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Retraite : faut-il opter pour le capital ou la rente viagère ?
La majorité des retraités préfère percevoir un capital : 85% chez la CMIR en 2011. Financièrement, la rente à vie est plus intéressante si toutefois l’on survit jusqu’à l’espérance de vie moyenne.

Tous les salariés se posent la question une fois proches de l’âge de la retraite : faut-il percevoir ses droits sous forme de capital ou de rente viagère (pension servie jusqu’au décès) ? Bien sûr, les contraintes ou les ambitions de chacun peuvent pousser au choix de l’une ou l’autre des options, indépendamment de toute logique financière. Mais sur un plan purement financier, la rente viagère est plus avantageuse que la liquidation de la retraite sous forme de capital, si toutefois on a la chance de vivre jusqu’à l’espérance de vie moyenne observée au Maroc.
Précisons d’abord que le choix entre ces deux options ne s’offre pas lorsqu’il s’agit de percevoir sa retraite à la CNSS ou à la CMR. Seules la CIMR et les compagnies d’assurance commercialisant des produits d’épargne retraite permettent de faire cet arbitrage.
Chez la CIMR, les cotisants qui préfèrent liquider leur retraite sous forme de capital revalorisé représentent le plus gros : près de 85% en 2011. La même situation est constatée chez les compagnies d’assurance. Néanmoins, ce nombre tend à baisser ; les retraités optent de plus en plus pour une rente viagère. Par exemple, les dossiers liquidés en 2006 par option en capital étaient beaucoup plus nombreux à la CIMR : 95,8% du total.
Il y a lieu de préciser qu’un retraité affilié à la CIMR percevra dans tous les cas une rente, quel que soit son choix. En effet, on ne peut percevoir sous forme de capital que la part salariale versée à la caisse tout au long des années d’activité. La part patronale, elle, est servie automatiquement sous forme de rente. C’est pour cette raison qu’on parle de pension annuelle avec ou sans option capital.
Prenons un exemple : avec un salaire mensuel brut en début d’activité de 8 000 DH, un taux de cotisation de 6% et un taux d’évolution annuel du salaire de 4%, un salarié accumulerait près de 430 000 DH au titre de ses cotisations sur une durée d’activité de 35 ans ininterrompue. Dans le cas où il opterait pour la liquidation de ses points sous forme de rente annuelle à vie, il toucherait 144 931 DH, ce qui équivaudrait à un taux de remplacement du salaire de 42,36%. En revanche, s’il opte pour une pension annuelle assortie d’une option capital, il percevrait un capital de 647 340 DH et une rente de 78 419 DH par an, soit la moitié de la rente sans option capital et un taux de remplacement du capital de seulement 21,18%.
A première vue, cette dernière alternative paraît plus intéressante, puisqu’elle permet une rentrée d’argent immédiate et non négligeable que le retraité pourrait faire fructifier à sa guise en lançant un projet ou en la plaçant dans un produit financier. Or, ce n’est pas toujours conseillé. Jawad Tadlaoui, directeur de la communication au sein de la CIMR explique : «Il est préférable pour un retraité moyen de toucher sa retraite sous forme de rente ne serait-ce que pour préserver le niveau de vie auquel il s’est habitué quand il était actif». D’autant plus que l’espérance de vie ne cesse d’augmenter. Effectivement, dans son dernier rapport relatif à l’année 2011, la CIMR a conclu que l’âge moyen au décès s’établit à 75 ans, en progression de deux mois par rapport à une année auparavant. Il était de 73 ans et 5 mois en 2006, «d’où l’intérêt de continuer à percevoir son “salaire”», conclut M. Tadlaoui.
A la CIMR, la rente peut augmenter ou baisser en fonction des décisions du conseil d’administration
D’ailleurs, si l’on s’en tient à notre simulation relative au retraité qui choisit de toucher une pension annuelle avec option capital, le montant du capital est certes attrayant, mais il ne représente que 7 années et demie de son salaire annuel. S’il survit jusqu’à l’âge de 75 ans, il percevra un total de 1,82 MDH (capital de 647 000 DH en plus de 78 400 DH par an pendant 15 ans). Alors que s’il opte pour la rente sans option de capital, son revenu global à l’âge de 75 ans atteindrait 2,17 MDH, soit 20% de plus que la première option.
