Au Royaume
Même combat
La paralysie de l’école publique est finalement assez similaire à la longue apnée du football national. Les deux sont devenus l’ombre d’eux-mêmes, entre un passé plutôt glorieux, un présent angoissant et un futur incertain.
Quand Fouzi Lekjâa, président de la Fédération royale marocaine de football (FRMF), énumère les problèmes dont a pâti le football national durant des décennies (voir pages 30 et 31), on ne peut s’empêcher de faire le parallèle avec la déconfiture de l’école publique. «Il ne suffit pas de réunir une centaine d’enfants dans une école de foot, leur donner des t-shirts du club, faire de petites animations et prétendre former», dit-il.
Une telle déclaration pourrait bien être transposée au système éducatif national. Un tableau noir, des élèves, un cartable chargé à bloc et un instituteur ne suffisent pas à faire de l’école une institution investie de la lourde mission de préparer les générations futures.
Afin de tempérer les jugements sévères sur l’école publique, d’aucuns mettent en avant le fait que souvent, sinon toujours, la première note au bac est obtenue par un élève du public. Soit. Mais peut-on se baser sur des exceptions pour juger tout un système ? Bien sûr que non. C’est sur la masse qu’on devrait l’évaluer et non sur des pépites qui ne doivent leur réussite qu’à leur effort personnel. Idem pour le foot où une réussite de temps à autre ne doit pas faire oublier que, ce qui compte, c’est d’être capable de renouveler une équipe tout en maintenant le même niveau de performance.
Fouzi Lekjâa évoque également un passage à vide, de dix ans, pendant lequel un brillant minime a toutes les chances de perdre son talent dans une école de foot qui n’a rien à lui apprendre, ou très peu. Tous les rapports qui se sont succédé ces dernières années font le même constat au sujet de l’enseignement public, et ce, dès le primaire. On en sort quasiment tel qu’on y est rentré.
La paralysie de l’école publique est finalement assez similaire à la longue apnée du football national. Les deux sont devenus l’ombre d’eux-mêmes, entre un passé plutôt glorieux, un présent angoissant et un futur incertain. On a fini presque par s’en accommoder. Pire encore, on a perdu foi en eux… Enfin, pas tous les deux. Récemment, le foot national semble, on l’espère tous, sur le point d’exorciser la malédiction de la défaite. C’est tout le mal que l’on souhaite à l’école publique.