Au Royaume
Le dialogue social s’essouffle-t-il ?
Il ne faut pas s’arrêter de dialoguer, sans toujours rechercher l’impossible consensus.
Cela va faire bientôt trois ans que l’accord du dialogue social a été signé entre le gouvernement et les partenaires sociaux. De grands dossiers ont, depuis, été bouclés : Code du travail, Assurance maladie obligatoire (AMO), régularisation de la situation des fonctionnaires, départs volontaires à la retraiteÂ… D’autres, tout aussi importants, sont toujours ouverts, sinon (volontairement ?) oubliés : renforcement de l’inspection du travail, création d’une indemnité pour perte d’emploi et d’un fonds pour le logement social, promotion des conventions collectives, réforme du système des retraites, mise en place d’une réglementation du droit de grève, etc. Le bilan, on le voit bien, est mitigé, et dire cela, ce n’est pas sacrifier à la règle, heureuse ou malheureuse, de notre métier qui veut qu’on ne parle que des trains qui arrivent en retard. C’est que même sur les questions déjà réglées, du moins certaines d’entre elles, l’insatisfaction est toujours là . Tenez, le Code du travail par exemple ! A peine est-il sorti de l’imprimerie, et même bien avant sur certains points, que le patronat réclame de l’amender. Les syndicats, eux, n’ont pas eu le temps de savourer – secrètement – leur triomphe : très rapidement, ils durent déchanter, en observant que les gains sur papier peuvent ne pas être des victoires sur le terrain. Le Smig a été augmenté ? Les salaires en fin de mois, eux, ont diminué. Les syndicats dans l’entreprise sont désormais reconnus ? Ils ont de plus en plus de difficultés à se constituer. Mais l’employeur aussi, qui faisait un moment dépendre la compétitivité de son entreprise de la » sortie » de cette législation du travail, se rend bien compte qu’il lui faut compléter l’arsenal : il ne veut plus être exposé en permanence à des perturbations dans son entreprise, il réclame donc que le droit de grève soit réglementé. Bref, le dialogue social, cette vertu de l’ère post-communiste, par laquelle on entreprend de faire converger des intérêts que l’on tenait jusque-là pour [naturellement] contradictoires, a encore du chemin à parcourir, des conquêtes à réaliser. Alors, pourquoi ce dialogue social, si activement recherché il n’y a pas longtemps, donne-t-il maintenant l’impression de s’essouffler ? La paix sociale, qui a coûté cher, et d’abord à l’Etat, est certes une réalité. Mais, tel un jardin que l’on veut toujours verdoyant, il ne faut pas s’arrêter de l’entretenir ; et en l’occurrence de dialoguer, sans toujours rechercher l’impossible consensus.
