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Marrakech du Rire : les éclats du gala
Marrakech a célébré son 5e MDR du 10 au 14 juin. «La Vie éco» était au gala du samedi 13.

Se faufilant entre les dizaines de spectateurs qui s’acheminent lentement vers l’entrée du Palais Badii, un jeune étranger arrive vers une bande hilare, en annonçant avoir trouvé des billets au noir pour le spectacle: 3 000 dirhams par personne. On rit beaucoup moins du coup! Les autres spectateurs ont, quant à eux, acheté ou reçu en cadeau leur ticket à 600 dirhams.
L’éternel cliché
3 000 personnes, pour cette seule soirée du 13 juin, remplissent les gradins du Palais El Badii aménagé pour l’occasion. Une sacrée artillerie est déployée pour l’occasion, car le show est amené à être diffusé sur 2M, M6 et TV5 monde. Bien rodé, le spectacle, même avec un Jamel nerveux, à la limite de l’irritabilité, dont le sens de l’improvisation semble parfois dégénérer en émission de piques qui ne font pas que des morts de rire…
Si l’on s’attend à un défilé de jeunes humoristes, triés sur le volet par leur mentor Jamel Debbouze, l’on se demande si la domination des Maghrébins est un choix stratégique de l’artiste. Non que les talents présentés ne sont pas à la hauteur. Loin s’en faut… Mais l’on note une certaine redondance des clichés dans les différents shows. Il s’agit presque toujours de la sempiternelle comparaison entre la famille maghrébine et la famille «blanche», malgré la différence des situations, avouons-le, fort drôles pour la plupart. Et s’il est légitime de caricaturer son propre vécu et si l’autodérision est un ingrédient qui marche, on se demande tout de même si cela ne trahit tout simplement pas une certaine crise d’imagination chez les humoristes maghrébins.
Seul artiste qui y échappe, Redouanne Harjane, qui, lui, empreinte la voie délicate de l’humour noir et semble s’en sortir sous le regard très fier de Debbouze.
La gêne de Semoun
Parmi les shows attendus du gala du MDR, celui d’Élie Semoun semble avoir déçu. En témoigne l’assourdissant silence du public présent. Est-ce un sujet peu adapté au Marrakech du rire que de traiter de racisme primaire d’un maire français et de ses conseillers municipaux? Aucun rire, ni commentaire aux vannes sur les «bougnoules de bougnoulie», des juifs, ou des Noirs. Pourtant l’humoriste se veut messager de paix et de vivre-ensemble. «Les humoristes sont aussi là pour crever l’abcès», explique-t-il à un journaliste de 20 Minutes. Une gêne plane sur la scène au point qu’encouragé par Jamel, Élie finit par préciser que le sketch n’est pas vrai (qui l’eût cru), qu’il est originaire de Taza et donc Tazi et non pas Nazi : toujours pas de retour du public… Quoi qu’il en soit, on ne retrouve pas le Semoun qui cartonne dans les années 1990 et début des années 2000 et qui se fait de toutes les soirées télévisées et comédies du grand écran. À celui-là, on souhaite un prompt retour !
Chut… on coupe!
Juste pour rappel, ce que vous ne verrez pas dans la retransmission à 2M, vous pouvez le rattraper sur M6 ou TV5 monde. Car bien qu’il n’y ait pas eu de scènes «obscènes» ou de tenue indécente, les humoristes ne se sont pas gênés à balancer des blagues crues et des jeux de mots salaces : «Tu as déjà vu un pingouin bander?», lance Arnaud Tsamere, déguisé en pingouin bandé. La jolie algérienne Nawell Madani parle de boules anti-stress… en décrivant des hommes qui se caressent les parties intimes sous leurs djellabas. Des petites blagues inoffensives qui se transforment en moments d’anthologie pour les spectateurs marocains au vu de l’actuel excès de zèle du censeur.
