Affaires
Très bon premier trimestre 2006 : 5,7% de croissance
Le secteur agricole y a contribué pour 3,1 points.
La valeur ajoutée de l’activité industrielle a augmenté de
3,3%.
Les ventes de ciment sont en hausse de 8,5 % et les crédits à l’immobilier
de 23,1 %.
Les recettes du tourisme en hausse à deux chiffres.
Les prévisions optimistes pour 2006, établies en décembre dernier, aussi bien par le ministère des Finances que par le Haut commissariat au plan (HCP), se confirment et viennent appuyer les impressions des patrons que nous avions recueillies à fin mars (cf La vie éco du 24/03/06). Si la tendance se confirme pour les mois à venir l’année sera bonne, très bonne même. Sur les trois premiers mois de l’année, en effet, la croissance du PIB par rapport au trimestre similaire d’il y a un an est estimée à 5,7 % par Plan. Un taux en phase avec celui prévu pour l’ensemble de l’exercice.
Quoique la part revenant à l’agriculture soit relativement importante retenons tout de même que ce taux de croissance relativement élevé sur le premier trimestre est le résultat d’une évolution soutenue de pratiquement l’ensemble des secteurs économiques. Les activités agricoles, grâce à des précipitations abondantes et géographiquement bien distribuées, ont enregistré une nette amélioration. On estime à quelque 75 millions de quintaux la récolte céréalière pour cette campagne. Il en résulte que la contribution de ce secteur à la croissance du PIB pour le premier trimestre de 2006 a été estimée à 3,1 points par le HCP.
Les exportations de composants électroniques se sont accrues de 18%
L’activité industrielle n’est pas en reste, puisque sa valeur ajoutée, sur la période considérée, s’est raffermie de 3,3% (contre 1,6 % au quatrième trimestre de 2005), confirmant ainsi l’optimisme des chefs d’entreprises, affiché ces dernières semaines. Un optimisme qui semble d’ailleurs avoir été à l’origine de l’activation des programmes d’investissement des entreprises, puisque les importations de biens d’équipement ont crû de 11,7 % et les crédits à l’équipement de 3,4 %.
Le bon démarrage de la campagne agricole 2005-2006 et l’abondance de l’approvisionnement en intrants des produits agricoles semblent également avoir redonné de la vigueur à l’activité agroalimentaire, de même que les branches des industries mécaniques, métallurgiques, électriques et électroniques ainsi que celles du textile et cuir semblent tirer profit d’une conjoncture internationale plutôt favorable. Selon la Direction des études et des prévisions financières (DEPF) du ministère des Finances, sur les deux premiers mois de 2006, les exportations de composants électroniques se sont accrues de 17,8 % par rapport à la même période de 2005, les ventes à l’étranger de vêtements confectionnés ont progressé de 1,1 % (après un repli de 15,2 % une année auparavant) alors que les livraisons d’articles de bonneterie ont régressé de 1,5 % après tout de même une baisse 21,7% à fin janvier 2005 ; ce qui est considéré par la DEPF comme une amélioration…
Mais c’est surtout l’activité du BTP, « boostée » par les énormes projets publics d’infrastructures (routières, touristiques et hydrauliques) et d’habitat social, qui affiche des performances remarquables, poursuivant ainsi, et de manière soutenue, la tendance haussière enregistrée depuis quelque temps. Deux indicateurs, notamment, permettent de mesurer ce dynamisme : la hausse, à fin mars, des ventes de ciment de 8,5% et des crédits à l’immobilier de 23,1%.
Dans ce secteur secondaire, seule l’activité énergétique, et pour cause, a connu une hausse modeste (3,6 %) par rapport à la même période de 2005 (15,5 %). La flambée des cours du pétrole et du charbon constituant évidemment les éléments explicatifs de cette modeste progression. Ceci a d’ailleurs contribué, comme on le verra plus loin, à l’accroissement de l’indice du coût de la vie, donc de l’inflation.
L’activité minière, en revanche, a carrément régressé puisque la production de phosphate, selon le HCP, a baissé de 3,6 % au terme des trois premiers mois de cette année.
