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Affaires

Sondage du conseil de la communauté marocaine à  l’étranger : Qui sont réellement nos MRE ?

Une étude réalisée par l’Institut BVA a touché les MRE vivant dans six grands pays européens d’immigration.
Le CCME devait rendre publics ces résultats, jeudi 16 juillet, à  Casablanca.
50% sont naturalisés et 28% en voie de l’être.

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Les Marocains résidents à l’étranger (MRE), on connaît leur poids économique et démographique, mais que sait-on de leur vie dans les pays d’accueil, de leurs sentiments sur les questions sociales, religieuses, voire politiques auxquelles ils y font face, de leurs rapports au pays d’origine…? Ces questions, et bien d’autres, comment se posent-elles dans les différents pays où résident les MRE et comment sont-elles perçues par les émigrés de la 1ère  et de la 2e génération ?
Le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME), qui a voulu se faire une idée sur les MRE, vient de réaliser une enquête, la première du genre, par l’Institut de sondage français BVA, auprès de la population marocaine immigrée de première et de deuxième génération vivant dans les six principaux pays européens d’immigration (France, Espagne, Italie, Belgique, Pays-Bas et Allemagne).
Ce que révèle cette enquête s’avère complètement à l’opposé de l’image que renvoient généralement les MRE, en visite au pays, souvent bien mis, proprets et roulant dans de belles bagnoles. Leurs conditions de vie sont souvent difficiles, et les difficultés sont plus accentuées dans certains pays, plutôt que dans d’autres.

64% parlent la langue du pays de résidence à la maison
 En outre, même s’ils continuent d’entretenir la famille restée au Maroc, d’y acquérir des biens, et de maintenir un solide attachement aux liens socioculturels avec leur pays d’origine, ils sont de plus en plus engagés dans un processus d’insertion durable, voire définitive, dans les sociétés d’accueil. Ce deuxième point particulièrement mérite l’attention, car sur un horizon plus ou moins long, il pourrait avoir des conséquences économiques évidentes : est-ce que la deuxième et surtout la troisième génération de MRE continueront d’envoyer des fonds aussi assidûment qu’aujourd’hui ? Par rapport aux politiques publiques qui peuvent être engagées au profit des MRE, ce point est donc crucial. Plus généralement, l’étude BVA a dégagé quatre grandes observations : une volonté d’insertion durable dans les pays d’accueil, un attachement fort aux aspects socio-culturels du pays d’origine, une perception globalement positive du Maroc et un sentiment relativement fort qu’ils sont mal acceptés en Europe. Ces observations générales cachent, toutefois, des différences, parfois notables, selon le pays d’accueil, la génération à laquelle l’on appartient, le statut social, etc. Sur la première observation, c’est-à-dire l’insertion des MRE dans les sociétés d’accueil, l’Institut BVA nous apprend que 50% parmi eux se déclarent naturalisés et 28% en voie de l’être; soit un total de 78% qui s’enracinent de plus en plus profondément dans les pays d’accueil. Preuve de cet enracinement, 64% d’entre eux parlent la langue du pays de résidence à la maison et, très logiquement, cette proportion monte à 73% pour la 2e génération. Pour les préparer à vivre en harmonie avec le pays d’accueil, 69% des parents ont inscrit leurs enfants à au moins une activité extra-scolaire et, très important, ces activités sont le plus souvent séculières, précise BVA : elles sont organisées soit par les mairies soit par l’école. Autrement dit, des activités à caractère citoyen. Seulement 24% des parents ont inscrit leurs enfants à des activités religieuses organisées par des mosquées.
Sur le plan économique, les MRE sont plus nombreux à posséder un commerce ou des intérêts dans une activité économique dans le pays d’accueil (13%) qu’au Maroc (6%).
Autre signe de l’insertion des MRE, ils sont 55% à déclarer s’intéresser à l’actualité politique du pays de leur résidence, une proportion qui augmente à 70% s’agissant de la 2e génération. Bien plus, 40% des MRE sont déjà inscrits sur les listes électorales du pays de résidence (76% pour la 2e génération). En dépit de cet enracinement qui se renforce à mesure que le temps passe (c’est la deuxième observation), les Marocains vivant en Europe déclarent fréquenter les personnes de la même origine (94%), mais, précisent-ils, cette fréquentation n’est pas exclusive des autres puisqu’ils fréquentent aussi les autochtones (87%) et les autres communautés étrangères (72%). Ces valeurs accusent toutefois quelques différences, selon qu’il s’agisse de la 1ère ou de la 2e génération, sans que cela renverse complètement l’observation générale.

Majoritairement endogames
Autre signe du maintien des liens avec les traditions socioculturelles du pays, 88% des mariages des MRE se font au sein de la communauté. Et cette proportion est à peine légèrement moins importante chez la 2e génération (84%). Les MRE sont donc très majoritairement endogames.
Ce lien au pays apparaît également à travers la fréquence des voyages au Maroc : 7 MRE sur 10 déclarent s’y rendre au moins une fois par an. Et ceci en dépit, semble-t-il, de difficultés qu’ils y rencontrent mais sur lesquelles seulement 35% osent s’exprimer, selon BVA. Malgré tout, 52% des MRE déclarent envisager de terminer leur vie au Maroc contre 30% en Europe, tandis que 16% préfèrent ne pas se prononcer sur le sujet. Globalement, et c’est la troisième observation, les MRE ont une perception positive du Maroc, même s’ils nourrissent -surtout la 2e génération- des attentes en termes de facilitation des démarches administratives et des déplacements…
Enfin, dernières observations, les MRE ont le sentiment d’être discriminés et pensent qu’ils ne sont pas pleinement acceptés dans leur pays de résidence. 40% parmi eux déclarent avoir connu une période de chômage au cours de ces trois dernières années. Il faut sans doute préciser ici que, comme le montre d’ailleurs l’enquête, les situations sont différentes d’un pays à un autre, d’un statut social à un autre, voire selon la région d’origine de l’immigration (les immigrés issus de Casablanca ne vivent pas de la même façon ni ne perçoivent les choses de la même façon que ceux issus du Souss ou de l’Atlas ou encore du Rif). Et ces différences, l’étude en rend compte. D’où sa richesse.