Au Royaume
Au delà des pouvoirs du Roi
le fait de ramener le jugement sur le projet de Constitution à la simple question des pouvoirs du Roi est trop simpliste alors que les enjeux sont bien différents.
Avez-vous lu le projet de nouvelle Constitution ? A cette question posée autour de moi, et jusqu’à l’heure où nous mettions sous presse, mercredi 22 juin, le nombre de personnes qui se sont donné la peine de parcourir les 180 articles de ce texte qui se place au-dessus des autres lois, et qui conditionnera la manière de fonctionner du Maroc pendant de longues années, était extrêmement réduit. De fait, et c’est malheureux, les commentaires obtenus allaient du «oui» béat, parce que le Roi l’a demandé, au «non» obtus, car ce que l’on a lu sur Facebook n’a pas semblé être rassurant.
Rien n’a changé, le Roi garde toujours tous les pouvoirs. C’est en résumé l’opinion de nombreuses personnes qui le pensent sans pouvoir soutenir une argumentation ni une comparaison avec ce qui existe actuellement.
D’abord, c’est faux. Les pouvoirs du Roi, s’ils n’ont pas été grandement réduits, ont été ramenés à des préoccupations d’ordre stratégique et non pas opérationnel. Tout aussi important, son domaine d’action a été encadré et clairement défini, ce qui n’existait pas auparavant. Une clarification des pouvoirs entre ceux du monarque, ceux de l’exécutif et ceux du législatif a été opérée. Nous ne sommes pas dans le cadre d’une monarchie parlementaire, au sens anglo-saxon du terme, mais nous nous apprêtons à quitter celui d’une monarchie purement exécutive et cela on ne le dit pas. A ceux qui mettent en avant le modèle de la monarchie espagnole, par exemple, je conseillerais de se pencher sur la loi suprême de ce pays. Ils seront étonnés par la latitude dont dispose le Souverain ibérique. Informez-vous avant de juger…
Ensuite, le fait de ramener le jugement sur la Constitution à la simple question des pouvoirs du Roi est trop simpliste. Que réclame la rue depuis trois mois ? Justice, lutte contre les rentes, la corruption, les abus de l’Etat, une administration, un gouvernement et un Parlement responsables et qui rendent compte… Il faut alors lire et relire le projet de texte qui sera soumis à référendum. Il fait du Marocain un citoyen que la loi protège, qui dispose d’un droit de recours et qui peut contrôler comment sa contribution à l’Etat est utilisée. Et c’est sur la base de ce constat que nous pensons que le jeu en vaut la chandelle. Nous disons oui en notre âme et conscience. Mais le plus important est de lire pour se faire une opinion personnelle, une conviction intime. C’est l’avenir de chacun d’entre nous qui est mis en balance.