Au Royaume
Le technocrate et le politique
Les partis, qu’ils soient dans la majorité ou l’opposition, ont besoin plus que jamais de mettre à niveau leurs parlementaires pour qu’ils puissent être en mesure de décortiquer les lois, de les comprendre, de les discuter et de prendre la décision.
Ça ne rate jamais. Chaque année, le projet de Loi de finances apporte son lot de surprises, bonnes et mauvaises. Certaines sont rattrapées au Parlement mais d’autres passent comme des lettres à la poste et, souvent, ne se dévoilent au grand jour que quand il est trop tard. Cette année, le projet n’a pas dérogé à la règle. La preuve, bien après le vote du projet par la première Chambre, voilà qu’on y découvre une bombe. La loi comporte, en effet, une série de mesures relatives aux transactions foncières et qui, si elles sont appliquées à la lettre, risquent de signer l’arrêt de mort du secteur immobilier.
Certes, le projet n’étant pas encore adopté définitivement, un rattrapage est toujours possible moyennant un amendement chez les conseillers et une deuxième lecture par les représentants. Mais au-delà, un tel incident et bien d’autres qui ne manqueront certainement pas d’apparaître interpellent quant aux rôles des uns et des autres. Les politiques, gouvernement, opposition, parlementaires perdent leur temps à se chamailler sur les formes, parfois, il est vrai sur des questions importantes mais on oublie beaucoup d’autres détails. Le temps perdu dans les querelles, les réquisitoires et les batailles politiques serait mieux investi si on le passait à éplucher la loi. A défaut, on se retrouve avec de très mauvaises surprises.
En fait, si de telles dispositions ont été insérées dans le projet de loi, c’est que la technostructure du ministère des finances, dont fait partie la direction des impôts, l’a fait dans un objectif précis qui est de lutter contre la spéculation et, au passage aussi, de collecter plus de recettes dont l’Etat a grandement besoin. On ne peut pas en vouloir aux technocrates qui sont parfaitement dans leur rôle. D’ailleurs, ils ne font que proposer et c’est les politiciens qui décident. Sauf que pour décider, il faut être outillé. Et la Loi de finances n’est que l’exemple le plus visible.
Les partis, qu’ils soient dans la majorité ou l’opposition, ont besoin plus que jamais de mettre à niveau leurs parlementaires pour qu’ils puissent être en mesure de décortiquer les lois, de les comprendre, de les discuter et de prendre la décision. Les associations professionnelles, comme la CGEM par exemple, doivent, elles, se doter d’équipes dédiées pour faire de la veille et, surtout, pour apporter, s’il le faut, leur expertise aux politiques. Encore plus quand il s’agit de lois qui touchent directement la vie des entreprises.