Affaires
Modernisation de l’Administration : sur 800 procédures répertoriées, 240 déjà simplifiées
Malgré les efforts fournis, la Banque mondiale note un problème d’application sur le terrain.
Les départements ministériels invités à s’impliquer davantage et à alimenter régulièrement le site «service-public.ma» bientôt relooké.
Un projet de décret pour institutionnaliser la commission nationale de simplification des procédures.

La modernisation de l’Administration, aux fins de la rendre plus efficace, proche des citoyens et, en même temps, d’assécher le terreau de la corruption, est une préoccupation du gouvernement depuis la fin des années 90. Un ministère est même dédié à cette cause : le ministère de la modernisation des secteurs publics (MMSP). Celui-ci ne s’occupe plus, comme par le passé, de gérer la carrière des fonctionnaires et agents de l’Etat, il a aussi pour charge de réformer l’Administration. Un des volets principaux de cette réforme porte sur la simplification des procédures ; une mission lourde pour qui connaît la complexité des circuits administratifs, l’inflation des règles à suivre et des papiers à fournir par les citoyens désireux d’obtenir un document ou d’entreprendre une action.
Qu’est-ce qui a été fait dans ce sens et que reste-t-il à faire ? Au début du mois de mai 2010, une équipe de la Banque mondiale, à la demande du MMSP, est venue au Maroc avec un double objectif : présenter les meilleures pratiques internationales en matière de simplification des procédures administratives et formuler des recommandations afin d’améliorer ce qui doit l’être.
Mais d’abord, quel bilan, quel constat de ce qui a été entrepris jusqu’ici ? Ahmed Laâmoumri, directeur de la modernisation de l’Administration au MMSP, rappelle que la Commission nationale de simplification des procédures administratives, instituée en 1999 et pilotée par le MMSP, a recensé plus de 800 procédures et en a simplifié plus de 240. «Pour l’année 2010, nous avons simplifié à ce jour 80 procédures sur un objectif de 100», indique M. Laâmoumri. Il précise que ces procédures concernent en particulier le registre du commerce, donc la création d’entreprise, en collaboration avec le ministère de la justice, mais pas seulement: «La simplification a concerné aussi le ministère de l’équipement et du transport, celui de l’agriculture, les retraités affiliés au RCAR (régime collectif d’allocation de retraite), etc.».
Par ailleurs, le MMSP, confie Ahmed Laâmoumri, a préparé un projet de décret visant à institutionnaliser la commission nationale et, ce faisant, inciter les départements ministériels à s’engager plus fortement dans cette bataille de simplification des procédures ; certaines administrations ou certains services demeurant encore farouchement jaloux de leurs «prérogatives» et donc manifestant une certaine réticence voire une certaine résistance à s’inscrire dans cette dynamique.
Les procédures administratives seront standardisées
Concernant le site «service-public.ma», qui fournit déjà une description de plus de 580 procédures, il sera relooké prochainement. La nouvelle version du site, actuellement en préparation, sera plus fonctionnelle et, surtout, interactive, afin de permettre aux départements ministériels de l’alimenter régulièrement et de l’actualiser.
Cependant, ce travail de simplification à l’échelle centrale ne trouve pas toujours de prolongement sur le terrain. C’est en tout cas le constat des principaux acteurs concernés (le MMSP et la commission nationale, notamment). Un constat relevé par les experts de la Banque mondiale eux aussi qui notent que «de nombreuses simplifications ont été réalisées au niveau de la commission nationale, mais leur application concrète au niveau de l’usager reste incertaine». Les usagers qui consultent «service-public.ma», par exemple, sont parfois, souvent même, surpris de constater que les procédures décrites dans ce site ne correspondent pas à la réalité qu’ils vivent sur le terrain. Cette distorsion entre ce qui est préconisé par les autorités centrales et ce qui est vécu par les usagers des services administratifs est expliquée par l’absence d’une base légale opposable aux fonctionnaires et agents qui ne se conforment pas aux procédures décrites dans «service-public.ma» ; ce site ayant pour l’instant une vocation simplement informative. La Banque mondiale a identifié comme principal obstacle à la simplification des procédures «l’absence d’instrument juridique de standardisation des procédures. Les procédures administratives au Maroc sont réglées par des sources juridiques hétérogènes qui peuvent combiner des textes légaux, réglementaires (décrets, arrêtés) ou infra-réglementaires». Et cela donne à l’Administration «une marge discrétionnaire relativement importante (…) pour imposer librement des exigences supplémentaires aux usagers», jugent les experts de la Banque mondiale. En particulier dans les services déconcentrés et décentralisés. D’où la principale recommandation de la banque qui porte sur la mise en place d’un «grand projet de standardisation» des procédures administratives, en transformant les procédures déjà recensées en formulaires officiels et certifiés. Ceci, bien sûr, en parallèle avec le travail du recensement et de simplification déjà engagé. Dure, dure la réforme de l’Administration…
