Affaires
Rétrospective 2012 : ce sont les services qui ont sauvé l’année pour le Maroc !
Le transport, les communications, le tourisme même, ainsi que les autres services marchands comme les assurances, sont en hausse. Les activités secondaires, notamment l’industrie et le BTP, ont été assez moroses.
C’est une année 2012 moins bonne que prévue qui s’achève, laissant place néanmoins à un nouvel exercice dont, d’ores et déjà, on prédit un meilleur comportement (4,5% de croissance prévue). En effet, le gouvernement, qui s’attendait à une progression du PIB de 3,4% en 2012, devrait se contenter d’une hausse inférieure à 3% (autour de 2,8%). C’est une évolution positive, bien entendu, d’autant que les principaux partenaires du Maroc sont loin d’être sortis de la mauvaise passe qu’ils traversent depuis 2008 (0% de croissance au troisième trimestre après -0,2% au deuxième en zone euro). Mais, en même temps, tout le monde sait que le Maroc a besoin, pour rattraper ses nombreux déficits, d’une croissance supérieure à 6% et qui soit pérenne. Surtout, ce qui compte le plus, c’est que la croissance non agricole retrouve le palier (supérieur à 5%) dans lequel elle s’était installée quelque temps, avant de fléchir ces cinq dernières années.
Malgré tout, c’est grâce à cette croissance non agricole que les 2,8% seront atteints en 2012, car la valeur ajoutée agricole, elle, a tout simplement été négative (-7% environ, selon le HCP), conséquence du déficit pluviométrique qui a marqué la campagne précédente.
Ceci au plan de l’offre. Concernant la demande, elle continue de tirer l’économie, mais exclusivement dans sa composante interne (consommation et investissement) ; le commerce extérieur, au contraire, devant y contribuer négativement, cette année encore, selon les estimations du Haut commissariat au plan (-1,1%, après -1,5% en 2011).
Il en résulte que les finances publiques aussi bien que les finances extérieures continuent d’enregistrer des déficits élevés, et ceux de 2012 seront probablement plus élevés que ceux de 2011 (voir encadrés).
Qu’en est-il, dans le détail, du comportement des activités sectorielles ?
La production des trois principales céréales en baisse de 39%
Le déficit pluviométrique qui a marqué la campagne 2011/2012 s’est traduit par une baisse des rendements de la plupart des secteurs, selon le HCP. En particulier, la production des trois principales céréales (blé tendre, blé dur et orge) a accusé une baisse de 39,1%, à 51 millions de quintaux sur une superficie de près de 5 millions d’ha, soit un rendement de 10,1 qx/ha, selon l’Office national interprofessionnel des céréales et légumineuses (ONICL). Malgré le niveau élevé des stocks de céréales découlant de la campagne 2010/2011, ceux-ci ont commencé à baisser depuis mars 2012, à mesure que les utilisations industrielles et alimentaires se renforçaient en même temps que la récolte baissait ; d’où le recours à l’importation pour un volume totalisant, à fin novembre, 27,9 millions de quintaux, soit une hausse de 63% en glissement annuel.
Mais la baisse n’a pas concerné que les céréales, elle a également touché les légumineuses, principalement les lentilles et les petits pois dont la récolte s’est fortement contractée, nous dit le HCP (-58 et -53% respectivement). Les cultures irriguées, notamment les primeurs, se sont en revanche plutôt bien comportées.
Mais, globalement, la valeur ajoutée du secteur primaire (agriculture, sylviculture et pêche) en 2012 devrait baisser de 5,8%, selon le ministère des finances et de 9,3%, selon le HCP. A fin septembre, en tout cas, la baisse des activités agricoles a été de 8,6%.
C’est évidemment cette contre-performance-là qui a tiré à la baisse le PIB global ; car les activités hors agriculture, globalement, se sont plutôt bien comportées. Au troisième trimestre de 2012, la valeur ajoutée du secteur hors agriculture a augmenté de 4,8%. Quelles sont les activités qui ont concouru à cette hausse ?
Les ventes d’électricité toujours en hausse
Les activités énergétiques ont réalisé une croissance de 13,8% à fin septembre, en variation trimestrielle. Elles sont tirées principalement par la branche électrique. L’énergie électrique nette appelée à fin octobre a en effet augmentée de 8,3%, satisfaite en grande partie par la production thermique. La production hydraulique a en revanche baissé de 27,1% et les échanges avec les pays voisins (Espagne et Algérie) se sont quasiment stabilisés à leur niveau de l’année dernière. L’activité de raffinage de pétrole a, elle aussi, bien évolué. La production des produits raffinés (gasoil, fioul, essence super, propane, butane, etc.) a augmenté de 6,2% à fin octobre.
Dans le secteur minier, l’amélioration apparue au deuxième trimestre s’est poursuivie au troisième, avec une valeur ajoutée en hausse de 2,7%. Cette augmentation est à mettre sur le compte de la branche des phosphates qui a bénéficié d’une reprise de la demande mondiale vigoureuse et aussi des ventes aux industries locales de transformation. Plus généralement, indique le HCP, la branche phosphatière devrait profiter, au cours du quatrième trimestre et les mois suivants, de la robustesse de la demande mondiale, en liaison, d’une part, avec l’attractivité des prix des matières agricoles, et, d’autre part, du retrait des exportations chinoises de phosphates, lestées par une nouvelle taxe à l’export décidée par Pékin.
