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L’industrie de la brique accuse une baisse d’activité de 20% depuis le début de l’année
Les stocks s’accumulent chez les producteurs qui bradent leurs prix pour pouvoir les écouler. En cause, une surcapacité de production devenue structurelle et évaluée à 15% par les professionnels. La hausse des prix du carburant causera un surcoût annuel de 6 MDH pour une usine moyenne de briques.

La descente aux enfers se poursuit pour le marché de la brique. L’activité du secteur accuse une baisse de 20% depuis le début de l’année, selon les professionnels. Elle est grevée par un ralentissement de la production du fait d’une surcapacité devenue structurelle au sein de la filière, doublée d’une fluctuation inédite des prix. «La demande est certes là, alimentée en grande partie par les projets de logements sociaux, mais elle ne suffit pas à absorber l’offre présente en quantité», explicite Mohamed Kassou, président de l’Association professionnelle des briquetiers.
A vrai dire, «il y a plus de deux ans que le secteur est tombé dans une situation de surcapacité, avec la mise en service de plusieurs unités pouvant produire 1 000 tonnes par jour (ndlr : une unité moyenne produit 500 t/jour) notamment à Berrechid, ce qui a pratiquement fait doubler la production en quelques années», rappelle Mohamed Badad, directeur délégué au sein de la Fédération marocaine des industries des matériaux de construction (FMC).
Pour leur part, les experts avaient averti depuis plusieurs années des menaces de surcapacité sur la filière. A l’instar des professionnels, ils justifient cette situation par la mise en route de nouveaux fours et de tunnels en remplacement d’anciennes installations. Mais ils invoquent des circuits de distribution loin d’être optimaux et la non-fermeture des anciens fours pour justifier une surproduction régionale inévitable. Quoi qu’il en soit, la surproduction évaluée par les professionnels dépasse actuellement les 15%. Résultat : les stocks s’accumulent chez les producteurs. Et comme les possibilités de stockage de la brique sont limitées à un mois, en raison du caractère de ce matériau très consommateur en espace, plusieurs briquetiers ont été contraints de casser les prix, causant une grande instabilité sur le marché.
Le secteur compte 130 unités en activité, dont moins de 40 qui sont qualifiées d’industrielles
En chiffres, les tarifs de la brique de 7 cm d’épaisseur qui représente 70 à 80% de la demande sur le marché ont démarré l’année à 2 DH l’unité. Ils ont chuté ensuite à 1 DH, pour se reprendre à 1,50 DH ces derniers jours en raison d’un léger sursaut de la demande. Plus encore, dans la conjoncture actuelle, les prix dans certaines régions se font encore plus instables. A Nador, par exemple, le tarif de la brique peut varier de 0,60 DH à 1,20 DH en très peu de temps, selon le dynamisme de la demande, fait savoir un briquetier à Rabat. Il faut dire que le Nord (notamment Nador, Tétouan et Tanger) qui rassemble plus de la moitié de l’ensemble des unités opérationnelles est aussi caractérisé par une prédominance des unités informelles dont l’activité est la plus fluctuante. De manière générale, l’informel représente 30% du secteur de l’avis de plusieurs professionnels.
Mais il faut dire qu’outre la surproduction structurelle, et son corollaire de déstockage, d’autres facteurs ont grevé l’activité de production des briquetiers récemment. Les professionnels évoquent surtout la hausse des prix du carburant qui aggrave leurs coûts à plusieurs chaînons de leur cycle de production, les contraignant à réduire la cadence au niveau de leurs usines. «Que ce soit pour transporter la matière première des carrières aux sites de production, ou pour alimenter l’outillage industriel en combustibles, ou encore pour distribuer le produit fini, les besoins en énergie de l’industrie de la briqueterie sont conséquents», fait savoir M. Badad. En règle générale, le coût énergétique représente environ 38% du coût de revient d’une brique selon les estimations des professionnels.
Cette part devrait même être revue à la hausse lorsqu’on sait par exemple que dans les conditions actuelles du marché, le transport de la brique intervient sur une distance de 200, voire 300 ou 400 kilomètres, alors qu’en règle générale le périmètre ne dépasse pas la centaine de kilomètres. En tout, selon les estimations de l’Association des briquetiers, la hausse du prix du carburant génère un surcoût de 500 000 DH par mois, soit 6 MDH par an pour une usine moyenne dotée d’une capacité de production de 500 tonnes par jour. Mais, nuance importante, ces éléments ne s’appliquent qu’aux unités pouvant être qualifiées d’industrielles, soit moins d’une quarantaine d’usines sur les 130 unités en activité.
