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Taxes sur le sable et le rond à  béton : le flop !

La taxe sur le sable ne devrait rapporter que 147 MDH cette année contre une prévision de 900 MDH et celle sur le rond à  béton 87 MDH contre 170 MDH. Les ventes informelles de sable ont explosé depuis l’instauration de la taxe n Les programmes du Fonds solidarité habitat et du Fonds spécial routier seront perturbés.

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sable 2014 10 17

Près de deux ans après leur introduction, les taxes sur le rond à béton et le sable s’avèrent être un échec cuisant pour le gouvernement. Ces prélèvements mis en place par la Loi de finances 2013 ont en effet rapporté des recettes bien en deçà des attentes. La taxe sur le sable, d’abord, a rapporté près de 147 MDH en 2013, et en extrapolant la tendance observée sur les mois écoulés de 2014, c’est ce même montant qui devrait être perçu au titre de l’année en cours, anticipe-t-on auprès de l’administration. C’est 6 fois moins que la recette prévisionnelle de 900 MDH attendue de ce prélèvement. Quant à la taxe sur le rond à béton, ses rentrées plafonnent à un peu plus de 87 MDH en 2013 et ce sera très probablement le cas en 2014 aussi, ce qui représente 50% de moins que les 170 MDH espérés initialement.

Ce flop tient à plusieurs raisons. S’agissant de la taxe sur le sable d’abord, qui s’élève à 50 DH le m3 sur le sable de dunes et d’oueds et de 20 DH le m3 sur le sable de concassage, les professionnels avancent que les pouvoirs publics ont à la base fixé la barre trop haut. «Vu qu’il n’y a pas de chiffres fiables sur la quantité de sable écoulée annuellement par variété au niveau national, il apparaît que l’administration a déterminé ses objectifs de recette de manière hasardeuse», assure un exploitant de carrière. Un autre fait le conforte dans cet avis : «Avant que l’on opte pour l’application de taxes différentes selon le type de sable, l’idée était d’introduire un prélèvement unique de 50 DH le m3 pour toutes les variétés. Mais pour ces deux formules c’est la même prévision de recettes qui a été avancée, ce qui est un non sens». Hormis cet aspect, il faut aussi dire que la réaction du marché à la nouvelle taxe a contribué à l’échec de cette dernière. De l’avis unanime des professionnels, ce prélèvement a orienté les acheteurs de sable vers l’informel dont le poids est passé selon leurs estimations de 55% il y a 2 ans à 70% actuellement. Les opérateurs au noir qui exploitent essentiellement le sable de dunes se soustraient en effet à tout prélèvement, ce qui leur confère un avantage tarifaire conséquent depuis la mise en place de la nouvelle taxe. A l’inverse, «les prix de vente des acteurs formels se sont renchéris du montant de la taxe à laquelle il faut rajouter la TVA et l’IS puisqu’il s’agit d’une charge non déductible», explique un professionnel. Alors qu’un mètre cube de sable ne se vend pas en dessous de 270 DH HT dans le circuit structuré, il descend jusqu’à 230 DH dans l’informel. En bout de course, cela fait moins de ventes pour le circuit formel et tout aussi moins de recettes fiscales.

Chute des importations de rond à béton après la mise en place des mesures de sauvegarde

S’agissant du rond à béton, frappé d’une taxe de 0,10 DH par kilogramme, l’écart entre les recettes escomptées et celles réalisées peut s’expliquer en premier par un repli de la consommation de 3% en 2013, selon les professionnels, auquel fera suite une baisse de même importance anticipée pour l’année en cours. Mais c’est surtout la contraction des importations de rond à béton suite à l’application d’une mesure de sauvegarde qui a le plus bridé les recettes fiscales, sachant que la taxe est acquittée par les importateurs en même temps que les droits de douane. La mesure de sauvegarde en question, appliquée de manière provisoire depuis mai 2013 et de manière définitive à compter de la fin de la même année, courant sur 4 ans, consiste en un droit additionnel de 0,55 DH par kilogramme applicable au-delà d’un contingent de 28000 tonnes de fer à béton importé. Il en a résulté des volumes importés divisés par plus de 2 à compter du troisième trimestre de 2013, pour s’établir à une moyenne trimestrielle de 29 000 tonnes depuis cette date, alors que les mêmes importations totalisaient encore plus de 120 000 tonnes au premier semestre 2013. En plus de la diminution des importations en quantité, d’autres facteurs sont susceptibles d’avoir limité les prélèvements dont notamment le manque d’équipements de pesée au niveau des ports, sur lequel les professionnels avaient attiré l’attention au lendemain de la mise en place de la taxe.

Ces recettes en deçà des prévisions perturbent les plans du ministère de l’équipement. 70% de la taxe sur le sable lui reviennent pour alimenter le Fonds spécial routier destiné au financement des opérations de développement des infrastructures routières. Au lieu de 630 MDH prévus, le département de Aziz Rebbah n’empoche donc que 103 MDH. Le ministère de l’habitat en est affecté aussi car la taxe sur le rond à béton et les 30% restants du prélèvement sur le sable doivent servir à alimenter le Fonds solidarité habitat et intégration urbaine (FSHIU). Pour ce dernier, ce ne sont donc que 131 MDH qui sont encaissés contre une prévision de 440 MDH. La situation est d’autant plus délicate pour le département de Nabil Benabdellah que la principale ressource du FSHIU, la taxe spéciale sur le ciment (2,2 milliards de DH de recettes en 2013), est sur une pente descendante. Cela est à lier, d’une part, au recul des ventes de ciment et, d’autre part, au mouvement de fusion-absorption des cimentiers de leurs filiales béton qui privera le fonds de près de 120 MDH correspondant à la taxe sur le ciment utilisé comme intrant pour la fabrication du béton. Sachant que le FSHIU couvre des chantiers toujours plus gourmands en financements tel que le programme Villes sans bidonvilles, les projets d’habitat social dans les provinces du Sud ainsi que les projets de mise à niveau urbaine, ce n’est pas trop s’avancer que de dire que le ministère de l’habitat essaiera de dénicher de nouvelles sources de recettes dans la prochaine Loi de finances.