D’après l’enquête de conjoncture du HCP auprès de chefs d’entreprises, la production des industries de transformation a baissé au troisième trimestre par rapport au précédent et l’amélioration ne serait pas au rendez-vous au cours du dernier trimestre de l’année. Sur le plan statistique, cette fois, la valeur ajoutée industrielle a baissé de 0,4% au deuxième trimestre, mais devrait légèrement augmenter de 1,2% au troisième (presque un effet de rattrapage, pas plus), selon des estimations non encore confirmées par la comptabilité nationale. Pour s’en tenir à l’indice de production, seul indicateur disponible pour le moment, celui-ci a augmenté au troisième trimestre de 1,5%, en glissement annuel. Par branche, il a augmenté de 4,3% dans les industries alimentaires, de 7% dans l’industrie automobile et baissé de 3,4% dans l’industrie du textile (mais attention, la valeur ajoutée, c’est évidemment autre chose que l’indice de production !).
Le secteur secondaire a faiblement progressé
Au total, le secteur secondaire a petitement évolué, tout au moins jusqu’au troisième trimestre de l’année. Sur les 2,9% de croissance globale réalisée sur le troisième trimestre, le secondaire y a contribué pour 0,9 point.
Avec la baisse de la valeur ajoutée agricole (contribuant pour -1 point à la croissance globale) et le tassement du secteur secondaire, la croissance se résume, en fait, à celle produite par le secteur tertiaire (+2,9 point à l’évolution du PIB).
Les télécoms en forte hausse
Le secteur des services est, en effet, celui qui a tiré son épingle du jeu dans une conjoncture pourtant des plus difficiles. Le tourisme, depuis le début de l’année, est entré dans une phase de reprise, même légère (+1,7% de hausse de la valeur ajoutée de l’hébergement et de la restauration) et cette tendance devrait se poursuivre au quatrième trimestre. Le transport, globalement, a évolué sur un trend haussier au début de l’année (1,1% de valeur ajoutée), avant de fléchir légèrement au deuxième trimestre (+0,6%). Il reprend cependant au troisième trimestre (+1,2%). Par filière, c’est le transport aérien qui est resté atone, tirant vers le bas le rythme global, car le ferroviaire et le maritime ont bien évolué. La communication est l’activité qui a le plus fortement augmenté, en raison notamment de la baisse des tarifs des communications et de la forte hausse des abonnés à Internet (+10,4% au troisième trimestre, après +8,1% le trimestre précédent). Ainsi, la valeur ajoutée des télécoms a augmenté de 4,9% au deuxième trimestre et de 7,7% au troisième.
Les autres services marchands, notamment les banques et assurances, enregistrent, quant à eux, des évolutions positives d’une année à l’autre, en raison notamment de la nature de leurs activités et de la réglementation qui les encadre.
Cette offre a une contrepartie qui s’appelle la demande. Et celle-ci, sans surprise, est restée interne. Ce sont donc la consommation et l’investissement, les deux composantes de la demande intérieure, qui ont été à l’origine de la croissance réalisée.
La contribution de l’investissement à la croissance est très faible
La consommation des ménages continue de représenter la principale variable de la croissance marocaine. Elle a évolué jusqu’ici favorablement, bénéficiant d’une bonne orientation des crédits à la consommation (+11% à fin octobre), de la modération de l’inflation (1,2% à fin novembre) et des améliorations des revenus des ménages, suite aux mesures décidées dans le dialogue social. Globalement, la consommation domestique, selon le HCP, devrait augmenter de 4,5% au quatrième trimestre, après 4,2% au troisième. Idem pour la consommation des administrations publiques, qui a été “boostée” par la hausse des dépenses de fonctionnement.
L’investissement, mesuré par la formation brute du capital fixe (FBCF), a quant à lui, progressé de 2,8% au troisième trimestre, après une quasi-stagnation au deuxième trimestre (+0,8%) et une forte hausse au premier (6,1%). Il continuerait de progresser au quatrième trimestre mais à un rythme moins soutenu, selon les indications du HCP. La contribution de l’investissement au PIB global réalisé jusque-là a été très faible (0,2 point). Cette faible évolution est expliquée en particulier par le relâchement observé dans l’investissement à la fois en produits industriels et du BTP; ces deux secteurs traversant une conjoncture morose.
Reste la dernière composante de la demande, celle exprimée par les partenaires étrangers : en raison de la crise qui sévit encore, notamment en Europe, cette demande demeure faible. Selon le HCP, la demande mondiale adressée au Maroc a baissé de 0,5% au troisième trimestre après une hausse de 1,6% au deuxième trimestre. Au quatrième trimestre, elle ne devrait pas dépasser 1% de hausse. Moyennant quoi, la contribution du commerce extérieur à la croissance économique demeurera négative, une fois de plus.
Cependant, avec la bonne pluviométrie enregistrée cette année, l’année 2013 sera certainement meilleure, le secteur primaire devant contribuer très positivement à la croissance globale.
A Lire aussi :
Maroc – Déficit budgétaire : on devrait atteindre 6.5% du PIB.
Maroc : Les comptes extérieurs pourraient enregistrer un déficit plus lourd qu’en 2011.
Comment se sont comportés les principaux secteurs d’activité au Maroc, en 2012.
Les délais de paiement s’allongent et les impayés bancaires s’accumulent.