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Royal Air Maroc redresse ses comptes après deux années de crise

Les réalisations à  fin juin 2012 dépassent les prévisions du contrat programme : un résultat d’exploitation de -56 MDH contre un objectif de -520 millions. Réduction des charges, suppression des dessertes non rentables, réduction de la flotte et du personnel ont permis d’atteindre ces performances. L’exercice 2012 devrait s’achever sur un résultat d’exploitation positif de 836 MDH.

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1 Royal Air Maroc 2012 07 27

En dépit d’un contexte difficile, marqué par un ralentissement du trafic, Royal Air Maroc (RAM) est en passe de réussir sa restructuration, comme en témoignent le redressement de son compte d’exploitation à fin juin et les prévisions pour l’exercice 2012 qui s’étalent, pour les compagnies aériennes, du 1er novembre 2011 au 31 octobre 2012. En effet, selon des données de première main obtenues par La Vie éco, le résultat d’exploitation de la compagnie nationale pour les 8 premiers mois de l’exercice s’est établi à -56,4 MDH contre -943 millions une année auparavant et -520 MDH prévus dans le contrat programme signé avec le gouvernement en septembre 2011. Le chiffre d’affaires dépasse, lui, de 5,7% l’objectif du contrat programme puisqu’il s’est établi à 7,65 milliards de DH. Par rapport à juin 2011, le volume d’affaires est en quasi-stagnation (-0,6%).

Il faut rappeler que la RAM a connu deux années noires, 2010 et 2011, qui se sont soldées par des résultats d’exploitation lourdement déficitaires (-500 MDH pour l’exercice précédent). Et ce qui confirme encore plus le redressement de la compagnie, c’est le résultat d’exploitation prévu pour tout l’exercice 2012 qui devrait sortir du rouge et dépasser les 800 MDH (836 millions précisément), soit le niveau le plus élevé pour la décennie 2002-2012.

Comment la RAM est-elle arrivée à une telle situation critique en 2010 et 2011 et comment est-elle, aujourd’hui, en train de sortir la tête de l’eau ? En fait, il faut remonter à l’année 2004 durant laquelle le Maroc a décidé d’ouvrir son espace aérien aux compagnies étrangères, ouverture officialisée par la signature en février 2006 de l’accord de «l’open sky» avec l’Union Européenne. Cette ouverture s’est traduite par l’arrivée massive des compagnies à bas coûts dont deux gros calibres (Ryanair et Easy jet) et par la création de compagnies du même type, de droit marocain, comme jet4you en 2006 et Air Arabia Maroc en 2010. La RAM avait créé sa propre compagnie low-cost en 2005 (Atlas Blue) pour coller à la politique du gouvernement en matière de transport aérien. Le développement du hub de Casablanca, notamment vers l’Afrique, a permis à la compagnie nationale de bien résister à l’arrivée des compagnies low-cost et de maintenir et améliorer son équilibre financier, situation qui avait duré jusqu’en 2008, année durant laquelle RAM et sa filiale low-cost ont pu totaliser 6,5 millions de passagers au lieu de 2,3 millions en 2003. La compagnie pouvait même s’enorgueillir d’être classée troisième compagnie aérienne africaine avec 6 millions de passagers et un chiffre d’affaires de 1,5 milliard de dollars, juste après la compagnie sud-africaine South African Airways et Egyptair. Le chiffre d’affaires de RAM dépassait, à l’époque, celui de Air Algérie et de Tunis Air réunis.

L’année 2008 a marqué le début de la crise pour la RAM

L’année 2008 a toutefois marqué un tournant pour la compagnie nationale avec, d’abord, la flambée du cours du baril de pétrole qui avait atteint en juillet de cette année le pic de 147 dollars. L’arrivée en masse des low-cost dont l’offre en sièges équivalait à celle de la RAM, avec des prix tirés de plus en plus vers le bas, conjuguée à une stagnation de la demande, a mené la compagnie nationale à une situation de déséquilibre financier qui est allée en s’aggravant jusqu’en 2011.

