Au Royaume
L’autre virage nécessaire
L’internet est encore beaucoup plus un instrument de divertissement qu’un outil de travail. or il y a un gisement de croissance que le maroc n’exploite pas.
Qui l’aurait imaginé, il y a douze ans maintenant ? Le poids considérable pris par le secteur télécoms dans l’économie marocaine sert de cas d’école. Le Maroc a pris, en quelques années, le virage des télécoms avec une rapidité déconcertante : 36 millions de lignes mobiles, 44% des 12-14 ans déjà équipés, 64 minutes de communication par usager et par mois, 3,6 millions d’ordinateurs dans les maisons, 35% des foyers connectés à internet, 15 millions d’internautes… Ce développement a généré, en 2011, 37 milliards de DH de chiffre d’affaires rien que pour les opérateurs de téléphonie. Aujourd’hui la part des télécoms dans le PIB atteint les 4%.
Jusqu’où cette progression ira-t-elle ? C’est là la question. Après des années de folle croissance, le secteur de la téléphonie mobile s’apprête à goûter à la lenteur de la maturité. Avec des prix en baisse de 49% en trois ans et un taux de pénétration qui se stabilise, le mobile, moteur de la croissance du secteur, sera tout naturellement appelé à s’essouffler. Il faudra alors chercher de la croissance ailleurs… et cet ailleurs s’appelle internet.
Car à l’heure où internet fait partie de notre quotidien, le contraste entre la nécessité d’être branché et son importance dans le secteur des télécoms est saisissant. Internet représente à peine 5% du CA du secteur. L’explication de ce gap réside, entre autres, dans la faiblesse du contenu local. 86% des sites visités par ces 15 millions de Marocains sont des vitrines de contenu étranger. L’internet est encore beaucoup plus un instrument de divertissement qu’un outil de travail.
Or, il y a là un gisement de croissance que le Maroc n’exploite pas. Et il ne s’agit pas de croissance seulement au profit des opérateurs privés mais également et surtout de développement économique et de création d’emplois. L’administration en ligne ? Elle est encore balbutiante ! Le paiement en ligne ? Il reste limité ! Les services marchands, administratifs ou d’utilité sur internet ? Trop peu ou méconnus ? Et pourtant, internet pourrait grandement faciliter la vie aux citoyens en leur épargnant du temps ou des déplacements aussi coûteux que fastidieux. Internet peut aussi, dématérialisation aidant, réduire la corruption. Enfin internet peut aider à créer de petites entreprises qui se chargeraient de faciliter la vie aux citoyens, en termes de logistique, de gain de temps et d’organisation de la vie quotidienne. Quand le peuple est en avance sur l’Etat, c’est l’Etat qui doit s’adapter. Il faut une véritable vision, une anticipation sur les années à venir et non des plans, chacun répondant aux objectifs d’un département.