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Transport routier au Maroc : 22% du parc des poids lourds a plus de 20 ans

Le transport de voyageurs est surtaxé. Le TIR enregistre de nombreuses faiblesses. La FT CGEM propose une batterie de mesures pour stimuler ce tissu économique.

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Poids lourds Maroc 2013 02 08

La vétusté du parc des poids lourds (plus de 3,5 tonnes de PTAC) de manière générale, quel que soit le pays, a des répercussions défavorables sur le coût et la qualité du transport et de la logistique, ainsi que sur l’environnement. Ces répercussions sont d’autant plus importantes au Maroc que le transport routier  assure 75% des flux des marchandises à travers le territoire national. Cette vétusté est actuellement très marquée puisque 55% du parc de ces véhicules sont âgés de plus de 10 ans, dont 22% dépassent 20 ans. A cet égard, si le ministère de l’équipement et du transport publie l’âge de ce parc dont une grande partie est d’origine européenne, la constitution de celui-ci par norme Euro est actuellement indisponible. Par ailleurs, les émissions de gaz par les véhicules poids lourds ne sont pas encadrées par la réglementation marocaine, celle-ci prescrit seulement que les véhicules d’occasion importés doivent répondre aux normes 4 et être âgés de 5 ans ou moins. Or, les gains potentiels en émissions de gaz à effet de serre résident dans la possibilité offerte de dépolluer l’atmosphère, tout en réduisant la consommation du carburant. Ainsi, il est relevé que pour les poids lourds, ce gain a été important pour l’industrie des transports routiers en France qui importe, comme le Maroc, la quasi-totalité de ses besoins en produits pétroliers. La consommation moyenne d’un poids lourd est passée d’environ 50 litres aux 100 km au début des années 70 à 35 litres aux 100 km dans les années 90, et la mise en œuvre de l’Euro 2 et de l’Euro 3 a permis de gagner également 2 à 3 litres aux 100 km.

Les incitations au rajeunissement du parc inefficaces

Au Maroc, en plus des gains inestimables en dépollution, le remplacement d’un véhicule vétuste ayant 10 ans (et plus) d’âge par un véhicule Euro 4 entraîne une économie de consommation de carburant qui peut atteindre 15 litres aux 100 km multipliés par 100 000 km (parcours normatif annuel pour l’établissement des coûts de référence), soit 15 000 litres par an ! Ainsi, selon le calcul de la FT CGEM, on arrive pour la durée de l’amortissement normatif (10 ans) à 150 000 litres de gasoil, soit un coût de 1,29 million de DH. Dans l’hypothèse d’un amortissement comptable de 7 ans, l’économie de consommation de carburant s’élève à 105 000 litres, soit 859 950 DH. Le parc des camions vétustes concernés par l’opération de rajeunissement étant évalué à près de 36 000 unités, ce gain en carburant est donc de 540 millions de litres par an, soit 5 400 millions de litres en 10 ans ou 3 780 millions de litres pour la durée d’amortissement en 7 ans. Ce qui correspond à un gain de 44 milliards de DH ou 30 milliards, selon la durée d’amortissement. Ceci en émettant 7 à 10 fois moins de gaz à effet de serre.

Dans ces conditions, les incitations au rajeunissement du parc constituent un investissement hautement rentable pour le pays. Or, l’examen du dispositif mis en œuvre par le ministère de l’équipement et du transport pour inciter au renouvellement du parc vétuste permet de relever qu’il est possible d’améliorer les résultats actuellement mitigés de cette mesure qui n’a que peu de succès auprès des opérateurs concernés du transport routier, et ce, pour les raisons suivantes : Le montant de la prime de renouvellement qui varie de 90 000 DH à 155 000 DH selon le tonnage et l’âge du véhicule reste en deça de ce qu’offre le marché d’occasion qui continue de connaître un développement important au détriment de l’acquisition des véhicules neufs. Le montant de la prime, compte tenu du coût de l’acquisition d’un véhicule neuf qui dépasse pour un tracteur le montant d’un million de DH, et en l’absence de possibilités de financement à des taux réduits et de garanties de l’Etat (à travers la Caisse centrale de garantie notamment) handicapent énormément les petits transporteurs dont les moyens de financement restent très limités.

En cas d’impossibilité de disposer de moyens de financement adéquats, le véhicule vétuste est maintenu en circulation, malgré les dépenses exorbitantes d’entretien et de maintenance qu’il occasionne à son propriétaire et les conséquences néfastes sur l’environnement et la sécurité routière. L’opération en vigueur exige la démolition d’un seul véhicule contre l’acquisition d’un véhicule neuf, ce qui n’incite nullement à l’adhésion des petites entreprises de transports concernées, souhaitant éventuellement la démolition de deux ou plusieurs véhicules contre l’acquisition d’un seul. Or, ces petites entreprises constituent le plus gros du secteur du transport routier.

