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Vision 2020 : retard à  l’allumage

A l’exception de la constitution du fonds d’investissement Wessal, les chantiers sont au point mort. La formation oubliée, les Agences territoriales non encore créées, de même que le Conseil supérieur du tourisme. Difficile d’atteindre les objectifs à  l’échéance fixée.

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Touristes Sahara Maroc 2012 05 08

Les objectifs de la Vision 2020 pour le tourisme risquent d’être compromis. Depuis que cette stratégie basée sur le développement du tourisme durable et la régionalisation de la gouvernance et destinée à donner une nouvelle impulsion au secteur a été présentée le 30 novembre 2010, certains dossiers ont tout l’air d’être à l’arrêt.

A commencer par le chantier de la formation de ressources humaines de qualité, un chantier grandement négligé dans la Vision 2010 et celle de 2020, avec une déclinaison territoriale qui consiste à créer une école par territoire touristique ainsi que des pôles d’excellence. De tout cela, on n’a encore rien vu. La formation des jeunes se poursuit de la manière la plus classique avec, en fin de parcours, la mise sur le marché de lauréats en grandes quantités, mais que les entreprises rechignent à recruter. Dans le meilleur des cas, elles leur font signer des contrats à durée déterminée en contrepartie d’un salaire de misère.

Preuve de cette défaillance, les grands groupes hôteliers présents au Maroc créent leur propre académie, à l’instar d’Accor, ou assurent des formations en interne comme cela a été le cas pour Mazagan lors de l’ouverture de la station, pour ne citer que ces deux cas.

Pourtant, et le ministère de tutelle et les opérateurs privés sont conscients de cette lacune qu’ils ont tenté de rattraper en signant un contrat programme RH en juin 2008 dans la foulée des assises du tourisme qui ont eu lieu à Tétouan. Ce contrat programme (2008-2012), basé sur une étude qui a estimé le besoin du secteur pour la période de 5 ans à 62 000 lauréats, dont 80% au niveau de quatre régions, avait comme objectif de corriger l’inadéquation formation/emploi.

Dès l’année 2009, au moment de la première évaluation, on s’est rendu compte que le nombre de lauréats est supérieur aux besoins (10 427 diplômés pour un besoin de 8 217 pour l’année 2008). Et puis, ce fut l’oubli total car le comité de pilotage (OFPPT, FNT, FNIH et ministère de tutelle) de ce chantier a cessé de se réunir, à croire que la formation a cessé d’être une priorité.

Un seul séminaire sur le tourisme durable

Pourtant cela a permis de déceler une piste positive de  l’expérience pilote de cogestion par la FNT et l’OFPPT lancée au quartier Bernoussi pour la formation par apprentissage avec 20% de temps pour la théorie et 80% en entreprise.

L’autre chantier tombé dans l’oubli, c’est celui de la gouvernance. Le Conseil national du tourisme, haute autorité du secteur, regroupant les représentants ministériels et ceux du secteur privé, n’a toujours pas été créé, de même d’ailleurs que les agences de développement territoriales (ADT) censées remplacer les conseils régionaux du tourisme (CRT), dont plus personne ne semble se préoccuper. D’aucuns mettent ce retard sur le compte de la perspective des élections locales et régionales, car un collège des élus locaux doit siéger dans ces instances aux cotés des autorités et des représentants du secteur privé.

Autant dire que la mise en place de ces ADT n’est pas pour demain et que les CRT continueront à végéter puisqu’ils sont condamnés à disparaître, leurs actes de décès ayant été signé en même temps que la Vision 2020. Dans ces conditions comment pourrait-on mettre en place des contrats programmes régionaux comme c’est prévu par la Vision 2020. Il semble aussi prématuré de parler des ressources financières pour permettre à ces agences de fonctionner et d’exécuter les contrats programmes qu’elles seront appelées à mettre en œuvre. Déjà, l’exécution de la Vision 2010 a mis en évidence la faiblesse du partenariat public/privé pour faire du tourisme un vecteur de développement pérenne.

S’agissant du tourisme durable, autre priorité de la Vision 2020, il semble bien là encore que le moteur est en panne, car à l’exception d’un séminaire organisé à Marrakech en 2011 sur cette question, rien n’a bougé, alors que la feuille de route fixe comme objectif de faire du Maroc la première destination du tourisme durable du pourtour méditerranéen. Un tel objectif est-il réalisable alors même que le processus d’investissement relatif au tourisme durable n’est pas encore identifié ?
De même, le budget de promotion devrait doubler d’ici 2020. Mais actuellement les décisions prises pour l’année passée et la présente ne vont plus dans ce sens. Les ressources sont toujours limitées à 550 MDH.

Le seul point marqué depuis la signature de la Vision 2020 réside dans la création du fonds d’investissements touristiques Wessal doté d’une enveloppe de 23 milliards de DH constituée avec des capitaux des pays du Golfe. Certes, la crise est passée par là pour atténuer les ambitions, mais se cantonner juste à la gestion de cette crise risque d’être plus coûteux pour le secteur.