Au Royaume
Les impératifs du Budget
Il arrive un moment où une certaine vérité des prix, même partielle, devient nécessaire. On ne peut plus continuer à soutenir aveuglément et espérer faire payer les riches uniquement, ça ne suffira jamais.
La Loi de finances prendra un peu plus de temps que prévu. Dans la bouche des responsables gouvernementaux, la phrase prend tout son sens. Si la confection du budget demandera autant de temps c’est que des arbitrages lourds doivent être entrepris.
Depuis plusieurs années, le Maroc ne s’était pas retrouvé dans un tel scénario : un niveau de déficit record, des réserves en devises amaigries et, plus dangereux, un solde ordinaire négatif. L’Etat s’endette, non pas pour investir mais juste pour son train de vie, ses salaires et les subventions des produits stratégiques. Il y aura nécessairement des choix douloureux à faire. Au delà de la réduction des dépenses de l’Etat, tout le débat porte aujourd’hui sur la facture de la compensation et ce fameux fonds de solidarité que l’on veut créer.
Dans le premier cas, il faut bien se rendre à l’évidence que nous devons être le seul pays non pétrolier à payer le carburant à la pompe à un prix aussi bas. 4,50 DH de soutien pour le litre de gasoil, 21 milliards de DH par an. Est-ce soutenable ? Il y a des sacrifices à faire et des répercussions à gérer : 72% du gasoil consommé aujourd’hui va au transport. Le gouvernement doit augmenter quelque peu le prix et trouver un accord de modération avec les transporteurs. Restituer l’aide à travers une hausse de la vignette est certes une juste mesure, mais reste un coup d’épée dans l’eau par sa faiblesse. Tous les Marocains doivent assumer la hausse, les riches qui consomment beaucoup comme les moins riches qui consomment peu.
Le même scénario vaut pour le fonds de solidarité. Faire payer les grandes entreprises les plus profitables est certes un acte de solidarité du capital envers les démunis, mais la vision est forcément d’une portée limitée en termes de revenus et risque même de créer un découragement de la performance. Là aussi, l’effort de solidarité doit être supporté par tous, en fonction des moyens.
Enfin, il y a un volet dont on ne parle pas assez, celui de la hausse effrénée des importations. On ne vise pas, là, les achats de biens d’équipements mais de ceux des biens finis de consommation. On se préoccupe, à juste titre, de l’export, mais que fait-on pour encourager la production pour le marché intérieur qui produit 66% du PIB et qui consomme de plus en plus de produits importés ? Il faut développer une vision de ré-industrialisation du pays, en fonction des besoins locaux. Le gouvernement devrait ériger cette nécessité en plan sectoriel.