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Au Royaume

Ramadan en points de PIB

Depuis quelques années, les statisticiens du Haut commissariat au plan nous servent chaque mois de Ramadan quelques chiffres sur les effets du mois sacré sur le pouvoir d’achat des ménages marocains.

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Edito Saad Benmansour

C’est une habitude fort louable qui permet au moins de dissiper toute incompréhension basée sur de simples perceptions. Ainsi, chaque année durant les premiers jours du mois de Ramadan, une majorité de consommateurs marocains vous dira et vous démontrera, preuve à l’appui, que tous les prix des produits alimentaires de base ont flambé. Pour la presse, c’est ce qu’on appelle dans le jargon un marronnier. Les titres sur la flambée des prix foisonnent dans les journaux.

Et pourtant quand on prend le rapport très scientifique des statisticiens du HCP, on découvre qu’on est loin, très loin d’une quelconque flambée. C’est à peine si l’on enregistre de petites hausses de prix qui vont de 0,3 à 0,6% pour quelques produits seulement, pas tous. C’est dire que la perception peut parfois être trompeuse, quand bien même elle serait un sentiment partagé par une quasi-majorité. La tradition ramadanesque de nos statisticiens a déjà cet avantage de démystifier le phénomène et définir avec précision de quoi on parle. Mais ils devraient aller plus loin dans leur investigation pour dépasser la simple question des prix et du pouvoir d’achat en élargissant la réflexion aux effets du jeune sur l’économie tout entière. Aujourd’hui, il serait intéressant de savoir, en effet, ce que le mois du jeûne représente en points de PIB en termes de manque à gagner. Il n’est un secret pour personne que dans l’hôtellerie, par exemple, le mois de Ramadan est pratiquement un mois blanc avec des baisses de nuitées qui peuvent dépasser les 30, voire 40%, un effondrement. Par conséquent, Ramadan c’est aussi une baisse d’activité dans les autres secteurs qui gravitent autour de l’hôtellerie et du tourisme. Le mois de jeûne est également synonyme d’une baisse de régime dans l’administration publique et même dans le secteur privé. La chute de la productivité est flagrante. Mais à ce jour, aucune étude sérieuse n’a été faite dans ce sens pour nous dire combien de points de PIB nous y perdons, si perte il y a. Parce que de l’autre côté, le mois de Ramadan c’est aussi un mois où une multitude d’activités, de commerces et de petits métiers se développent, faisant vivre des milliers de petites mains et de familles, ce qui représente aussi des revenus, donc de la consommation et finalement aussi de la valeur ajoutée. Il faut espérer que ce qui est perdu d’un côté est récupéré de l’autre. Nos statisticiens doivent se décider un jour pour peser Ramadan en points de PIB…