Au Royaume
Il veut trouver un job pour 200 000 diplômés en trois ans
Il redouble en classes prépas pour pouvoir faire Polytechnique.
Après un passage chez Wafa systèmes, il sera l’un des acteurs
de la restructuration de l’OFPPT.
Il réussit, un an et demi après sa nomination à la tête
de l’Anapec, à changer l’image de l’agence.

Le parcours de Hafid Kamal résume, de manière magistrale, le cheminement de toute une génération de cadres marocains de haut vol, celle qui a compris, étant issue de familles modestes, qu’il n’y a qu’un seul moyen de briller : réussir un bon parcours académique. Qui aurait pu imaginer que ce fils d’Azrou, où il naquit en 1963, serait un jour lauréat de Polytechnique Paris ? Bien évidemment, si la volonté de se surpasser est un ingrédient majeur, il faut aussi avoir le talent. Or, le jeune Hafid est brillantdepuis le départ, même s’il raconte qu’il aimait déambuler à n’enpas finir les jours de souk à Azrou (le mardi). D’ailleurs, sespetites escapades diurnes donnaient des frayeurs à ses parents. C’estdire qu’on peut naître rêveur et devenir un crack en mathématiques.Il commence, comme beaucoup de Marocains de sa génération, parle m’sid et n’est accepté à l’école qu’à l’âgede sept ans. A l’école, puis au lycée, il gagne vite la sympathiede ses enseignants.
Débuts catastrophiques en prépas !
A 11 ans, il découvre le calcul durant les séances de ce qu’onappelait les classes de «résolution des problèmes».Plus tard, il croulera sous les prix de fin d’année au lycéeTarik. Il fallait être le meilleur et, au pire, parmi les premiers. Sonsens de la compétition lui permettra de relever les défis qui allaientsuivre, après un Bac «sciences maths », obtenu en 1982, quilui ouvre les portes des prépas du lycée Lyautey.
Il se souvient qu’il n’avait jamais entendu parler de Polytechniqueni même de prépas et c’est un de ses condisciples, mieux informé,qui lui parle de la prestigieuse institution dont il sera lauréat en 1987.Auparavant, il lui faudra surmonter quelques épreuves. Il se souvientqu’il a fallu tenir bon, car, comme il le souligne, «les étudescomme la vie sont loin d’être un long fleuve tranquille et il a fallus’appliquer et s’impliquer dans les études et pratiquementne penser qu’à cela». Il se rappelle ainsi qu’à l’arrivéeau lycée Lyautey, ses notes furent tout simplement «catastrophiques» pendantles premiers mois. Mais la grosse déception fut son échec au concoursd’entrée à Polytechnique après les deux annéesde prépas. Mais pour lui, ce sera «Polytechnique ou rien» et,au lieu de s’inscrire dans une des autres grandes écoles où il étaitrecevable, il refait une année de prépas au Lycée Louisle Grand, à Paris. En 1985, il entre enfin à Polytechnique, maiscela ne suffira pas à calmer son ardent besoin de briller. Il continueson parcours académique à Supelec pour y décrocher un diplômeen informatique. Et pour finir, il bouclera son cursus par un troisièmecycle en gestion à l’université d’Orsay.
La rencontre avec le patron de l’OFPPT, un tournant !
Une fois ses études terminées, il choisit de se frotter au mondede l’entreprise, d’abord dans le pays d’accueil, avant de rentrerau bercail. Il ne reste pas longtemps dans l’Hexagone où on le retrouvechez Cap Gemini comme consultant en organisation et ingénierie informatique,entre 1990 et 1992. Après tout juste deux ans d’activité enFrance, Hafid Kamal décide de rentrer au pays. Aussitôt, il estrecruté par Wafa Systèmes, une filiale de l’ex-Wafabank,comme responsable de la division technico-commerciale.
En 1994, c’est la rencontre avec Mounir Chraïbi, alors directeur del’Office de la formation professionnelle et de la promotion du travail.Il résume cette période ainsi : «Pendant cette période,mon parcours coïncide avec une belle expérience de restructurationd’un office où l’on voulait appliquer les règles del’ entreprise. En plus du projet lui-même, qui a été exaltant,ce fut aussi un exemple de travail d’équipe qui m’aura marqué».
Hafid Kamal ne quittera l’office qu’en 2005, date à laquelleil va migrer vers le privé. Il est alors directeur à Cegelec. Maispas pour longtemps puisque, la même année, une nomination royalele fera revenir dans le public mais cette fois-ci à un poste de responsabilité.Il est nommé directeur général de l’Anapec (Agencenationale de la promotion de l’emploi et de la compétence). Le hasardfait bien les choses car c’est lui qui avait dirigé l’auditde l’agence, commandité par la Primature alors qu’il étaiten poste à l’OFPPT.
Là, le polytechnicien mettra a profit son expérience. Il suffirad’une année pour dépoussiérer l’agence qui avaitquelque peu perdu de sa crédibilité après l’affaireAnnajat et des performances plutôt moyennes. Nouvelle identité visuelle,objectifs chiffrés et datés, process de traitement des demandesd’emploi et de prospection des entreprises modernisé… L’Anapeca placé la barrière très haut. D’ici fin 2008, elledevra avoir élargi son réseau d’agences à 74 représentations,contre 24 il y a un an, doublé son réseau de conseillers en leportant à 400 personnes, passer de 4 000 à 10 000 entreprises clienteset, surtout, se positionner en véritable organe de placement en répondant à touterequête d’entreprise dans un délai de 36 heures. Axe centralde ce coup de pied dans la fourmilière, le programme «Idmaj»,qui vise à insérer 200 000 diplômés en trois ans.
Pour réaliser tout cela, le DG de l’Anapec ne jure que par l’Homme,tout en veillant à ne pas laisser traîner les projets. Ecoutons-le: «Bien sûr, il faut privilégier le consensuel, sachant qu’à traversdes choix, on peut conduire une équipe à souscrire à desobjectifs qu’elle fera siens. Mais il ne faut pas rêver. D’abordparce que la recherche de l’adhésion de tous peut s’avérercoûteuse et laborieuse. Ensuite, les objectifs doivent être partagésen plusieurs étages et entre différentes structures chargéesde mener à bien un même projet. Toute la question pour moi reposesur une capacité d’analyse mais aussi d’adaptation. Le secretdes uns et des autres repose dans le dosage de ces ingrédients que tousles décideurs de qualité connaissent»