Cela dit, si la pension annuelle sans option de capital est dans notre exemple de 144 931 DH, cela ne veut pas dire que le retraité continuera à percevoir ce montant tout au long de sa vie. Il peut en effet voir sa rente augmenter ou baisser en fonction de certains paramètres. En effet, la rente est calculée sur la base du nombre de points accumulés multiplié par la valeur du point. Ce dernier paramètre, lui, dépend du salaire de référence qui augmente en fonction du salaire moyen des affiliés à la caisse, et ce, durant les années d’activité du salarié. Après le départ en retraite, un autre type de valeur de points est utilisé. Il s’agit de la valeur du point de service qui permet de transformer chaque année les points accumulés en prestation. «Ce paramètre ne progresse pas en fonction du salaire de référence, mais plutôt de la décision du conseil d’administration de la caisse d’augmenter ou non la valeur du point, en tenant compte, d’une part, de l’équilibre du régime, et, d’autre part, du taux d’inflation», explique M. Tadlaoui. Et d’ajouter : «La valeur du point s’est améliorée de 1% aussi bien en 2011 qu’en 2012 et sera augmentée en 2013 de 1,25%. Notons au passage que la décision du conseil de relever ou non la valeur du point se tient au début du mois de juillet de chaque année».
Par ailleurs, plus le taux de cotisation à la CIMR est élevé, plus le taux de remplacement du salaire est intéressant. Ainsi, en prenant les mêmes hypothèses, mais avec un taux de cotisation de 10%, le retraité toucherait une pension annuelle sans option de capital de 232 062 DH et verrait son salaire remplacé à hauteur de 71,25%. Et même si son salaire n’évolue pas durant toute sa durée d’activité, il percevrait une rente viagère annuelle de 135 419 DH.
En vue de maintenir un niveau de vie comparable à celui de la période d’activité, nombre de personnes souscrivent à des produits d’épargne retraite qui présentent l’avantage d’être défiscalisés au moment de la sortie. En plus de la possibilité de récupérer ses cotisations sous forme de capital majoré d’un taux de rendement équivalent au taux garanti en vigueur augmenté d’une participation aux bénéfices annuels sur les placements, le retraité peut opter pour une rente viagère ou certaine sur un certain nombre d’années (de 5 jusqu’à 25 ans selon les compagnies d’assurance). Une autre possibilité s’offre au retraité, celle de mixer les différentes options et percevoir une partie en capital et l’autre en rente.
En tout cas, avec une cotisation mensuelle de 350 DH sur une durée de 35 ans et un taux de rendement moyen annuel de 4%, RMA Watanya, par exemple, offre un capital revalorisé à l’âge de 60 ans de 317 383 DH. Au cas où le retraité opte pour une rente viagère, il percevrait 4 808 DH trimestriellement, soit 19 232 DH par an. Par contre, s’il choisit de recevoir des rentes certaines, elles correspondraient à 67 765 DH par an sur cinq ans, 26 281 DH sur 15 ans et 18 192 DH sur 25 ans. Même chose du côté d’Atlanta qui, avec les mêmes conditions, propose l’option capital à 316 001 DH, la rente viagère annuelle à 21 290 DH ou la rente certaine sur 15 ans, par exemple, de 27 594 DH.
Dans ces conditions, quelle option faut-il choisir ? Un cadre dans une compagnie d’assurance de la place assure que «la perception d’une rente à vie est la meilleure solution qui s’offre à un retraité vu son caractère pérenne. De plus, une possibilité de réversibilité peut être prévue au profit du conjoint». Néanmoins, avec une table de mortalité faisant état d’une espérance de vie de 75 ans, la rente viagère donne droit à une pension totale à 75 ans de 288 480 DH auprès de la RMA contre une rente certaine globale sur 15 ans de 394 210,5 DH, soit un différentiel de 105 730 DH. En réalité, plus la durée de perception de la rente certaine est longue, plus intéressant sera le montant au final si l’on compare avec la rente viagère calculée sur la même durée. «Cette alternative demeure certes intéressante, mais présente toutefois un risque d’un allongement de la durée de vie au-delà de la durée prévue pour la rente certaine. Du coup, le retraité perdrait son niveau de vie vu l’interruption brutale de la prestation», tient à souligner notre source. «De plus, en cas de décès pendant la période des versements, le conjoint ne peut bénéficier de la réversion que sous forme de capital dans la majorité des compagnies de la place», conclut-il.
