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Bourse : les opérateurs retiennent leur souffle
Les taux obligataires bas et l’amélioration des liquidités plaident pour une reprise du trend haussier. Les premiers résultats annuels ont été accueillis d’une façon disparate. Les prévisions de croissance des bénéfices revues à la baisse mais restent favorables.
Le marché actions a rompu depuis la mi-janvier avec sa tendance haussière entamée plus de six mois plus tôt. Il a enchaîné les contre-performances ces dernières semaines pour effacer quasiment tous ses gains de début janvier (ils avaient atteint 10% le 10 janvier). A la clôture de la séance du 7 mars, le Masi affichait une variation depuis le début de l’année de 2,6% alors qu’il avait atteint une performance de 10,6% le 10 janvier, correspondant à son plus haut niveau (12 886 points) depuis février 2011.
Cette baisse a eu lieu dans un marché dynamique. Sur le mois de février, le volume des transactions sur le marché central s’est établi à 2,8 milliards de DH (+73% par rapport à la même période de l’année dernière). Toutefois, les échanges ressortent en baisse par rapport au mois de janvier qui a drainé 7,21 milliards de dirhams, soit une dégradation de 61,02%. Cette baisse intègre toutefois les ajustements stratégiques des portefeuilles par les institutionnels et les OPCVM, effectués traditionnellement en début d’année.
Pour expliquer la correction que connaît le marché actuellement, il faut revenir sur les éléments qui ont alimenté sa hausse durant ces derniers mois. Selon un gestionnaire de fonds, la baisse du Masi pousse à réfléchir quant à la qualité de cette hausse de fin 2016 / début 2017. «La hausse qu’a connue le marché s’explique principalement par un afflux important de cash et non par l’amélioration des fondamentaux du marché. Il y a eu énormément de liquidités injectées sur le marché en très peu de temps, surtout durant les mois de décembre et de janvier», affirme t-il. Pour d’autres professionnels, il n’y a pas que ce facteur. «Certes, les conditions de liquidité au Maroc se sont nettement améliorées, ce qui a surtout profité au marché actions dans un contexte de baisse des rendements sur le marché obligataires. Mais on peut également noter un retour massif des investisseurs sur le marché actions, notamment les personnes physiques qui ont repris confiance et dont l’aversion au risque a sensiblement baissé. Aussi, le marché a profité des bonnes perspectives de résultats et de dividendes des sociétés cotées en 2016, alimentées par un premier semestre satisfaisant et dépassant les attentes», précise un analyste.
Les résultats de certaines sociétés ont déçu…
Ceci dit, s’il était prématuré jusqu’ici d’assimiler la hausse des cours à une vraie reprise, le marché avait néanmoins de bonnes bases pour poursuivre sa progression, selon les opérateurs. En effet, les facteurs ayant favorisé la hausse du marché sont toujours présents. Selon les prévisions des professionnels, la courbe des taux sur le marché obligataire devrait rester stable cette année et le niveau des liquidités demeure toujours confortable. Toutefois, les premières annonces de résultats des sociétés cotées n’ont pas toutes été bien accueillies par le marché. Par exemple, Wafa Assurance a annoncé un dividende inférieur aux attentes des analystes alors que ses résultats son en progression. Ainsi, au lendemain de la publication des résultats de la compagnie, son cours a perdu 4,7% en une séance (21 février). Pour sa part, le groupe bancaire BCP, malgré des indicateurs financiers en hausse (PNB en hausse de 2% et RNPG en progression de 5,3%), la valeur a quand même «déçu» les opérateurs qui s’attendaient à une performance plus importante. Du 21 février au 7 mars, la valeur a perdu 9,7%. Toutefois, notons que «le cours de la BCP est historiquement peu volatil. Le titre a exceptionnellement franchi la barre des 300 DH en janvier, son plus haut historique depuis son introduction, la correction du cours était normale», explique un trader. Pour sa part, Ciment du Maroc a lâché depuis début février 10% de sa valeur. Le cimentier a affiché des résultats annuels en berne, en passant d’un résultat net de 1,09 milliard de DH à fin 2015 à un déficit de 115 MDH un exercice plus tard. Un recul justifié par la forte dévaluation de la livre égyptienne (-55%), qui a impacté les résultats du groupe dont la participation dans l’égyptienne Suez Cement company s’élève à 11,7%.
Plus de visibilité après fin mars
Selon un trader, «les contrôles fiscaux subis par certaines sociétés cotées ont également perturbé le marché». Il s’agit de BMCE Bank qui devrait payer au fisc la somme de 900 MDH, l’équivalent de 50% de ses bénéfices enregistrés en 2015. Le titre a ainsi perdu 10,3% de sa valeur depuis le début de l’année et 7% sur le seul mois de février. Pour leur part, Saham Assurances, Lydec et Stokvis Nord Afrique ont également renfloué les caisses du fisc de 130, 120 MDH et 19 MDH. Des charges fiscales exceptionnelles qui devraient peser lourd sur les résultats annuels de ces sociétés qui ont émis des profits warnings dans ce sens.