La sonnette d’alarme a été tirée en 2010, et en attendant les secours de l’Etat, des décisions pour limiter les dégâts ont été prises rapidement dont l’arrêt net d’Atlas Blue, le gel des salaires pour deux ans, la réduction des charges d’exploitation, en même temps que furent entamées les négociations avec les partenaires sociaux qui devaient aboutir à l’accord d’août 2011 avec le bureau syndical de la RAM pour réduire le personnel de la compagnie.

La route était ainsi balisée pour la signature d’un contrat programme de sauvetage en septembre 2011 suivi, dès octobre, de la signature d’un accord de partenariat avec le Fonds Hassan II pour le développement économique et social qui est entré dans le capital de la compagnie aérienne avec un apport de 1,6 milliard de DH, conditionnés par la mise en œuvre d’une stratégie pour la restructuration de la compagnie et le rétablissement de ses équilibres fondamentaux dès 2013, ainsi que l’élaboration d’un plan de développement pour l’après-2014 suivant les directives de l’Etat.

La première phase relative à la restructuration de la compagnie et dont les résultats sont aujourd’hui palpables s’est articulée autour de plusieurs actions. Premièrement, il y a eu la réorganisation du réseau avec, d’une part, la suppression d’une vingtaine de dessertes non rentables et, d’autre part, l’amélioration et le renforcement de l’activité au niveau du hub de Casablanca en direction de l’Afrique et de l’Europe, notamment la France, avec comme objectif une répartition des vols à l’horizon 2015-2016 plus rationnelle. Les vols réguliers internationaux devraient avoir à cette échéance une part de 70%, les vols intérieurs 13% et les vols point à point 17%.

En second lieu, il y a eu la réduction et le rajeunissement de la flotte qui était passée de 32 appareils en 2002 à 54 en 2010 et 51 en 2011. Aujourd’hui, la flotte opérationnelle se compose de 43 avions avec une moyenne d’âge de 7 ans, la compagnie ayant opté pour la cession ou la location des vieux avions tout en abandonnant l’exploitation des appareils qui ne sont pas adaptés à sa nouvelle stratégie(dont les 2 Airbus A 321).

Enfin, il y a eu la réduction de 35% de l’effectif de la compagnie qui a été ramené à 3 875 personnes au lieu de 5 937 en 2002 grâce à différentes opérations de départs volontaires négociés. A ce sujet, la seule année 2012 a vu le départ de 1 730 personnes, alors que le contrat programme prévoyait un échéancier allant jusqu’à fin 2013 pour le départ de 1 560 employés.

D’autres actions réalisées ou en cours de réalisation ont permis d’améliorer les performances de la compagnie, en l’occurrence la réduction des charges d’un milliard de DH d’ici à la fin 2012, l’amélioration de l’image de la compagnie grâce à des actions sur le terrain, entre autres, pour assurer une meilleure ponctualité et une baisse des incidents bagages ainsi qu’une réduction des points de vente et le développement de la vente en ligne.

S’agissant de la deuxième phase relative aux perspectives d’avenir de la RAM, une étude est en cours de réalisation pour déterminer la taille de la flotte à l’horizon 2025, les marchés nouveaux qui pourraient être développés et le recours à des opérateurs externes en matière de handling et de catering. La possibilité d’ouvrir partiellement le capital de la compagnie est aussi envisagée sans que cette ouverture ne soit dictée par des contraintes financières. En effet, alors qu’il était prévu un apport supplémentaire de 1,2 milliard de DH, à travers une cession d’une partie du capital en bourse et/ou à un partenaire stratégique, 50% de ce besoin a déjà été comblé à travers une économie de charges de 600 MDH réalisée à fin juin. Les résultats prévus pour 2012 incitent donc à l’optimisme et pourraient permettre à la compagnie de faire l’économie de cette nouvelle recapitalisation prévue par le contrat programme pour 2013 et 2014.