Au Royaume
Adieu
Abdallah Stouky s’est éteint mardi 12 juillet. Un confrère respecté et estimé depuis plus d’un demi-siècle. Il aura été le protagoniste d’une odyssée particulière, compte tenu de la force de sa présence.

C’est une figure emblématique de la presse marocaine qui a ainsi tiré sa révérence. Un nom qui évoque la génération des poids lourds de l’histoire de la presse nationale. Des hommes de position, des intellectuels de haute volée, aujourd’hui, hélas, en voie de disparition.
Les réactions furent immédiates après l’annonce de son décès et tous les médias nationaux ont fait part de leurs condoléances et leur compassion. Les confrères, surtout ceux qui l’ont côtoyé, que Dieu les protège, n’ont pas tari d’éloges vis -à-vis du défunt tout en rappelant son parcours riche en expériences. Il était un journaliste professionnel au vrai sens du terme, extrêmement stratégique, brillant, analytique et, en même temps, il était également capable d’émotion et de compassion. Il faut dire que parfois une éloge funèbre peut s’avérer difficile. Les débuts de feu Stouky dans le métier du journalisme furent avec la presse partisane, avant d’intégrer les légendaires revues Lamalif et Souffles. Il a aussi travaillé à l’Agence Maroc Presse, chroniqué dans plusieurs journaux dont La Vie économique…
Mais c’est en 1978 qu’il va être vraiment sous les feux de la rampe. Un grand défi l’attendait. Cette année, un parti politique venait de se constituer sous le nom de Rassemblement National des Indépendants, connu depuis par l’abréviation RNI. Deux organes de presse écrite naquirent à cette époque. Deux quotidiens, Al Maghrib en langue française et Al Mithaq Al Watani en langue arabe. Et c’est Abdallah Stouky qui fut derrière la création de ces deux quotidiens. La suite va prouver que feu Stouky a été le protagoniste d’une odyssée particulière. Les deux nouveaux-nés se sont rapidement fait une place dans le paysage médiatique hautement dominé à l’époque par la presse partisane, notamment la gauche.
Ceux qui le connaissent bien parlent d’un être exceptionnel épris de valeurs humaines et morales. Ses collègues-complices, ses amis, ses élèves et ses compagnons de route déplorent une grande perte pour le métier de la presse. Le DG de la MAP, Khalil Hachimi Idrissi, un autre vétéran de la presse nationale, a écrit dans ce sens : «Dans la presse, Abdellah Stouky fait partie incontestablement des mythes fondateurs. Il a marqué des générations de journalistes en vrai entrepreneur de presse bien avant l’avènement de l’entreprise de presse moderne telle que nous la connaissons aujourd’hui. Il a eu très tôt une capacité de convaincre les hommes politiques à créer des journaux pour animer la vie publique. Il a mené à bien quelques projets de cette nature qui ont bien marqué les mémoires et qui participent toujours de la vitalité du mythe de Abdellah Stouky “entrepreneur de presse”».
En plus de ses compétences journalistiques, Abdallah Stouky était un fin connaisseur de l’Histoire contemporaine du Royaume et de la région du Maghreb. Des dizaines de journalistes lui doivent beaucoup dans leur réussite dans le domaine.
En fait, en parlant de ce grand professionnel, on ne peut que se rendre compte à quel point la presse marocaine a perdu de sa valeur, de sa force et de son impact. Cette même presse qui gagnerait à profiter de l’expérience de vétérans comme lui, véritable école de l’écriture journalistique. Il convient néanmoins de rappeler que ces vétérans comme Abdallah Stouky auraient vécu l’âge d’or du journalisme dans son sens informatif… Mais c’était bien avant cette montée en puissance des médias sociaux et du journalisme participatif… Une situation face à laquelle les professionnels de l’information ont dû se recentrer sur leur cœur de métier et développer des manières différentes de traiter l’actualité.
