Epargne
Dans l’univers haut de gamme des banques
Un banquier privé doit être en mesure de prodiguer les conseils nécessaires à son client. Le ticket d’entrée unanimement admis par les banques commence à 2 MDH. Des produits de placement sur mesure sont proposés aux clients, en fonction de leur profil. La réglementation devrait évoluer pour permettre un développement du secteur.

Les banques de la place disposent toutes de structures dédiées à la banque privée, où le principe de base tourne autour d’une gestion personnalisée et d’une prise en charge globale d’une clientèle dite fortunée, allant du conseil à la gestion du patrimoine, en passant par le diagnostic et l’analyse de la situation patrimoniale. Celle-ci, disposant d’avoirs financiers importants qu’elle désire investir, placer et fructifier, recourt aux services du private banking en vue d’avoir des solutions optimales. Le développement de cette ligne de métier s’est fait conjointement avec la croissance des clients haut de gamme, avec l’augmentation de la demande sur la gestion dite «sur mesure» et avec l’amélioration de la valeur ajoutée apportée aux clients. C’est pour cette raison d’ailleurs que certains private bankers préfèrent utiliser le terme «offre de valeurs» plutôt que «offre de produits et services», comme c’est le cas de Mounya Dinar, directeur du pôle banque privée à la Banque Populaire. Ainsi, un banquier privé doit être en mesure de prodiguer les conseils nécessaires à son client, que ce soit en matière de gestion de trésorerie sur le court terme, d’épargne et de placement sur le court, moyen et long terme, de fiscalité, d’assurance, de transmission de patrimoine, de crédits… Tout cela, en fonction de ses besoins, de son profil, de ses attentes, du rendement qu’il souhaite obtenir et des risques qu’il est prêt à supporter et surtout en fonction de la conjoncture. Cela se matérialise d’emblée dès l’accueil du client High net à l’agence. En effet, le personnel est disponible, les relations sont personnalisées et les conseils adressés en fonction de la typologie du client, parce qu’au final, c’est une relation de confiance qui est tissée.
Un ensemble de prestations est ensuite proposé aux clients, mettant l’accent sur l’efficacité, l’expertise, le contact personnalisé ainsi que la qualité du service. C’est normal quand on sait que ces clients confient leurs avoirs personnels à ces gestionnaires, surtout qu’ils valent au moins 2 MDH, unanimement admis par les banques (sans concertation) comme ticket d’entrée pour accéder aux services de la banque privée. Sauf qu’une segmentation de l’activité du private banking existe. Il s’agit d’une gestion de patrimoine, si les avoirs du client sont compris entre 2 et 10 MDH, de gestion de fortune quand ils varient entre 10 et 30 MDH et de Family Office pour les clients de plus 30 ou de 35 MDH. Toutefois, «ce seuil n’est pas figé puisque nous tenons également compte de la situation globale du client et de son potentiel patrimonial», explique Salima Benhima, directrice de Société Générale Maroc banque privée.
Autrement dit, même un client qui ne dispose pas encore de ce ticket d’entrée peut être intégré parmi les clients de la banque privée. Il est considéré par les private bankers comme une manne exploitable dont les avoirs peuvent être fructifiés et développés. En outre, la moyenne d’âge, elle se situe en moyenne autour de 55 ans. Toutefois, les banques privées recrutent de plus en plus une clientèle jeune et de plus en plus de femmes indépendantes, fortunées, qui souhaitent gérer par elles-mêmes leur patrimoine.
Le secteur devrait afficher une croissance continue et régulière
En tout cas, en mettant en place une gamme de produits et services dédiés, la banque privée privilégie les services de diagnostic et conseil patrimonial, d’ingénierie financière, de gestion d’actifs, dans un cadre propice à un accueil hautement personnalisé, en toute discrétion et confidentialité, car il faut savoir que le private banker adopte une démarche déclinée en plusieurs étapes avant de proposer une stratégie d’investissement pour son client (voir encadré). Quoi qu’il en soit, les produits proposés peuvent aller des produits bancaires classiques, à savoir les dépôts à terme aux produits plus structurés en passant par l’assurance vie, les OPCVM, les actions, les obligations, les bons de trésor… et comme il s’agit essentiellement de conseil personnalisé, des produits sur mesure sont réalisés afin de répondre aux besoins de tel ou tel client et il y a autant de situations différentes que de produits adaptés divers. On peut citer, à titre d’exemple, le lancement de certificats de dépôts à taux révisable, ou encore des fonds permettant une exposition sur les marchés internationaux comme les actions, les devises, les matières premières. D’ailleurs, la société de gestion du groupe BCP est pionnière en matière de fonds indexés sur les matières premières puisqu’elle avait mis sur le marché, un FCP indexé conjointement sur l’or et le pétrole. Attijariwafa bank lui a emboîté le pas avec son fonds Attijari Gold, indexé sur l’or.
En tout cas, à en croire les private bankers contactés, le secteur se porte bien et continue de se développer tant au niveau des produits et services offerts qu’au niveau du nombre de clients fortunés. D’ailleurs, le nombre de millionnaires en dollars au Maroc tourne autour de 5000 et devrait atteindre 7100 à l’horizon 2020, selon le New World Wealth. Ainsi, l’enrichissement des individus, le développement des affaires à l’international, à côté d’autres dispositifs réglementaires comme la lutte contre l’évasion fiscale, ne peuvent que contribuer à l’amélioration du secteur. Du coup, l’approche de la relation bancaire deviendrait plus moderne, privilégiant la proximité relationnelle et la proactivité et les produits d’investissement seraient amenés à devenir plus complexes, plus risqués et à plus forte valeur ajoutée.
Par ailleurs, la mise en place de la contribution libératoire en février 2014 a permis aux banques d’avoir une manne de ressources non négligeables et des clients aussi importants qu’exigeants, en terme de produits de placements proposés, de compétences techniques, d’expertise… A côté, la diversification des produits de placements avec la mise en place prochaine des OPCI (organisme de placement collectif immobilier) et des produits de placements islamiques contribueraient de manière significative à non seulement développer l’offre de produits des banques privées mais également à attirer nombre de clients souhaitant avoir un accès liquide et transparent au marché immobilier, ou encore ayant des exigences en matière de placements dans des produits ou valeurs prohibés. Soulignons que certaines banques ont déjà lancé des fonds de placement dédiés à ce type de clientèle, qui ne comprennent pas les supports d’investissement ou les valeurs n’intégrant pas les valeurs de la religion.
Cependant, il faudra accompagner ce développement des avoirs, de la clientèle et des produits, en mettant en place des produits adaptés à l’évolution du contexte. Il faut dire aussi que la structuration et l’ingénierie patrimoniale n’ont pas de limites, mais reste tributaire de l’ordre du possible, surtout en ce qui concerne l’investissement à l’étranger. En effet, «le marché des changes est limité dans la mesure où il ne permet d’investir que 10% des liquidités à l’international». Le volet réglementaire devrait donc se dynamiser, ne serait-ce que pour adresser la clientèle qui a participé à l’opération d’amnistie fiscale. D’autant qu’il est tout autant important de faire évoluer les textes législatifs en vue d’élargir les zones d’investissement. Allusion faite aux pays africains qui sont sur une lancée spectaculaire et dont les marchés financiers offrent des rendements à 2 chiffres. Enfin, un point tout aussi important est à soulever. Il s’agit de la mise à niveau des ressources humaines, des compétences techniques et des systèmes d’information, qui seraient à même de dynamiser l’offre de produits sur le marché et à tirer le secteur vers le haut.
