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Tourisme : Un plan de sauvetage salué, mais jugé «insuffisant»

• Les professionnels appellent à la réouverture des frontières n La clientèle locale se réduit de plus en plus.
• Même l’enveloppe budgétaire de 2 milliards de DH n’est pas conséquente
• Les conditions d’éligibilité ne sont pas encore communiquées aux opérateurs.

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Le secteur du tourisme a enfin pu bénéficier d’une action concrète du gouvernement. Un plan de sauvetage d’une enveloppe budgétaire de 2 milliards de DH a été lancé récemment, comprenant un certain nombre de mesures en faveur des acteurs du secteur. Environ 22 mois se sont écoulés depuis le début de la crise sanitaire, sans que le secteur n’ait bénéficié d’une aide spécifique qui lui soit entièrement dédiée. Et il aura fallu l’avènement de ce gouvernement pour que chose soit faite. «Nous saluons vivement ce geste du gouvernement pour l’accompagnement du secteur touristique. Toutefois, nous regrettons l’exclusion de certains métiers, dont notamment les agences de voyages et la restauration classée, des mesures bancaires et fiscales», déplore Hamid Bentahar, président de la Confédération nationale du tourisme (CNT). D’autant que ce plan de sauvetage ne semble pas toucher l’ensemble des intervenants du secteur touristique.

En effet, tout un écosystème tourne autour du secteur touristique, dont nombre de PME et TPE, plusieurs fournisseurs et prestataires de services qui se retrouvent en arrêt d’activité également, sans aucun revenu, ainsi qu’une bonne partie de personnes physiques travaillant dans l’informel. Seuls les établissements «sérieux», payant leurs impôts et taxes à l’Etat et déclarant la totalité de leur personnel bénéficient de ces mesures. Mais alors, qu’en est-il des autres ? Sachant que nul ne peut nier la portée du secteur parallèle ! D’un autre côté, n’est-ce justement pas ces établissements «sérieux» qu’il faut encourager pour assainir le secteur dans sa globalité.

Bref, de son côté, Quentin Bourru, General manager de Radisson Blue Resort & Residences à Al Hoceima, se déclare soulagé que le gouvernement ait enfin traité un secteur laissé pour compte pendant longtemps. «Il en va de la survie de nos unités hôtelières. Un geste louable certes mais une enveloppe qui n’est pas du tout suffisante, compte tenu des pertes colossales accumulées par le secteur», se désole-t-il. Pour un secteur qui rapporte 138 milliards de DH de recettes touristiques globales dont 80 milliards de DH en devises, c’est à se demander réellement si ce budget serait suffisant et de quelle manière serait-il réparti entre les opérateurs. La question mérite d’être posée, puisque les opérateurs, à cette date, ne connaissent pas les conditions d’éligibilité à ces mesures. «Mis à part le communiqué que nous avons reçu détaillant les mesures, aucune autre information ne filtre pour identifier notre éligibilité à ce plan de sauvetage», souligne M. Bourru.

Il ajoute : «Quoi qu’il en soit, ce n’est qu’un pansement sur une jambe de bois. D’ailleurs, aucun plan de survie ne permettra de sauver l’industrie touristique et de revenir à une situation normale, si ce n’est la réouverture des frontières». Condition partagée par M. Bentahar qui insiste : «Ce n’est qu’à travers cette mesure concrète que le secteur se redressera». M. Bourru renchérit: «Le secteur, avec toutes ses composantes, aurait pu passer outre toutes ces mesures, si les frontières rouvrent, sans menace de fermeture à n’importe quel moment». D’ailleurs, tous les intervenants du secteur appellent à la réouverture immédiate du ciel aux touristes étrangers, tout en respectant les mesures sanitaires édictées. Il n’est certes pas question de rouvrir de manière anarchique.

Des protocoles doivent être programmés à l’arrivée, comme à la sortie, avec des tests PCR, le refus des personnes non vaccinées triplement… «Les pays   comme la Turquie, l’Egypte et la Tunisie n’ont pas fermé leurs frontières et n’ont pourtant pas connu de pic épidémique consécutivement à l’arrivée des touristes étrangers», illustre M. Bourru. En tout cas, cette fermeture a non seulement entraîné une léthargie du secteur touristique, toutes activités confondues, mais semble aussi avoir réorienté les touristes vers les destinations concurrentes et aurait permis, par ailleurs, à ces pays de saisir nos parts de marché. Vu cet état des choses, les hôteliers se sont tournés vers le tourisme local et ont essayé, tant bien que mal, d’adapter leurs offres afin de séduire la clientèle nationale. «Cette stratégie a bien fonctionné l’été dernier, puisque plus de 80% de nos revenus ont été générés par les touristes locaux. Sauf que ce n’est pas viable. Avec la baisse du pouvoir d’achat, l’envie des Marocains de scruter d’autres cieux…, cette clientèle se rapetisse de plus en plus, même pour la clientèle qui a l’habitude de fréquenter le marché touristique marocain», conclut M. Bourru

Un plan d’urgence pour sauver les acteurs du secteur touristique

Le plan d’urgence du secteur touristique, de 2 milliards de DH, s’articule autour de plusieurs mesures. Elles concernent d’abord le prolongement du versement de l’indemnité forfaitaire de 2 000 DH durant le premier trimestre 2022, pour tous les employés du secteur du tourisme, les transporteurs touristiques et les restaurants classés. Elles prévoient aussi le report des charges dues à la CNSS pendant 6 mois pour ces mêmes employés. Ensuite, ce plan entend mettre en place un moratoire relatif aux échéances bancaires sur une durée pouvant aller jusqu’à 1 an, pour les hôteliers et les transporteurs touristiques. De plus, les intérêts intercalaires seront pris en charge par l’Etat pour une période équivalente aux mois de non-activité en 2021, ainsi que le premier trimestre 2022.

Il s’agira également de la prise en charge par l’Etat de la taxe professionnelle due par les hôteliers en 2020 et en 2021, et de l’octroi d’une subvention de l’Etat au secteur de l’hôtellerie, pour un montant global de 1 milliard de DH. L’objectif de cette aide est de soutenir l’effort d’investissement (entretien, rénovation, formation…) des hôtels souhaitant se préparer à un redémarrage rapide de l’activité dès la réouverture des frontières