Au Royaume
Or, le Roi a dit…
Ce n’est pas la première fois que La Vie éco consacre un édito à la manière dont l’Etat viole allègrement les lois votées par les représentants de la nation et ce ne sera pas la dernière.
Ce n’est pas la première fois que La Vie éco consacre un édito à la manière dont l’Etat viole allègrement les lois votées par les représentants de la nation et ce ne sera pas la dernière, car l’Etat est puissant et l’abus est facile, trop facile face aux citoyens désemparés. Il y a quelques jours, un citoyen circulant en dehors de l’agglomération se fait verbaliser pour excès de vitesse. Disposé à payer, mais n’étant pas muni d’espèces, il propose de s’acquitter de l’amende par chèque. Le gendarme verbalisateur refuse, arguant du fait que le chèque n’est pas accepté. Le citoyen, connaissant ses droits, lui demande de décliner son identité et son grade. Peine perdue, il se verra retirer son permis pour ne pas avoir payé, non sans se voir déclarer, à titre de justification, par l’agent, qu’une circulaire de la perception enjoint aux contrôleurs de la route de refuser le chèque comme moyen de paiement.
Que dit la loi ? Dans le Code de la route, article 221, on peut lire que «le montant des amendes peut être acquitté immédiatement entre les mains de l’agent verbalisateur». Dans l’article 223, on lit «le paiement de l’amende (…) est effectué comme suit : en espèces ; par chèque…». L’article 192, lui, stipule que «les agents doivent lors de l’exercice du contrôle (…) être munis d’un badge faisant apparaître le prénom et le nom, la qualité, la photo et le numéro d’immatriculation professionnel». Enfin, le Code de commerce parle du chèque comme «un moyen de paiement à vue».
Renseignement pris auprès de la Trésorerie générale : la circulaire en question n’existe pas. En revanche et selon des sources officieuses à l’Intérieur, cette circulaire, interdisant le paiement par chèque, émane des commandements de la gendarmerie et de la police.
En d’autres termes, l’autorité se permet par simple circulaire d’annuler les prescriptions d’une loi et refuse de se plier au port de badge réglementaire (seul le matricule est arboré). L’autorité méprise la loi : elle doit logiquement en rendre des comptes…
Quand donc cela s’arrêtera-t-il ? En février 2006, l’Etat avait permis à ses agents de retirer les permis de conduire aux contrevenants sans base légale. Il a fallu que la presse en parle et que le Parlement intervienne pour que cela cesse. En janvier 2011, la Gendarmerie avait publiquement utilisé des radars illégaux pour continuer à verbaliser. Aujourd’hui c’est le chèque, demain ce sera quoi ?
Que faire ? Faut-il à chaque fois aboyer pour que l’Etat respecte les lois ? On veut bien, mais encore faut-il que nos aboiements soient audibles. Car, visiblement, l’Etat s’en fout : les chiens défenseurs des droits des citoyens aboient et la caravane des abus de l’Etat passe…
Dans ce cas, faisons la à la marocaine, puisque seule cette formule marche à tous les coups. M. le chef du gouvernement, M. le ministre de l’intérieur, M. le «qui de droit» : dans son dernier discours du Trône, le Souverain a dit : «Puisse Dieu nous accorder plein succès dans l’action que nous menons en vue de consolider l’Etat de droit». Or, ce que ces représentants de l’Etat font fragilise justement l’Etat de droit. Ils agissent donc contre la volonté du Souverain, n’est-ce pas ?