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Le marché de la dette privée s’enfonce dans la morosité
Les émissions des titres de créances négociables ont chuté de 33,2% à fin mars pour atteindre 11,8 milliards de DH. Les banques et les entreprises ont réduit leurs recours suite à l’amélioration de la conjoncture économique et du déficit de liquidité.

Le marché des titres de créances négociables continue de perdre de son attrait en dépit de la baisse tendancielle des taux des bons du Trésor sur lesquels sont indexés les taux des émissions.
L’engouement attendu des sociétés émettrices ne s’est pas fait sentir et le marché continue d’être animé par une poignée d’intervenants habituels. A fin mars de cette année, les émissions ont reculé de 33,2% par rapport au même trimestre une année auparavant, pour totaliser 11,8 milliards de DH, selon les données de Bank Al-Maghrib.
Ce repli a touché surtout les segments des certificats de dépôts et des billets de trésorerie. En effet, les émissions du premier se sont établies à 8,8 milliards de DH, en retrait de 38%. Il faut dire que les banques ne ressentent plus un grand besoin de recourir au marché de la dette privée car leur déficit de liquidité est en amélioration régulière.
D’ailleurs, les deux dernières baisses du taux directeur par Bank Al-Maghrib de 50 points de base, à 2,5%, ont permis à leur trésorerie de se détendre puisque le coût de leurs ressources a été allégé. D’autant que le financement à travers le marché interbancaire s’avère être plus intéressant, car les taux tournent autour du taux directeur alors qu’ils se situent sur le marché des TCN entre 2,52% et 3,48%. En tout cas, le gros des levées est réalisé sur une maturité allant de 93 jours à 1 an, pour des taux variant de 2,6% à 3,5%. De plus, BMCE, BMCI et CAM ont accaparé 74% des émissions totales, sachant que la Société Générale a marqué son absence de ce marché alors qu’elle avait levé une année auparavant 4,4 milliards de DH. Même la BCP qui était l’un des acteurs habituels ne fait plus appel à ce moyen de financement, et ce, depuis 2014.
Le second segment (billets de trésorerie), lui, ne se porte guère mieux. Avec des émissions de 2,5 milliards de DH, elles ont accusé un recul de 17,5% sur une année. Le marché n’a pas accueilli de nouveaux acteurs à part Dyar Al Mansour dont l’émission ne porte que sur un faible montant de 20 MDH. Les émetteurs historiques, eux, boudent toujours le marché. En cause, un financement bancaire plus accessible, à des conditions moins contraignantes qu’auparavant, et des taux avantageux.
L’amélioration de la situation économique globale y est également pour beaucoup aussi, car les délais de paiement des clients semblent réduits et donc les remboursements plus rapides. Ce qui diminue le besoin en fonds de roulement des sociétés et de facto leur trésorerie nette. Quoi qu’il en soit, exception faite de Maghreb Steel qui continue de dynamiser le marché avec des levées de 17,8 milliards de DH, en hausse de 61,3%, les autres levées sont assez maigres, variant de 20 MDH pour Mutandis, 57 MDH pour Addoha à 484,5 MDH pour Alliances Darna. Par ailleurs, 83,3% des levées ont été effectuées sur la très courte maturité ne dépassant pas 32 jours, à des taux oscillant dans une fourchette de 4,3% à 4,6%, soit 1,3 et 1,9 point de moins par rapport aux taux proposés une année auparavant.
Peu d’opérations sur les BSF
De leurs côtés, les titres émis par les sociétés de financement ont fait un léger mieux avec des levées de 553 MDH contre 520 MDH l’année dernière à la même période, soit une hausse de 6,3%. Le segment des bons de société de financement (BSF) a été marqué par un retour, bien que timide, des sociétés de crédit. A côté d’Eqdom, Sofac, Wafabail et Maghrebail ont eu recours à ce segment avec des émissions respectives de 71 MDH, 280 MDH et 22 MDH. En même temps, il faut noter que Wafasalaf et RCI Finance, qui ont levé conjointement 440 MDH à fin mars 2014, ont déserté le marché au début de cette année. Il faut dire que la demande sur ce moyen de financement peine à redécoller bien qu’elle montre les premiers signes de reprise. Cela dit, dans un contexte de montée du coût du risque des clients et de tassement du secteur du crédit à la consommation, les sociétés de financement n’éprouvent pas grand besoin de recourir au marché de la dette privée.
Néanmoins, les analystes prévoient un retour massif des sociétés aux BSF, dès que le secteur du crédit commencera à reprendre, surtout que le niveau des taux des émissions est des plus intéressants. Alors qu’ils pointaient à 4,72% au 1er trimestre de l’année dernière, ils se situent actuellement entre 3,37% et 3,72%, soit un différentiel variant de 1 à 1,35 point.
Cela dit, les segments des certificats de dépôts et des billets de trésorerie, eux, ne devraient pas enregistrer un fort rush de la part des émetteurs. Leurs levées devraient accompagner un besoin de financement immédiat et devrait continuer à se réaliser sur une courte période.
