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Au Royaume

La stratège du commerce intérieur

Lauréate de l’Ecole Mohammedia d’ingénieurs en 1990, elle fait une année dans le privé avant d’intégrer l’administration.
Elle a été attirée par les méthodes de travail et de gouvernance, à  l’époque avant-gardistes, du ministère du commerce et de l’industrie.
Son rêve : «désenclaver» la toute petite entreprise pour développer le tissu économique.

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Elle est aujourd’hui un cadre clé du ministère du commerce, de l’industrie et des nouvelles technologies. Pourtant, au départ, Mounia Boucetta, aujourd’hui directrice du commerce intérieur, ne voulait pas devenir fonctionnaire. Et surtout pas dans ce département dont elle connaissait bien le bâtiment parce que son père y avait servi, précisément dans la division de l’imprimerie. Près de 17 ans après y avoir été recrutée, elle ne regrette rien. Bien au contraire, elle affirme que si c’était à  refaire, ce serait avec le même entrain, le même dévouement et, car il y en a aussi, le même plaisir.

Comment tout cela s’est-il passé ?
Après une première expérience avec une société d’ingénierie, comme beaucoup de cadres supérieurs de sa génération, elle fut en proie, à  un moment donné, à  deux tentations : le besoin de s’affirmer au sein d’une structure privée avec la perspective de gagner confortablement sa vie. Quant à  l’attrait de la fonction publique, il se résumait pour elle à  la reconnaissance sociale et à  la sécurité de l’emploi qu’il garantit. Le risque, avec le fonctionnariat, était de ne pas parvenir à  la réalisation de soi.

Mais Mounia Boucetta aura une belle surprise : le ministère du commerce et de l’industrie (MCI) est un des premiers départements marocains oà¹, bien avant son arrivée, un souffle nouveau à  commencé à  se manifester. On recrutait des jeunes et on les impliquait dans des projets d’accompagnement de la mutation des métiers, de l’industrie, du commerce… Le cadre juridique, le système d’homologation, les procédures…, il fallait mettre en place des instruments de diagnostic et d’analyse, réapprendre à  écouter le capital, à  différents niveaux, pour améliorer le tissu économique. Bref, c’est au milieu de cette effervescence que Mounia Boucetta intègre le MCI. Très vite, elle commencera à  monter dans la hiérarchie jusqu’à  sa nomination, en 2000, au poste de directrice du commerce intérieur. Pendant une année, de septembre 2006 à  septembre 2007, elle assurera en plus l’intérim de la direction de la production industrielle, après le départ de son collègue Jamal Eddine El Jamali.

Née en 1967 dans une famille de 3 enfants dont elle est l’aà®née, Mounia Boucetta s’oriente rapidement vers les mathématiques. Après un bac sciences maths obtenu en 1985, elle s’inscrit à  l’Ecole Mohammedia d’ingénieurs. Elle en sortira, cinq ans plus tard, ingénieur d’Etat option génie des procédés industriels.

La protection du consommateur, un dossier qui lui tient à  cÅ“ur
Elle est d’abord recrutée par une société privée comme chef de projet. Elle y passe une année. A l’époque, elle avait entendu parler de la nouvelle orientation du ministère o๠l’on avait introduit une démarche et des méthodes de gestion et de gouvernance proches de celles de l’entreprise. Elle postule pour un emploi et c’est tout naturellement que son dossier est accepté. Mounia Boucetta rejoint d’abord la direction de la production industrielle. Puis elle est promue chef de division de l’approvisionnement et de la distribution avant d’être nommée directrice du commerce intérieur.

Certains dossiers lui tiennent particulièrement à  cÅ“ur. Entre autres, les droits des consommateurs. Au centre, la recherche de fonds d’appui aux associations et la mise en place des mécanismes. Un travail de longue haleine car, comme elle le dit, «il a fallu accompagner et pérenniser ce mouvement. Si nous avons aujourd’hui une trentaine d’associations de défense de consommateurs, seule une dizaine dispose de mécanismes efficaces qui vont en faire les interlocuteurs de demain».

A côté de ses charges professionnelles, elle s’est engagée dans l’associatif
Le deuxième chantier est le plan Rawaj, une stratégie dévoilée en 2007 et qui ambitionne de révolutionner le secteur du commerce et des services dans toutes ses composantes, depuis la téléboutique jusqu’à  la grande surface en passant par le commerce de détail traditionnel. Concrètement, cela veut dire, par exemple, créer des opportunités autour de grands projets touristiques. De jeunes promoteurs pourraient également offrir des services plus ciblés en matière de télécoms à  partir de kiosques plus modernes, ou encore des produits d’artisanat innovants.
Ce sont là  des pistes à  explorer. Et cela nous mène tout droit à  ce qu’on appelle aujourd’hui «axe de développement de la toute petite entreprise» (TPE).

Selon Mounia Boucetta, «c’est un bon filon pour un pays comme le nôtre qui compte 850 000 TPE dont 400 000 en milieu rural. Il faut mettre à  la disposition de ce tissu économique des moyens de communication, des infrastructures et même des cadres fiscaux appropriés. En outre, les communes devraient réfléchir à  des mécanismes, sur le plan foncier, par exemple, de nature à  capter et encourager ce type d’entreprises. Autour de cela, on devrait créer une convergence des efforts et de la créativité du monde de la micro finance, de l’Etat et des élus».

Mounia Boucetta travaille aussi sur une sorte «de service universel en matière de commerce». Elle ne comprend pas pourquoi, dans les régions isolées ou difficiles d’accès, on doit facturer un surcoût au consommateur. Selon elle, «des mécanismes doivent être trouvés pour que l’offre de produits soit enrichie pour les régions éloignées du pays, et que le consommateur ne soit pas pénalisé parce qu’il a choisi de vivre dans une zone reculée». Bien entendu, une telle approche suppose une démarche impliquant plusieurs ministères et même des opérateurs économiques. Une facette du militantisme de Mounia Boucetta, en plus de son engagement dans le domaine associatif. La preuve : malgré un agenda chargé, Mounia Boucetta trouve le temps d’assurer la fonction de secrétaire générale d’une grande association de microcrédit de la place.