Au Royaume
CDD, le péché originel ?
Tout travail devrait être assorti de cotisations sociales et si l’Etat estime qu’elles sont un frein à l’emploi, il doit y aller de sa poche.
Le 1er juillet 2011, le Maroc se dotait d’une nouvelle Constitution. On pouvait notamment y lire, dans l’article 31, que «l’Etat, les établissements publics et les collectivités territoriales œuvrent à la mobilisation de tous les moyens disponibles pour faciliter l’égal accès des citoyens (…) à la protection sociale, à la couverture médicale (…)».
Le jeudi 29 septembre, l’Etat, en vertu d’une convention signée avec la CGEM, lors des Assises de la jeunesse, lançait deux mesures importantes concernant l’emploi (voir page 26). L’une d’elle consiste à faire prendre en charge par l’Etat le paiement des cotisations sociales (CNSS et AMO) pendant un an, au profit de toute entreprise qui proposerait un CDI à un diplômé recruté sous la formule du contrat d’insertion «Idmaj», à l’issue de la période dudit contrat. De fait, l’Etat n’a eu pour seule préoccupation que d’encourager la transformation des CDD en CDI, estimant qu’il s’agissait d’une bonne formule pour créer de l’emploi durable.
Et le droit à la protection sociale dont parle la Constitution ? Depuis la mise en place du dispositif des contrats d’insertion Anapec, en 2006, le principal reproche qui était fait à la formule était justement le manque de couverture sociale pour ceux que l’on appelle «stagiaires» en formation. Concrètement, ce sont des diplômés qui vont travailler une période de 18 mois, pouvant être renouvelée une fois, sans avoir droit ni à une assurance maladie, ni à des indemnités journalières de maladie, ni à des allocations familiales et qui vont perdre peut-être trois ans de cotisations sociales, alors que dans leur globalité, ces gens à la recherche d’un emploi sont plus âgés que la moyenne et qu’ils doivent cumuler les 3 240 jours nécessaires pour pouvoir bénéficier d’une pension de retraite.
Aujourd’hui, on vient améliorer le processus, mais uniquement pour les diplômés que les entreprises auront jugés valables pour un CDI. Pour les autres, c’est la recherche à nouveau d’un emploi, peut-être un nouveau CDD de 18 mois, s’il sont chanceux, ou à nouveau 36 mois, si leur employeur aime bien profiter du système.
En somme, en voulant encourager l’emploi durable, l’Etat crée une injustice entre les citoyens alors même que la Constitution prône l’égalité. De fait, tout travail devrait être assorti de cotisations sociales et si l’Etat estime qu’elles constituent un frein à l’emploi, il doit y aller de sa poche. Car quel est donc le péché originel de ce diplômé ? Celui de travailler en CDD ? S’agit-il d’une honte ? d’un sous-travail ? Ailleurs, les CDD sont des soupapes du marché de l’emploi qu’ils permettent de rendre plus flexible, offrant plus d’opportunités. Ici on veut juste s’en débarrasser au plus vite et ces «pestiférés» de diplômés avec…