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BAD : Le Mauritanien Sidi Ould Tah, nouveau président de la Banque africaine de développement

Le Mauritanien Sidi Ould Tah, élu président de la BAD, prendra ses fonctions le 1er septembre 2025 avec un programme axé sur l’indépendance financière et le développement durable de l’Afrique.

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L’économiste mauritanien Sidi Ould Tah, 60 ans, a été élu, jeudi à Abidjan, président de la Banque africaine de développement (BAD), devenant le premier Mauritanien à occuper ce poste prestigieux.

Succédant au Nigérian Akinwumi Adesina à partir du 1er septembre 2025, il a remporté l’élection en trois tours avec un score triomphal de 76,18 % des voix. Chez les votants africains, Tah a obtenu 72,37 % des suffrages, assurant une légitimité continentale. Pour remporter cette élection, qui s’est déroulée en marge des Assemblées annuelles de la BAD à Abidjan, siège de l’institution, il fallait une double majorité : celle des 81 pays membres, dont 54 africains, et celle des pays africains.

«Je suis prêt à travailler tout en mesurant la responsabilité et le devoir qui accompagne cette mission», a déclaré Sidi Ould Tah à l’issue de son élection, insistant sur la solidarité africaine. Le candidat zambien, Samuel Munzele Maimbo, a salué cette élection : «Aujourd’hui, les gouverneurs ont choisi le leader qui, selon eux, va donner la vision de l’Afrique que nous voulons à ce moment décisif».

Dernier candidat à s’être déclaré, Tah a mené une campagne éclair, s’appuyant sur ses dix années à la tête de la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (Badea) depuis 2015. Il revendique avoir transformé cette institution, passant d’une entité «inconnue des agences de notation» à l’une des mieux notées en Afrique. «J’ai prouvé mon style de leadership transformateur qui a élevé la banque au rang d’acteur de premier plan dans le paysage du développement africain», a-t-il affirmé dans sa déclaration de candidature.

Polyglotte, maîtrisant le français, l’anglais, l’arabe et le wolof, cet ancien ministre de l’Économie de Mauritanie (2008-2015), titulaire d’une maîtrise en économie de l’université de Nouakchott et d’un doctorat de l’université de Nice, a su rallier des soutiens diplomatiquement variés, des pays sahéliens comme le Mali jusqu’à la France.

Programme 

Son programme repose sur quatre priorités : renforcer les institutions financières régionales, affirmer l’indépendance financière de l’Afrique sur les marchés mondiaux, utiliser la dynamique démographique comme levier de développement et construire des infrastructures résilientes face au changement climatique.

«La BAD doit abandonner les modèles bureaucratiques traditionnels pour une approche plus fluide et axée sur les résultats», a-t-il prôné, plaidant pour «rompre avec les approches du passé» dans un monde où les «défis et opportunités de l’Afrique ont pris une nouvelle dimension».

Sur les questions environnementales, il souhaite valoriser les ressources naturelles du continent pour une «transition énergétique viable, conciliant impératifs économiques et environnementaux». «Bien que l’Afrique soit un contributeur minimal aux émissions mondiales de CO₂, elle subit de plein fouet les effets du changement climatique. Il est donc impératif d’intégrer des pratiques durables et d’exploiter les énergies renouvelables dans les projets de développement», a-t-il expliqué.

Sidi Ould Tah prend la tête d’une institution confrontée à un environnement économique international complexe, notamment avec le désengagement annoncé des États-Unis, qui prévoient de suspendre leur contribution de 500 millions de dollars au fonds de la BAD destiné aux pays à faible revenu. Pour pallier cela, il compte attirer d’autres financiers, comme les pays du Golfe, qu’il connaît bien grâce à son expérience à la Badea.

Sidi Ould Tah devrait s’inscrire dans la continuité des «High 5», les cinq priorités établies par son prédécesseur : éclairer, nourrir, industrialiser, intégrer et améliorer la qualité de vie des populations.

Sous la présidence d’Akinwumi Adesina, le capital souscrit de la BAD a triplé, passant de 93 à 318 MM$, et 565 millions de personnes ont bénéficié de ses projets, incluant la construction de la plus grande station d’épuration d’Afrique en Égypte, un pont entre le Sénégal et la Gambie, l’extension du port de Lomé au Togo, ou encore des initiatives d’assainissement au Lesotho et d’accès à l’électricité au Kenya.

«Je suis fier de l’héritage que je laisse derrière moi. Nous avons construit une institution financière de classe mondiale qui va continuer à faire progresser la position de l’Afrique dans un environnement mondial qui évolue rapidement», a déclaré Adesina.