La FT-CGEM propose de porter la prime de renouvellement à 210 000 DH minimum

Pour répondre favorablement aux remarques évoquées ci-dessus, la fédération du transport à la CGEM a proposé de revoir le dispositif à l’occasion de l’élaboration de la Loi de finances 2013 en adoptant les mesures suivantes :

– Augmenter le montant de la prime de renouvellement en tenant compte de la norme du véhicule de remplacement qui engendre un gain en émission des gaz et en consommation du carburant, pour être portée au minimum à 210 000 DH (soit 25% des gains indiqués ci-dessus en termes de consommation de carburant en plus de la dépollution grâce à l’utilisation d’un véhicule de type Euro 4). Cette mesure se traduira, par ailleurs, par la diminution des accidents de la circulation dus à l’état vétuste des véhicules et à l’amélioration du maillon transport dans la chaîne logistique, en vue d’une meilleure compétitivité du Maroc dans ce domaine. Le dispositif devrait concerner en premier lieu les véhicules âgés de 15 ans et plus dont le nombre atteint près de 10 400 unités ;

– Accorder la possibilité aux opérateurs d’acquérir des véhicules âgés de moins de 5 ans au lieu d’un véhicule neuf ;

– Prévoir l’octroi de la prime pour la démolition de plusieurs véhicules contre l’acquisition d’un seul véhicule à l’état neuf, ce qui se traduira par une éventuelle diminution du montant global de la subvention mentionnée ci-dessus ;

– Mettre en place un système de destruction des véhicules vétustes sans obligation de renouvellement et dont le montant de la prime de démolition doit être au même niveau que celui de la prime en vigueur ;

– Instaurer une prime de départ définitif par la radiation du bénéficiaire au Registre spécial du transporteur routier de marchandises pour compte d’autrui ;

– Prévoir le retrait légal des véhicules âgés de plus de 25 ans (cette mesure a été appliquée en Turquie) ;

– Faire bénéficier les opérateurs du transport routier concernés par le rajeunissement du parc des avantages offerts par la Caisse centrale de garantie pour disposer des moyens de financement à taux réduit à l’instar des autres secteurs d’activité ;

– Prévoir en plus de l’aire de démolition des véhicules remplacés à Casablanca, l’aménagement de plateformes régionales pour faciliter l’organisation décentralisée de cette démolition.

La compétitivité des acteurs nationaux de Transport international routier (TIR) doit être améliorée

Pour ce qui concerne le transport de voyageurs, la FT-CGEM a diagnostiqué que les entreprises de transport routier de voyageurs par autocars, qui exercent dans un marché caractérisé par une concurrence ardue, est fortement imposé à travers 13 impôts et taxes fiscales communales ! Par conséquent, la fédération propose un allègement de la pression fiscale sur le secteur à travers la suppression de la taxe de stationnement des autocars qui fait double emploi avec la tarification des services rendus par les gares routières de voyageurs ; l’unification de la tarification des services au niveau des gares routières à hauteur de 0,15 DH le km sur la distance qui sépare la gare de départ et la gare d’arrivée, et à 10 DH pour le transit des autocars.

Le positionnement actuel des entreprises de transport international routier (TIR) au Maroc est sans appel. En effet, ce secteur présente des faiblesses récurrentes : une taille limitée des entreprises marocaines du TIR et des difficultés de regroupement ; un tissu d’entreprises jeunes non consolidées ; un accès à la profession favorisant l’atomisation du secteur et le manque de formation spécifique ; des difficultés de l’activité TIR marocaine pour opérer dans son marché régional européen et pour la captation des chargements de retour ; une faible distribution des produits européens au Maroc, se traduisant par la dépendance du TIR à partir du Maroc à la flotte étrangère…

Par ailleurs, les opérateurs marocains supportent des coûts supplémentaires par rapport à leurs homologues étrangers qui découlent notamment du coût d’achat du véhicule au Maroc supérieur à celui en vigueur en Europe ; des coûts d’assurance et de dédouanement élevés du matériel TIR, des difficultés d’accès au financement ; du coût des retards dans l’octroi triangulaire et donc de retour à vide des véhicules TIR marocains ; du coût d’immobilisation des véhicules TIR marocains à Algésiras et au niveau du port de Tanger ; et de la faiblesse de récupération de la TVA sur le GO par les transporteurs marocains en Espagne. Ces surcoûts se traduisent par une charge totale supplémentaire de 17% par rapport à un prix de revient normal (notamment pour les opérateurs espagnols) du TIR ! D’une manière générale, les entreprises marocaines sont donc peu compétitives par rapport aux exigences des chargeurs, au regard des huit critères principaux de choix pour évaluer les entreprises de transport candidates, à savoir la compétitivité du prix ; la fiabilité dans les délais de livraison ; la flexibilité par rapport à la demande ; la couverture géographique ; la qualité du service ; les systèmes d’information et de traçabilité ; la solvabilité économique et technique et, finalement, les services complémentaires de valeur ajoutée.

Il est urgent d’agir

Par conséquent, les professionnels préconisent plusieurs mesures pour améliorer la compétitivité du secteur : lancer des plans d’aide pour le renouvellement des flottes de véhicules des entreprises du TIR ; moderniser les systèmes d’information des entreprises de transport ; adapter les processus de formation professionnelle et d’accès à la profession aux exigences du secteur ; développer des zones d’activités logistiques spécifiquement pensées pour des entreprises du TIR ; revoir les accords bilatéraux (lors des négociations pour obtenir un accord de libre-échange global et à large spectre avec l’Europe) afin de faciliter le passage du détroit ; favoriser et faciliter le regroupement d’entreprises marocaines du TIR pour créer des structures solvables au niveau technique et économique ; développer une réglementation  pour le secteur du transport (et en particulier pour le TIR) homologable par rapport à la réglementation européenne (processus entamé avec le nouveau code de la route) ; clarifier les responsabilités des acteurs de la chaîne logistique dans le cas de problèmes d’immigration illégale ou drogues ; résoudre les problèmes spécifiques à l’opération du passage du détroit, qui perdurent même après la mise en service du nouveau port de Tanger-Med. Selon la FT CGEM ces actions pourraient former la base d’un véritable plan d’action pour le développement du TIR au Maroc. Seront-elles mises en œuvre ?