Arrivée de touristes : +13% pour les deux premiers mois
La consommation des ménages, autre variable importante de la croissance, en dépit de la hausse des prix intérieurs, en particulier ceux de l’énergie et des services (transports et communication, notamment, en liaison avec la hausse du prix du pétrole), semble bien orientée, indiquent aussi bien le Plan que la DEPF. Les indicateurs de la dépense des ménages font en effet état du renforcement de la valeur des importations d’appareils récepteurs radio et télévision de 17,6 %. Autre fait à retenir, pour le seul mois de février, les ventes de voitures de tourisme ont augmenté de 36,1 %. La hausse de l’inflation à 2,1% ne semble donc avoir affecté, de manière sensible, la consommation des ménages.
Enfin, la demande des non-résidents selon le Plan est appelée à poursuivre sa tendance haussière, et ce pour la deuxième année consécutive. Selon les données disponibles, à fin février 2006, les arrivées de touristes et les nuitées dans les hôtels classés ont en effet progressé respectivement de 13 % et 5,2 % par rapport à la même période de 2005. Les marchés français, espagnol, anglais et allemand sont ceux qui ont drainé le plus de touristes, en hausse de 7%, 16%, 35% et 6 % respectivement. Mais, il faut bien le souligner, les Marocains résidant à l’étranger (MRE) qui ont regagné le pays surclassent les étrangers puisque leur nombre (316 585) a augmenté de 14%, contre 13 % pour les étrangers (456 438 personnes, toutes provenances confondues).
Dernier élément de la demande, la consommation publique : celle-ci connaà®t en revanche un sensible ralentissement, imputable au recul des charges de fonctionnement, suite à l’opération de départ volontaire à la retraite des fonctionnaires en 2005. Ainsi, à fin mars, les dépenses de personnel ont fléchi de 3,5 %, en glissement annuel, soutient le HCP.
Dégradation du déficit commercial
Les échanges extérieurs restent, eux, marqués par une certaine apathie, en dépit de l’amélioration de la conjoncture internationale et, conséquemment, d’une évolution favorable de la demande étrangère adressée au Maroc qui se situerait selon les estimations à 7,8 % en 2006. L’explication tient au fait que les exportations, bien qu’en progression de près de 10% par rapport à la même période de 2005, ne couvrent évidemment pas les importations qui, elles, ont augmenté de 12,7 %, entraà®nant une aggravation du déficit commercial de 17,3 % et un repli de 1,8 point du taux de couverture qui passe ainsi de 56,3 % à 54,5 %. Heureusement que les transferts des MRE (+11,2%) et les recettes touristiques (+15,8 %) sont là pour atténuer les effets du déficit commercial sur la balance courante. Mais cette situation ne devrait pas trop s’éterniser, même si, dans le contexte d’aujourd’hui, cette détérioration des échanges extérieurs est surtout imputable au renchérissement des prix des produits pétroliers (contre lequel le Maroc n’a pas vraiment les moyens de riposte) et, à un degré moindre, à la hausse des importations de biens d’équipements, ce qui n’est pas une mauvaise chose, puisque suggérant que l’investissement s’améliore.
Les importations de biens d’équipement ont augmenté de 11,7%, un signe qui ne trompe pas.
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5,7% de croissance ? Bien sûr, rétorqueront les pessimistes, quand on part de si bas (1,8% en 2005), la progression ne peut être que significative. Ce qui n’est pas faux, à ceci près que la variable agricole, pesant de tout son poids sur le niveau du PIB, édulcore quelque peu les performances réalisées par les autres secteurs. Il faut savoir en effet que la croissance réelle du PIB non agricole en 2005 serait de l’ordre de 4 %, selon les estimations du HCP. Mieux, s’agissant des activités non agricoles marchandes (secteur secondaire et services marchands), ce taux serait de 5%, selon la même source. C’est dire… Mais cette façon de calculer le PIB sera bientôt modifiée puisqu’un nouveau système de comptabilité nationale est entré en vigueur depuis le 24 avril 2006 ayant pour base l’année 1993 et non plus 1980. Précisons toutefois que la mise à jour du système marocain de comptabilité nationale n’a concerné pour le moment que les années allant de 1998 à 2003 ; le reste le sera à partir de janvier 2007. Autrement dit, les estimations établies par le HCP pour le premier trimestre de 2006 sont encore fondées sur l’ancien système, ce qui laisse supposer qu’il y aurait encore une marge de progression si les données avaient été quantifiées à partir du nouveau système |