sur la base de 48 heures pour ne pas perdre leurs acquis, conformément aux accords sociaux, et ceux, nouveaux, qui sont rémunérés pour les 44 heures qu’ils auront travaillées, il y a une différence difficile à justifier. Même dans le Smig, aujourd’hui, il n’y a plus de justice.
Il est malheureux d’avoir passé des années à attendre un nouveau code du travail pour se retrouver dans la confusion. A cet égard, il semble bien que, pour arriver à ce résultat et avoir la paix sociale, l’Etat a lâché trop de lest pour ensuite essayer de colmater les brèches avec des mesures pas toujours claires.
Alea jacta est, dira-t-on. Certes, mais au moins que quelqu’un prenne la peine d’expliquer par A+B à ces chefs de PME, qui constituent l’essentiel du tissu économique, comment s’y prendre pour calculer la paie de leurs employés. Hier, on leur disait qu’il fallait attendre les décrets d’application. Aujourd’hui, six mois après l’entrée en vigueur du Code du travail, ils ne sont pas plus avancés, pas plus qu’ils ne savent comment comptabiliser les heures supplémentaires. Le ministère de l’Emploi a-t-il communiqué dans ce sens ? Et la CGEM ?