Au Royaume
Mohamed Hdid : Le succès et la renommée à la force du poignet
Né dans une région pauvre, il fera des études comptables son credo et ira loin avec
un cursus entièrement marocain.
A 28 ans, il devient
le patron effectif du Cabinet Saïdi et associés au sein duquel il devient actionnaire.
Depuis 2006, il a la responsabilité de la commission fiscalité
de la CGEM et son avis
est très écouté.

Depuis quelques années, le nom de Mohamed Hdid est bien connu au sein des milieux économiques et financiers. Il faut dire qu’être patron d’un des plus grands cabinets d’expertise comptable du Maroc et assurer en même temps la présidence de la commission fiscalité à la CGEM depuis 2006 braque forcément les projecteurs sur vous. Mais il n’y a pas que les titres, il y a aussi, selon ses amis à qui La Vie éco a demandé leur avis, la compétence technique, la capacité d’écoute et le sens de la concision.
Etre né dans une région éloignée de tout centre de décision administrative ou de foyer économique prospère n’est pas une fatalité. A la force du poignet, beaucoup de personnes se sont construit un avenir radieux. Mohamed Hdid, expert-comptable associé gérant du cabinet Saaidi & Hdid consultants, est de ceux-là.
Il est né en 1968 à Tinghir, une région du Maroc profond où, à l’époque, la richesse provient en grande partie des enfants partis en Europe dans les années soixante et soixante-dix, pour grossir les rangs des ouvriers maghrébins. Deuxième enfant d’une fratrie de quatre, il ira d’abord au M’sid et connaîtra la fameuse «fallaka», l’arme habituelle et terrible du fquih d’antan qui en usait et abusait pour entretenir aussi bien l’ordre que son autorité, «que personne, du reste, ne songeait à remettre en cause», sourit nostalgiquement Mohamed Hdid. Fort heureusement, l’école puis le collège ne sont pas très loin dans la vallée de Tinghir…
Expertise comptable à l’ISCAE, mais le mémoire attendra…
Mohamed Hdid ressent dès le début que la sacralité des études n’est pas un vain mot et, en bon amazigh, sa passion pour les chiffres ne relève pas du hasard. «Chez nous, on ne savait que rarement lire et écrire et on était compréhensif quant à cette lacune, mais on ne pardonnait pas à celui qui ne sait pas compter», explique-t-il. Le jeune Mohamed va choisir, justement, la comptabilité dès le départ et il n’en sortira plus. Pour le lycée, il devra goûter aux contraintes de l’internat à Marrakech. En 1986, il décroche son bac dans les techniques comptables et commerciales. L’idée d’aller en Europe pour poursuivre ses études ne lui effleure pas l’esprit. Il reste à Marrakech où il obtient une licence en sciences économiques, en 1990. C’est alors qu’il entend parler du premier cycle d’expertise comptable qui venait à peine de s’ouvrir à l’Institut supérieur de commerce et d’administration des entreprises (ISCAE). Il est si pressé de s’y inscrire, tant il est fasciné par ce cursus mis à la portée des étudiants marocains sans passer par les universités européennes, qu’il va rater une bourse que lui offrait l’université.
Le cycle d’expertise comptable dure trois années et il faut obligatoirement passer par un cabinet pour compléter la formation théorique par un stage pratique. C’est au sein du cabinet d’Abderrahmane Saaidi qu’il a été recruté dès son arrivée à Casablanca, en 1990, et il y fera tout son parcours pour en devenir associé. Il explique qu’il n’a aucun mérite car, dit-il modestement : «La vérité est que je n’ai fait que saisir, par hasard, de petits hasards qui se sont généreusement offerts à moi».
En fait, Mohamed Hdid, qui ne soutiendra son mémoire qu’en 1996, tant il est pris par le travail et les responsabilités, va devenir rapidement un des piliers du cabinet, très tôt. Il devient un des trois principaux collaborateurs du cabinet quand M. Saaidi est nommé ministre de la privatisation, en 1993. A l’époque, l’effectif n’atteignait même pas vingt personnes et le chiffre d’affaires était dix fois inférieur au chiffre actuel.
Témoin et acteur de l’évolution de la profession
Mohamed Hdid devient ensuite actionnaire en apportant sa seule matière grise comme contribution. Dès 1996, il prend totalement en charge un cabinet qui compte aujourd’hui 55 personnes et dont la clientèle est constituée d’entreprises privées. Cet homme discret, mais très efficace, connaît sur le bout des doigts les arcanes du métier et peut très clairement détailler les grandes évolutions de ces 20 dernières années. Il explique que les grands cabinets ne peuvent s’attaquer au marché public car il est impossible, vu leurs charges, d’avoir une marge de manœuvre suffisante pour être parmi les moins-disants. Ainsi, le marché de l’expertise comptable est naturellement régulé, ce qui laisse aux petits cabinets l’opportunité de travailler et de se faire les dents.
Il se souvient que les grands moments de la profession du conseil juridique et fiscal ont été d’abord la mise en place, en 1994, de l’ordre des experts-comptables dont il est actuellement le premier vice-président du conseil national, mais aussi et surtout l’adoption de la loi sur la société anonyme qui encadre la mission de commissariat au compte.
Quand on lui pose la question sur l’activité centrale d’un cabinet d’expertise comptable, Mohamed Hdid arbore un sourire : «Je sais ce que pense une partie du public au sujet des astuces que nous pouvons suggérer aux entreprises pour payer moins d’impôts. En fait, il faut savoir que les fraudeurs n’ont pas besoin de nos services et ils sont bien inspirés de ne pas s’adresser à nous. Maintenant, il faut savoir que notre métier est le conseil en affaires et l’assistance aux entreprises pour qu’elles se conforment à la loi, sans prendre de risques. Cela, moi et mes confrères, nous le revendiquons et cela se passe ainsi partout dans le monde». L’expert-comptable fait de l’optimisation fiscale, il utilise au mieux, et au profit de son client, les règles édictées par la loi. Mais il n’y a pas que cela, l’expertise-comptable est aussi un métier de conseil, d’accompagnement dans le développement.
