Au Royaume
Docteur Doukkali…
Les ministres de la santé se succèdent et font tous le même constat effarant : d’un côté, des moyens humains et matériels insuffisants, et, de l’autre, des patients toujours plus nombreux et de moins en moins satisfaits.

À chaque fois, c’est la même rengaine. Les ministres de la santé se succèdent et font tous le même constat effarant : d’un côté, des moyens humains et matériels insuffisants, et, de l’autre, des patients toujours plus nombreux et de moins en moins satisfaits.
Devant les parlementaires, l’actuel ministre de la santé, Anass Doukkali, n’a pas dérogé à la règle. Il promet évidemment d’y remédier en listant des axes stratégiques définis et un échéancier précis. L’homme politique est dans son rôle, qui est celui de poser les problèmes et de proposer des solutions. Sauf que dans ce domaine, comme pour l’éducation par exemple, les contraintes et les dysfonctionnements sont connus par tous et depuis bien longtemps. Il n’est pas besoin d’être un expert en la matière pour le savoir. Et les solutions doivent être identifiées avec minutie pour ne pas rater le virage comme ce fut le cas dans un passé pas très lointain.
Le prédécesseur d’Anass Doukkali, Houcine Louardi, par ailleurs ancien doyen de la Faculté de médecine et de pharmacie de Casablanca, avait pensé avoir trouvé le remède miracle. Pour pousser le personnel médical du public à se consacrer pleinement aux patients du public, il leur avait interdit d’exercer dans le privé en mettant fin au fameux temps plein aménagé.
En croisant le fer avec ses anciens confrères, Houcine Louardi avait pris un risque énorme. Celui de perdre la bataille. Et il l’a perdue. Qui en a payé le prix – et c’est là le problème ? L’hôpital public. L’idée de base était peut-être louable, mais l’approche et la vision globale beaucoup moins, voire pas du tout. En demandant à ses fonctionnaires de choisir entre le privé et le public, beaucoup ont choisi le privé. Des services entiers se sont vidés. D’autres se sont retrouvés du jour au lendemain sans chef, sans grands professeurs pour encadrer les jeunes internes livrés à eux-mêmes…
Ce qui était pensé comme une solution n’a fait qu’exacerber les difficultés d’un hôpital public déjà affaibli. Houcine Louardi était revenu sur sa décision mais le mal était déjà fait. Et la démobilisation de ceux qui naguère avaient obéi à ses injonctions – en restant dans le public – avait atteint son paroxysme.
Dénigrés par une population qui leur attribue toutes les tares (corruption, manque de professionnalisme…), manquant de moyens pour effectuer leur travail dans des conditions minimums de confort, agressés parfois à l’intérieur même des centres hospitaliers, certains fonctionnaires résistent, d’autres guettent la première occasion pour partir en retraite anticipée ou pour rejoindre le privé. Le malaise est là, bien ancré depuis belle lurette…mais on attend toujours la panacée.
