Banques
Bank Al-Maghrib maintient inchangé son taux directeur à 2.25%
Le Conseil de Bank Al-Maghrib (BAM), réuni mardi à Rabat, a décidé de maintenir le taux directeur inchangé à 2,25%.

Le Conseil de Bank Al-Maghrib a tenu le mardi 24 juin sa deuxième réunion trimestrielle de l’année 2025.
Lors de cette session, il a d’abord examiné et approuvé le rapport annuel sur la situation économique, monétaire et financière du pays ainsi que sur les activités de la Banque au titre de l’exercice 2024.
Il a également passé en revue le déroulement du déploiement du nouveau programme de soutien au financement bancaire de la TPE lancé en mars dernier et le projet de la charte dédiée à cette catégorie d’entreprises. Ce dernier prévoit notamment la mise en place d’une offre de crédit adaptée, la simplification des procédures, l’optimisation des systèmes de garantie, l’accompagnement non financier et des dispositifs de suivi de la mise en œuvre.
Le Conseil a par la suite analysé l’évolution de la conjoncture économique nationale et internationale et examiné les projections macroéconomiques à moyen terme de Bank Al-Maghrib. Sur le plan international, le Conseil a noté le niveau exceptionnel d’incertitude, induit notamment par la nouvelle politique commerciale des Etats-Unis, les conflits en Ukraine et au Moyen-Orient ainsi que la guerre Israël-Iran. Dans ce contexte, la croissance de l’économie mondiale devrait continuer son ralentissement ce qui favoriserait la poursuite de la tendance baissière de l’inflation.
Au niveau national, les dernières données disponibles font ressortir une nette accélération du rythme de l’activité dans les secteurs non agricoles. Cette dynamique devrait se poursuivre à moyen terme, à la faveur notamment de l’investissement dans les infrastructures, dans le cadre des efforts consentis par notre pays pour l’atténuation de l’impact du changement climatique et pour la préparation de l’accueil d’événements internationaux d’envergure à l’horizon 2030. Cette amélioration notable de la croissance non agricole devrait soutenir la reprise tangible de l’emploi observée au cours des derniers trimestres.
S’agissant de l’inflation, elle a marqué un très net ralentissement au cours des derniers mois, passant de 2% en moyenne au premier trimestre de cette année à 0,7% en avril puis à 0,4% en mai. Cette évolution reflète principalement la décélération de la hausse des prix des produits alimentaires, en particulier ceux des « viandes fraîches ». Selon les projections de Bank Al-Maghrib, l’inflation terminerait l’année 2025 sur une moyenne autour de 1% avant de s’établir à 1,8% en 2026 et sa composante sous-jacente devrait connaitre une évolution similaire. Ces perspectives restent entourées de fortes incertitudes liées notamment, au plan externe, aux politiques commerciales et aux implications des conflits et des tensions géopolitiques, et au niveau interne, à l’évolution de l’offre des produits agricoles.
Le Conseil a, par ailleurs, noté que les anticipations d’inflation demeurent ancrées, les experts du secteur financier tablant, au deuxième trimestre 2025, sur des taux de 2,3% en moyenne à l’horizon de 8 trimestres et de 2,5% à 12 trimestres.
Sur le volet de la transmission des précédentes décisions, la baisse des taux débiteurs assortissant les crédits bancaires au secteur non financier se poursuit. Les données relatives au premier trimestre 2025 montrent un recul cumulé de 45 points de base (pb) depuis le début de l’assouplissement monétaire en juin 2024.
Tenant compte de l’évolution de l’inflation à des niveaux en ligne avec l’objectif de stabilité des prix à moyen terme, de la nette accélération de la croissance non agricole et de l’ancrage des anticipations, le Conseil a décidé, au regard des fortes incertitudes qui entourent les perspectives, de maintenir le taux directeur inchangé à 2,25%. Il continuera de suivre de près la transmission de ses baisses récentes de ce taux, notamment vers les conditions de financement des TPME, et de fonder ses décisions futures réunion par réunion sur la base des données les plus actualisées.
Sur les marchés internationaux des matières premières, les prévisions basées sur les données disponibles à fin mai tablent sur la poursuite de la tendance baissière des cours du pétrole, favorisée par le renforcement de la production de l’OPEP+ et l’augmentation des stocks américains. Le prix du Brent en particulier devrait revenir de 79,8 dollars le baril en moyenne en 2024 à 66,8 dollars en 2025 puis à 64,8 dollars en 2026. Pour le phosphate brut d’origine marocaine, les prix diminueraient, selon les projections de la Commodities Research Unit, de 214 dollars la tonne en 2024 à 206 dollars en 2025 puis à 183 dollars en 2026, alors que ceux de ses dérivés s’orienteraient à la hausse en 2025, en lien avec le repli de l’offre mondiale. Le cours du DAP ressortirait ainsi à 689 dollars la tonne en 2025 avant de reculer à 678 dollars en 2026, et celui du TSP s’établirait à 540 dollars puis à 535 dollars. Pour ce qui est des produits alimentaires, après une baisse de 2% en 2024, l’indice FAO connaitrait des progressions de 4,4% en 2025 et de 1% en 2026.
