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Quand on voit les chiffres du marché du travail, le doute n’est plus permis : le Maroc s’est désindustrialisé de manière flagrante ces dernières années.

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saad benmansour 2013 11 08

Quand on voit les chiffres du marché du travail, le doute n’est plus permis: le Maroc s’est désindustrialisé de manière flagrante ces dernières années. Sinon comment expliquer que, depuis 2009, plus de 25 000 emplois sont perdus chaque année dans l’industrie ?

Certes, diront certains, les politiques sectorielles et les nouveaux métiers comme l’automobile, l’électronique et l’aéronautique, par exemple, sont appelés à prendre le relais. Mais ils ne sont pas tous en état de le faire et certains n’ont pas encore atteint la taille leur permettant de jouer le rôle de locomotive en matière de création d’emplois industriels. Et quand bien même ces nouveaux secteurs deviendraient importants, que fera-t-on des filières classiques? Le textile, le cuir, la fonderie, la chimie, l’agroalimentaire, la plasturgie…, toutes ces filières qui ne sont certes pas dans le spectaculaire mais qui font vivre des millions de ménages sont-elles vouées à disparaître ?

Il faut dire qu’un large pan de notre communauté d’affaires a choisi la facilité en étant appâté par le gain rapide qu’offrent certaines activités comme la promotion immobilière, par exemple. Un projet immobilier s’étend sur un cycle court avec un retour sur investissement au bout de 3 à 4 ans, et procure en plus des marges bénéficiaires bien plus alléchantes que les maigres gains de l’industrie. A quoi bon s’entêter à maintenir en activité une usine en supportant tous les tracas qui vont avec. Il est vrai aussi que quand on voit comment les syndicats mènent la vie dure aux industriels, parfois à juste titre mais parfois aussi par simple surenchère politicienne, le délabrement de notre industrie peut se comprendre.  

Pour beaucoup d’analystes et de théoriciens, la tertiarisation de l’économie marocaine était inéluctable depuis des années. D’autres sont passés par là avant nous. Le développement spectaculaire à l’échelle mondiale de secteurs comme les télécoms, l’offshoring et dans une moindre mesure le tourisme est bien entendu une opportunité qu’il aurait été dommage de rater. Mais cette théorie qui veut que la tertiarisation soit une tendance mondiale inéluctable ne parle pas de détruire l’industrie mais plutôt de développer d’autres secteurs tout en gardant les emplois manufacturiers. L’Allemagne ne vient-elle pas justement de nous prouver qu’une économie ne peut être forte que par son industrie ? De la longue crise qui secoue le monde et plus particulièrement la zone euro depuis fin 2008, le pays a été pratiquement le seul à y avoir résisté et à en être sorti indemne. Il se trouve justement que l’Allemagne est l’un des rares pays européens à avoir jalousement préservé ses grandes industries lourdes comme l’automobile, la métallurgie, la chimie et autres.

Et non seulement il a échappé à la crise mais il en a probablement tiré des profits économiques importants et ses finances publiques en ont ressenti le plus grand bien. En affichant une telle insolente santé, l’Allemagne a fini par faire beaucoup de jaloux parmi ses partenaires, à tel point que la Commission européenne a décidé d’ouvrir une enquête pour cause d’excédent budgétaire anormalement élevé. A chacun ses problèmes…