Au Royaume
Il a bà¢ti l’un des plus grands groupes d’enseignement au Maroc
A 43 ans, il se lance dans l’entreprenariat avec une idée maîtresse: le professionnalisme.
Il arrive à réunir 10 millions de DH pour construire une école
moderne.
IMADE, Polyfinance, EMIAE, EGRH, IMEG, il investit dans l’enseignement
supérieur privé et réussit avec, aujourd’hui, un effectif
de 750 étudiants.

Rêveur et homme d’action, théoricien et praticien sont souvent présentés comme des qualités opposées et rarement cumulables. Le parcours de certains meneurs d’hommes et hommes d’affaires prouve le contraire et celui d’Abderrahmane Lahlou en est une illustration. L’homme qui a fondé le groupe SEGEPEC et les écoles Al Madina (enseignement général et supérieur) manie avec adresse les concepts économiques et de gestion d’entreprise, concepts qui, le plus souvent, trouvent des difficultés à se traduire en réalités palpables. Il a rêvé son projet, étudié sa faisabilité, puis, il a convaincu des industriels de mettre la main à la poche pour en faire une réalité. Une réalité qui, aujourd’hui, entre la maternelle, le secondaire et le supérieur, correspond à un chiffre d’affaires d’environ 30 MDH. Le groupe compte 1 500 élèves dans le primaire et le secondaire, et plus de 750 étudiants pour ce qui est du supérieur. Pourtant, ce petit empire qui n’a qu’une douzaine d’années a commencé par une simple école primaire.
Avant d’en arriver là, Abderrahmane Lahlou, qui est né à Rabat en 1960, a d’abord roulé sa bosse dans plusieurs entreprises du secteur privé. Mais, dit-il, «jamais je n’ai quitté l’enseignement depuis que j’ai commencé à en faire en France, alors que j’étais doctorant en économie».
Abderrahmane Lahlou, qui est le benjamin d’une famille qui compte 8 frères et sœurs, a usé ses fonds de culotte sur les bancs des écoles privées et là, il s’agit certainement d’un hasard. Il fait tout de même l’école publique dans la première partie de son cycle secondaire, puis le lycée Lyautey où il obtient un Bac économie en 1977, avec mention, alors qu’il avait moins de 18 ans. La même année, il s’envole pour Grenoble où, en 1986, il obtient un doctorat en management à l’université Pierre Mendès France.
Quand il rentre au pays, c’est à l’OFPPT qu’il atterrit en tant que responsable du service comptable et financier. Mais il n’y restera guère plus d’une année, préférant migrer vers le secteur privé. Il commencera par travailler pour IMEG, société de consulting, où il restera tout de même sept années consécutives. En 1992, il rejoint Dallah Holding Morocco où il occupe le poste de directeur études et projets.
C’est en quittant cette entreprise qu’il commence à nourrir l’idée de s’investir dans l’enseignement de manière directe. Et comme il s’est toujours arrangé pour donner quelques heures de cours dans des écoles supérieures, il ne s’est jamais déconnecté du monde de l’enseignement. Mais c’est par une école primaire qu’il veut commencer. Pour constituer son tour de table, il ira chercher l’argent auprès d’industriels qu’il a su convaincre qu’il ne fallait pas compter sur des dividendes dès les premières années. Et c’est là que commence l’histoire toute récente du grand groupe qu’il dirige aujourd’hui. Il a 34 ans et y a mis toute son énergie et toute sa matière grise. Le secret de sa réussite ne tient pas seulement aux longues journées de travail harassant où il faut veiller au grain et avoir l’œil sur tout, mais aussi à la mise en place d’un concept qui tient la route. D’abord, il fallait asseoir l’idée, pas très répandue à l’époque, qu’une école doit fonctionner comme une entreprise pour garantir la qualité de l’enseignement prodigué et fonder sa longévité. Convaincu que le problème de l’enseignement se situe essentiellement dans le manque de maîtrise de l’outil linguistique par les élèves, il sait qu’il faut soit recruter les meilleurs pour les cursus d’études supérieures soit les former soi-même. Et c’est ce que le groupe fait puisque plus de 70 % de ses effectifs font toutes leurs études au sein du groupe.
Dès le début, Abderrahmane Lahlou tient à ce que le projet soit bien pensé. Il obtient une enveloppe de 10 millions de DH pour une école construite sur un hectare et selon le cahier des charges d’une école moderne.
Dès la première année, 300 élèves prennent place dans les locaux, d’une superficie de 2 000 m2. Progressivement, après1993, il investit les différentes filières du supérieur : finance et gestion, comptabilité et audit, droit des affaires, commerce et marketing, ressources humaines, ingénierie… Aujourd’hui, le groupe SEGEPEC coiffe 5 écoles supérieures : lMADE, Polyfinance, EMIAE, EGRH et IMEG. Et comme il fallait optimiser l’investissement et l’utilisation des locaux, il se lancera également dans la formation continue, les langues, les cours du soir, l’alphabétisation fonctionnelle, la formation des cadres, les formations à la carte pour les entreprises… Aujourd’hui, aucune niche n’échappe au tableau de chasse de cette entreprise d’éducation qui a pris un essor fulgurant. Et les élèves qui prennent le train en marche sont pris en charge par un système de mise à niveau pour s’assurer qu’aucun d’eux ne ratera son parcours.
Le secret tient en trois mots: langue, méthodologie et communication. Le mal est jugulé à la racine. «Comment voulez-vous transmettre le savoir à quelqu’un qui non seulement a du mal à s’exprimer mais qui ne possède même pas l’outil par lequel vous pouvez dialoguer avec lui ?».
Et le projet intégré qui est en place aujourd’hui, et dont la mécanique est bien huilée, doit être complété par une université dont rêve Abderrahmane Lahlou. Il a bon espoir car, dit-il, «avec une progression de 25 % par an, je ne vois pas pourquoi nous nous arrêterions en si bon chemin».
