Affaires
Protection du consommateur : 30 000 plaintes déposées auprès des associations depuis 2011
Les télécommunications, le crédit à la consommation, l’agroalimentaire, l’eau et l’électricité et les assurances sont les secteurs les plus concernés. Le dispositif légal est incomplet ; un seul décret a été publié et neuf autres sont attendus.
Depuis l’entrée en vigueur, en mars 2011, de la loi 31-08 sur la protection des consommateurs, quelque 30 000 plaintes ont été enregistrées auprès des associations de consommateurs, particulièrement dans les villes de Casablanca, Oujda et Essaouira. Les litiges concernent, selon la Fédération nationale des associations de consommateurs (FNAC), les secteurs des télécommunications, le crédit à la consommation, l’agroalimentaire, l’eau et l’électricité et les assurances.
Les consommateurs mécontents ont dénoncé la qualité du service, les problèmes de facturation et de surfacturation, la qualité des produits ou encore l’absence d’information sur les clauses abusives des contrats. Jouant leur rôle de médiation, les associations saisies par les consommateurs ont intervenu pour résoudre, à l’amiable bien entendu, ces litiges. Le recours à la justice demeure aujourd’hui impossible en l’absence des textes d’application de la loi sur la protection des consommateurs. Seul le décret relatif à la constitution des associations de consommateurs est publié sur les neuf prévus, souligne Mohamed Benkaddour, président de la Fnac.
Les textes manquants concernent des aspects majeurs de la loi, notamment l’obligation générale d’information, l’étiquetage, l’usage de la langue arabe pour les contrats d’eau et d’électricité et des assurances. Sans ces textes, dit-on à la Fnac, les consommateurs ne peuvent faire valoir leurs droits et donc se protéger contre les clauses abusives et la mauvaise foi de certains fournisseurs de biens et services.
La fédération interpelle les pouvoirs publics «qui n’ont rien fait pour activer la publication des textes». Au Secrétariat général du gouvernement (SGG), il est précisé que cela se fera après leur traduction qui est actuellement en cours. Ce qui n’est pas pour plaire aux associations qui s’impatientent et craignent surtout que la loi 31-08 ne reste lettre morte.
Le Conseil marocain de la consommation n’a fonctionné que deux mois
Et ce n’est pas seulement l’absence des textes d’application qui inquiète la Fédération nationale des associations de consommateurs, mais aussi l’inactivité du Conseil marocain de la consommation (CMC). Cette instance créée en partenariat avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) est un mécanisme technique mis à la disposition des associations pour leur permettre d’apporter les éléments nécessaires en cas de litige. Concrètement, le conseil est chargé d’effectuer les tests et d’établir les preuves suite à la plainte déposée par un consommateur lésé. Ainsi, il doit vérifier la conformité de l’étiquetage aux spécificités des produits, qu’ils soient alimentaires, électroménagers ou autres. Le CMC est également chargé de mettre à la disposition des consommateurs une base de données juridiques (textes, informations, etc.) qui ont trait à la protection des consommateurs. Sa troisième mission consiste à alerter les associations à chaque fois qu’un produit ou une prestation de service ne respecte pas les normes requises et présente donc un risque pour les usagers et les consommateurs. «C’est en définitive un appui technique à l’action des associations qui fait malheureusement défaut et réduit la portée des actions des associations puisque celles-ci manquent parfois de preuves», dit-on au niveau des associations. Aujourd’hui, ce conseil, créé il y a cinq mois, n’a été fonctionnel que durant une période de deux mois. Il est inactif depuis la démission de son président.
Il faut aussi signaler que l’action du Conseil marocain de la consommation s’inscrit dans le cadre général que doit fixer le Conseil supérieur de la consommation qui se fait aussi attendre. Ce conseil doit définir la politique générale en matière de protection des consommateurs et surtout assurer une coordination avec les autres textes législatifs touchant à la sécurité des consommateurs et à la garantie de leurs droits.
Pour les associations des consommateurs, la mise en place d’une législation pour la protection des consommateurs est une démarche positive, car la signature par le Maroc de plusieurs accords de libre-échange et de partenariat avec de nombreux pays impose la mise à disposition des données nécessaires sur la nature des produits et leurs origines, afin de permettre aux consommateurs d’être mieux informés et de garantir le droit au choix et à la rétraction. Cependant, la fédération constate que le grand public n’est pas suffisamment, voire pas du tout, informé.
Une campagne de sensibilisation et d’information était programmée par le gouvernement d’Abbas El Fassi, mais elle n’a pas été lancée. Peut-être faudrait-il relancer ce projet et surtout accélérer la publication des textes applicatifs.