Au Royaume
Richesses de la nation
Au terme de trois années de réflexion et de travaux concertés, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) et Bank Al-Maghrib viennent de rendre public leur document volumineux sur la richesse globale du pays estimée à 12 000 milliards de DH en 2013 et dont, nous dit-on, presque 70% sont constitués de capital immatériel lui-même composé de trois éléments fondamentaux que sont le capital humain, le social et l’institutionnel.

Maintenant que nous connaissons avec précision l’état de la richesse globale du Maroc, que faut-il en faire? Parce que mesurer n’est pas une fin en soi. Un tel travail ne relève pas seulement de la gymnastique intellectuelle. Loin de là et le Souverain l’avait d’ailleurs bien souligné dans son discours de juillet 2014, quand il avait commandité le travail. La connaissance du capital immatériel ne doit être en fait que le point de départ d’un travail tout aussi important qui devra aboutir en fin de parcours à une meilleure répartition de la richesse globale et de ses bienfaits. Mais avant de créer de la richesse, il faut d’abord préserver le capital de départ. Autrement dit, il s’agira de consolider les acquis en immunisant la société, notamment, contre les esprits rétrogrades, en ne commettant plus les erreurs du passé avec des politiques publiques mal conçues ou des décisions mal calculées qui ramènent le pays des années en arrière. Ce qui a été fait dans l’enseignement à partir du milieu des années 80 en est la meilleure illustration. Aujourd’hui on se retrouve avec quatre années de scolarisation en moyenne pour chaque Marocain âgé de plus de 25 ans !
Créer de la richesse supplémentaire revient, ensuite, à trouver les bons mécanismes pour faire fructifier le capital de départ.
Pour cela, le Maroc devra faire des choix en termes de modes de production. Le mode classique, monétaire, consistant à combiner de manière basique des facteurs tels que la matière première, le travail et le capital pour créer de la plus-value qui sera ensuite répartie est aujourd’hui obsolète. Les économies les plus performantes nous démontrent clairement que la valorisation de la production, du travail d’un être humain ne se fait plus au nombre d’heures travaillées mais à la valeur de ce travail en créativité, en innovation, en technologie et en recherche. Et là aussi le Maroc devra faire des choix très pertinents qui conditionneront une fois de plus les politiques publiques à venir, à commencer par celle de l’enseignement. Enfin, une fois la richesse créée, il faudra la répartir. Certes, l’Etat a un rôle à jouer dans la répartition, à travers l’impôt par exemple, qui est un outil de redistribution. Mais la notion de répartition dépasse l’Etat car elle est basée sur deux autres notions que sont le partage et la solidarité qui sont, avant tout, des valeurs éminemment sociétales.
Gérer la richesse de la nation revient, donc, tout simplement à construire un modèle de société. Lequel voulons-nous finalement ? C’est la vraie question…