S’agissant des perspectives de l’économie mondiale, la croissance ralentirait de 3,2% en 2024 à 2,8% cette année puis à 2,6% en 2026. Dans les économies avancées, elle décélérerait aux Etats-Unis à 1,5% en 2025 avant d’afficher une légère amélioration à 1,7% en 2026, et se limiterait dans la zone euro à 1% puis à 1,5% respectivement. Au niveau des principaux pays émergents, la hausse marquée des exportations de la Chine en anticipation de la dégradation des conditions tarifaires devrait soutenir la croissance en 2025, celle-ci devant s’établir à 4,9% avant de ralentir à 3,9% en 2026, tandis qu’en Inde, l’économie demeurerait vigoureuse, avec une progression du PIB en volume de 7,4% puis de 6,2% respectivement.
Dans ces conditions, l’inflation continuerait sa décélération au niveau mondial en 2025, revenant à 3% au lieu de 3,7% une année auparavant, puis s’accroitrait légèrement à 3,2% en 2026. Dans les principales économies avancées, elle ralentirait à 2,2% en 2025 et en 2026 dans la zone euro, tandis qu’aux Etats-Unis, elle reculerait à 2,8% en 2025 avant de s’accélérer à 3,3% en 2026, en lien essentiellement avec les nouvelles mesures tarifaires de l’administration américaine.
Concernant l’orientation des politiques monétaires, la BCE a décidé, à l’issue de sa réunion du 5 juin, d’abaisser ses trois taux de 25 pb pour la septième fois d’affilée et la huitième depuis juin 2024. De son côté, lors de sa réunion des 17 et 18 juin, la FED a maintenu, pour la quatrième fois consécutive, la fourchette cible du taux des fonds fédéraux inchangée à [4,25%-4,50%].
Au niveau national, la croissance économique a atteint, selon les données des comptes nationaux annuels publiés par le HCP, 3,8% en 2024, un rythme bien plus rapide que ce que laissaient présager les données trimestrielles relatives à la même année. Selon les projections actualisées de Bank AlMaghrib, elle devrait connaitre une nette accélération cette année pour s’établir à 4,6%, puis se consoliderait à 4,4% en 2026. La valeur ajoutée agricole augmenterait de 5% en 2025, tenant compte d’une récolte céréalière estimée par le Département de l’Agriculture à 44 millions de quintaux (MQx), puis de 3,2% en 2026, sous l’hypothèse d’une production céréalière moyenne de 50 MQx. Pour les secteurs non agricoles, à la faveur principalement d’une forte dynamique de l’investissement dans les infrastructures, leur croissance avoisinerait 4,5% en 2025 et en 2026.
S’agissant des comptes extérieurs, les échanges devraient se renforcer à moyen terme, l’impact direct des mesures tarifaires américaines devant rester limité. Ainsi, les exportations s’accroîtraient de 5,1% en 2025 et de 9% en 2026, tirées notamment par une expansion de celles de phosphate et dérivés qui atteindraient 106,7 milliards de dirhams en 2026. En revanche, au regard de la situation défavorable sur le marché européen, les ventes de l’industrie automobile connaitraient une quasistagnation en 2025, avant d’afficher une nette reprise en 2026, pour s’établir à 188 milliards de dirhams. En parallèle, les importations augmenteraient de 5,1% cette année et de 7% la suivante, portées en particulier par une progression des acquisitions de biens d’équipement, alors que la facture énergétique s’allégerait davantage pour revenir à 96 milliards en 2026. De leur côté, les recettes de voyages continueraient d’enregistrer des performances remarquables pour s’établir à 128,4 milliards en 2026, tandis que les transferts des MRE poursuivraient le recul observé ces derniers mois pour terminer l’année en cours en baisse, avant de s’orienter de nouveau à la hausse pour terminer l’année 2026 à près de 121 milliards. Dans ces conditions, le déficit du compte courant resterait contenu oscillant autour de 2% du PIB en 2025 et en 2026. Quant aux investissements directs étrangers, ils maintiendraient leur tendance haussière pour se situer à l’équivalent de 3,5% du PIB en 2026. Au total, tenant compte notamment des financements extérieurs du Trésor, les avoirs officiels de réserve se renforceraient à 407 milliards de dirhams à fin 2025 puis à 423,7 milliards à fin 2026, avoisinant l’équivalent de 5 mois et demi d’importations de biens et services.
Concernant les conditions monétaires, le déficit de liquidité devrait s’atténuer à 122,5 milliards de dirhams à fin 2025, avant de se creuser à 140 milliards en 2026. Au regard de l’évolution prévue de l’activité économique et des anticipations du système bancaire, le crédit bancaire au secteur non financier connaitrait une nette accélération avec une progression de plus de 6% en 2025 et en 2026 au lieu de 2,7% en moyenne durant les deux années précédentes. S’agissant du taux de change effectif réel, il devrait ressortir quasi-stable au terme de 2026, avec une appréciation de 1,9% cette année suivie d’un recul de 1,7% en 2026.
Sur le volet des finances publiques, l’exécution budgétaire au titre des quatre premiers mois de 2025 indique une poursuite de l’amélioration des recettes ordinaires, qui ressortent en augmentation de près de 17%, portées par la progression des rentrées fiscales. En parallèle, les dépenses globales se sont alourdies de 23,6%, reflétant l’accroissement aussi bien des dépenses ordinaires que celles au titre de l’investissement. Tenant compte de ces réalisations, des données de la loi de finances 2025 et de la Programmation Budgétaire Triennale 2025-2027 ainsi que des crédits supplémentaires ouverts par le Gouvernement en avril, le déficit budgétaire, hors produit de cession des participations de l’Etat, devrait, selon les projections de Bank Al-Maghrib, se maintenir à 3,9% du PIB en 2025 avant de s’alléger à 3,4% en 2026.