Mais si certains pointent du doigt les résultats annuels affichés jusqu’ici, d’autres voient en la baisse du marché une simple prise de bénéfice. «Jusqu’ici, les résultats sont globalement satisfaisants. La capacité bénéficiaire est pour le moment en hausse d’environ 3%». Le marché a, selon eux, accueilli certains résultats avec engouement. Notamment Maroc Telecom qui a contribué au redressement de l’indice vers la fin du mois de février. L’opérateur a fait mieux que ses prévisions en termes de résultats et compte distribuer 5,6 milliards de DH à ses actionnaires, soit l’ensemble de son résultat net. «Globalement, les résultats sont dans les normes, en hausse par rapport à l’année dernière mais pas exceptionnels au point de justifier une nouvelle hausse», relativise un trader.
En tout cas, une chose est sûre, c’est que durant cette période de publication des résultats, le marché a pour habitude de retenir son haleine et l’annonce progressive des réalisations devrait déterminer la trajectoire que devrait prendre le MASI cette année, du moins sur les prochains mois. Si certains bureaux d’analyse des sociétés de bourse maintiennent leurs prévisions des résultats annuels à fin 2016, d’autres plus sceptiques ont réajusté leurs prévisions à la baisse. Après des prévisions de hausse atteignant les 15%, la croissance bénéficiaire à fin 2016 devrait désormais s’établir, selon les nouvelles prévisions recueillies, entre 8% et 10%.
[tabs][tab title = »Le secteur de la chimie signe la meilleure performance depuis le début de l’année »]Depuis le début de l’année, c’est le secteur de la chimie qui enregistre la meilleure performance du marché (114,78%). Une hausse portée principalement par Snep (132,4%). Loin derrière, le secteur de la sylviculture et papier, représenté par sa seule valeur Med Paper, vient en 2e position avec une performance de 29,5%. Les immobilières arrivent juste après avec une hausse de 14,6%, grâce à Alliances (+89,3%) et Addoha (+12,82%). Aussi, les minières ont amélioré leur indice sectoriel de 11,41%, grâce à Managem et CMT dont les cours ont respectivement crû de 16,75% et 13,33%. En face, trois secteurs ont réalisé des contre-performances depuis le début de l’année. Il s’agit d’abord des bancaires qui ont accusé la plus forte baisse (-1,93%). En effet, l’indice a été sanctionné par la dépréciation du cours de BMCE Bank qui a lâché 10,36%. Ensuite, le transport (-0,76%) a été pénalisé par une chute du titre Timar de 36,1% depuis le début de l’année. Enfin, l’indice sectoriel de l’ingénierie et des biens d’équipement industriels (-0,39%) a été principalement affecté par Stroc Industrie qui a perdu 1,38% de sa valeur.[/tab][/tabs]
[tabs][tab title = »Sur 12 sociétés, 5 proposent un dividende plus généreux qu’en 2015« ]A l’occasion des publications annuelles relatives à l’exercice 2016, 12 sociétés cotées avaient annoncé leurs résultats à l’heure où nous mettions sous presse, dont huit ont amélioré leurs indicateurs financiers. Il s’agit d’Attijariwafa bank dont le RNPG a crû de 5,2%, de la BCP (+5,3%), de Crédit du Maroc ( +277,2%), d’Afriquia Gaz (+13,8%), de Maghreb Oxygène (+63,3%), de Maroc Télécom (+0,1%), de Salafin (+10,6%) et de Wafa Assurance (+5,2%). A contrario, CIH Bank a accusé une baisse de 16,4% de ses bénéfices consolidés, Lydec a fait -42,3%, Ciments du Maroc -110,5% et enfin Balima -13,9%. S’agissant de la rémunération des actionnaires, cinq sociétés ont proposé un dividende supérieur à l’année précédente. Attijariwafa bank devra distribuer un dividende de 12 DH (contre 11 DH en 2015), BCP versera 6 DH par action (contre 5,75 DH), Ciments du Maroc, et malgré son déficit, va rémunérer ses actionnaires à hauteur de 65 DH, soit 10 DH de plus que l’année dernière, et Crédit du Maroc proposera 10 DH (contre 8 DH en 2015). Quatre valeurs vont proposer le même dividende que l’année dernière, il s’agit de Maroc Télécom (6,36 DH), Afriquia Gaz (105 DH), CIH Bank (14 DH), et Maghreb Oxygene (4 DH). Pour leur part, Lydec et Wafa Assurance comptent distribuer un dividende inférieur à l’année dernière. La rémunération fixée par la première est de 22,5 DH (contre 24,5 DH), et la seconde 120 DH (contre un dividende ordinaire de 114 DH et un autre exceptionnel de 46 DH en 2015).[/tab][/tabs]