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Le redressement de la consommation de ciment ne rassure pas les analystes
Pour eux, l’augmentation actuelle des ventes est due à des facteurs conjoncturels. La vraie reprise est attendue en 2018. Les trois cimenteries cotées sont à conserver ou à renforcer dans les portefeuilles.
Le dernier trimestre de 2015 a marqué une rupture avec le trend baissier qui a caractérisé le marché du ciment depuis 2012 (après une année 2011 ayant connu une hausse de la consommation de 10,7%). En effet, les ventes ont enregistré une hausse de 9,9% au quatrième trimestre, ce qui a permis de boucler l’année sur une progression de 1,4% par rapport à 2014. Et la tendance se poursuit avec un premier trimestre qui a marqué une hausse de 5,9%, à 3,7 millions de tonnes. La faible pluviométrie qu’a connue le pays pendant cette période et le développement de l’auto-construction qui représente la moitié de la consommation de ciment expliquent cette reprise. Une reprise à laquelle les analystes ne s’attendaient pas puisqu’ils tablaient sur une poursuite du ralentissement des mises en chantier de logements et du rythme des investissements publics en infrastructures compte tenu de la volonté de l’Etat de maîtriser ses dépenses. Et malgré les bons chiffres de fin 2015 et début 2016, ils demeurent sceptiques quant à l’évolution de la demande sur les prochains mois, voire les prochaines années. Ceux de CFG estiment que la croissance que connaît le secteur est ponctuelle mais qu’elle pourrait se maintenir sur l’ensemble de l’année grâce à la tenue des élections législatives en septembre 2016. Les ventes devraient ainsi enregistrer une croissance légèrement supérieure à celle de 2015 (+2% en 2016 contre +1,4% en 2015). Toutefois, les analystes ont revu leurs estimations à la baisse pour 2017. La consommation devrait augmenter de 2% (au lieu des 4% estimés précédemment). Selon leurs prévisions, le rebond de la consommation ne se fera pas avant 2018.
Concernant l’évolution du prix du ciment, les analystes prévoient une relative stabilité en 2016 et 2017 du fait de la baisse du prix du coke de pétrole, principal poste de coût dans l’industrie, qui devrait se déprécier de 5% en 2016. Mais également suite à la persistance d’un important surplus de production sur le marché marocain qui a atteint 6 millions de tonnes à fin 2015 ; l’équivalent de 42% de la consommation nationale. Cette situation de surproduction rendrait risquée toute augmentation des prix par l’un des opérateurs, surtout qu’ils disposent d’une marge de manœuvre en lien avec la baisse prévue du coke de pétrole qui devrait alléger la pression sur les marges et qui pourrait les pousser à prioriser les gains de parts de marché.
En somme, le contexte du marché du ciment demeure peu favorable, marqué par une activité BTP en ralentissement mais aussi des délais moyens de paiement qui continuent de s’allonger, une insolvabilité accrue des grands promoteurs immobiliers et une persistance des surcapacités de production. Toutefois, les opérateurs cotés en bourse arrivent à tirer leur épingle du jeu en réalisant des hausses annuelles de leurs cours à deux chiffres. En 2014 et 2015, l’indice sectoriel a augmenté respectivement de 24% et 11%. Un enthousiasme des investisseurs justifié par l’annonce de la fusion de Lafarge-Holcim au niveau mondial ainsi que par la baisse des prix du coke de pétrole, et ce, malgré la baisse de la consommation nationale en 2014 (-5,4%). La tendance haussière des cours se poursuit en 2016 (+22% au 13 mai) alimentée par des résultats annuels appréciables des cimentiers cotés.
Les analystes d’Upline Securities ont établi leurs prévisions des résultats des trois cimentiers. Ainsi, Ciment du Maroc devrait boucler l’année en cours sur un chiffre d’affaires de 3,8 milliards DH (+2,3%), un excédent brut d’exploitation de 176 milliards (+4,2%) et un résultat net part de groupe en quasi-stagnation à 1,06 milliard de DH (+0,3%). La société de bourse a abouti à un cours cible de 1 310 DH ; soit une décote de 0,7% par rapport au cours de la valeur du 16 mai. Sur cette base, les analystes recommandent de renforcer le titre dans les portefeuilles.
Pour sa part, Holcim devrait clôturer l’exercice 2016 sur des ventes chiffrées à 3,3 milliards de DH (+2,3%), un résultat d’exploitation de 903,6 MDH (+1,8%) et un RNPG de 524 millions (+2,8%). Le cours cible de la société est fixé à 2 084 DH (contre 2 225 DH à la séance du 16 mai), soit une surcote de 6,7%. Les analystes recommandent de conserver le titre dans les portefeuilles.
Enfin, Lafarge Ciments devrait finir l’année sur un chiffre d’affaires de 5,22 milliards de DH (+0,8%), un résultat d’exploitation en quasi-stagnation à 2,2 milliards et un RNPG de 1,4 milliard de DH de DH (+0,4%). Le cours cible calculé par les analystes est de 1 764 DH, en décote de 7,9% par rapport à la séance du 16 mai. Les analystes recommandent de conserver la valeur.