Affaires
Réforme fiscale : ce que propose le patronat
Réaménagement des tranches de l’IGR et taux de TVA unique à 12%.
Pour compenser le manque à gagner en recettes fiscales, l’informel pourrait être intégré dans l’économie grâce à une fiscalité progressive.
La fiscalité marocaine, dont la dernière réforme remonte à une vingtaine d’années, est-elle adaptée à la situation économique d’aujourd’hui ? Marquée par une ouverture de plus en plus grande, l’économie marocaine, selon le patronat, ne peut relever les défis de la mondialisation sans une réforme de la fiscalité actuelle.
Ce message, la CGEM a tenu à le transmettre, de vive voix, lors d’une rencontre récente avec le directeur général des Impôts, Nouredine Bensouda, qui «a prêté une oreille attentive à nos préoccupations», confie Hassan Chami, président de la confédération.
Et cependant, entre les vœux des milieux d’affaires et les contraintes budgétaires de l’administration, il y a certainement place pour une réflexion sur la manière de concevoir l’impôt non plus seulement comme une source de recettes pour l’Etat et de contraintes pour l’entreprise, mais comme un facteur de modernisation de l’économie.
Telle qu’elle fonctionne aujourd’hui, on le sait, la fiscalité repose essentiellement sur les salariés et les entreprises organisées. Vu sous cet angle, l’impôt peut être considéré, toutes proportions gardées, comme une sanction à la transparence. Tout l’enjeu de la réforme fiscale projetée est donc de généraliser l’impôt et, ce faisant, de le rendre supportable en l’allégeant. «L’expérience a démontré que, chaque fois que la fiscalité est réformée, elle débouche sur une augmentation des recettes», explique M. Chami. La CGEM, qui milite pour l’élargissement de l’assiette, a justement quelques idées sur la façon d’y parvenir. Pour l’IGR, il s’agit de ramener le taux marginal de cet impôt de 44 % à 41,5 %, comme prévu en 2005.
Mais pour la CGEM, cette baisse du taux marginal de l’IGR reste insuffisante. «Le Maroc a un besoin impératif de créer une classe moyenne assez importante, il faut donc améliorer le pouvoir d’achat des citoyens», estime Hamad Kessal, président de la fédération PME-PMI de la CGEM. Pour cela, il est proposé non seulement de relever le seuil d’exonération pour le porter de 20 000 DH à 24 000 DH/an, mais également de réaménager les tranches de l’IGR. «Il n’est pas normal aujoud’hui qu’à partir de 6 000 DH un salarié soit imposé au taux maximum», juge le patron des patrons. «Nous souhaiterions que le taux maximum soit appliqué
à partir de 10 000 ou
12 000 DH», propose-t-il.
En complément de la réforme de l’IGR, la centrale patronale est convaincue que si l’on veut encourager la consommation, donc créer un vrai marché national, il y a lieu de réviser la TVA en supprimant la multiplicité des taux qui la caractérise, d’une part, et en en fixant le maximum à 12 %, d’autre part.
Concernant la patente, et ce n’est pas nouveau, la CGEM réclame la suppression pure et simple de cet impôt. «Payer un impôt parce que l’on a investi, c’est une aberration dans un pays qui a tant besoin d’investissements», s’insurge un chef d’entreprise.
Selon des sources patronales, la réforme de la fiscalité locale et de la TVA est justement sur les tablettes du gouvernement. Mais le manque à gagner pour le Trésor, sur le plan purement comptable, est tel (entre 700 millions et 3 milliards de DH, en y ajoutant la réforme de l’IGR) que beaucoup estiment improbable de voir ces réformes se concrétiser à moyen terme.
C’est précisément pour parer à cet argument du manque à gagner pour le budget que la CGEM veut coupler la réforme de la fiscalité à une nécessaire «normalisation» du secteur informel. Comme le dit Hassan Chami, «il faut absolument formaliser l’informel», et des pistes sont déjà explorées dans ce sens: défiscalisation totale pendant un certain temps, puis fiscalité allégée pendant 3 à 4 ans (c’est l’exemple de l’Italie), établir des passerelles entre le régime forfaitaire et le régime normal, etc. «Les idées ne manquent pas, il faut seulement de la volonté», conclut M. Chami
«Il n’est pas normal qu’aujourd’hui à partir de 6 000 DH de salaire on soit imposé au taux d’IGR maximal, il faut ramener ce seuil à
10 000 ou 12 000 DH».
Les PME réclament une hausse de la prime de panier
Une préoccupation majeure agite la fédération de la PME-PMI de la CGEM. La première concerne la prime de panier : afin de mettre un terme au spectacle désolant de travailleurs se restaurant à même le sol, sur les trottoirs, il est proposé de relever la prime de panier de 10 DH/jour, actuellement, à 30 DH.
Selon Yahia Zniber, vice-président de la fédération PME-PMI, il existe une incohérence entre la CNSS, qui accepte comme charge déductible la prime de panier à hauteur de 2 fois le SMIG horaire (c’est-à-dire environ 17 DH, avant la dernière augmentation du SMIG) et l’administration des impôts qui n’exonère cette prime qu’à hauteur de 10 DH. «Notre souhait est d’augmenter cette prime à 25 ou 30 DH, afin, d’une part, de faire accéder les salariés à une nourriture saine, et, d’autre part, de promouvoir les tickets restaurants et donc le métier de la restauration»