Affaires
Les salariés de l’usine Renault Tanger haussent le ton
Plus de 3 000 employés ont rejoint les rangs de l’UMT. Un cahier de revendications comprenant 14 points a été présenté à la direction générale. Des rencontres mensuelles entre la direction et le syndicat sont programmées.
La production de l’usine Renault-Nissan Tanger a dépassé cette année le cap des 100 000 véhicules. Ce constructeur français, qui vient d’inaugurer en octobre dernier la deuxième chaîne de son unité de production située à Melloussa, moyennant un investissement de 4,5 milliards de DH, table sur une production de 200000 véhicules en 2014. En clair, il y a une montée en puissance qui, le moins qu’on puisse dire, est bénéfique pour l’industrie nationale. Mais quand tout va pour le mieux dans une entreprise, les salariés ne s’empêchent jamais de demander une amélioration de leur situation financière. Le groupe français n’a pas échappé à cette règle. Un port de brassard a été évité de justesse, il y a quelques jours, suite à une médiation du gouverneur de Tanger.
Il faut dire que la tension avait commencé à monter en juin 2012. C’est à cette date que les travailleurs de Renault ont décidé de prendre leur destin en main en rejoignant les rangs de l’Union marocaine du travail (UMT). Cette intégration avait comme premier objectif la constitution d’une base solide pour négocier l’amélioration des salaires. «Lors du recrutement, le management nous a fait beaucoup de promesses qui n’ont pas été tenues», explique un représentant du bureau syndical de Renault. Contactée à ce sujet, la direction communication du constructeur n’a pas donné suite à notre demande. Toujours selon le syndicaliste, «la moyenne des salaires s’établit à 2 800 DH nets pour les ouvriers, et à 5 100 DH pour les employés, ce qui est dérisoire. Pis, pour cette deuxième catégorie la fourchette de rémunération varie de 4 000 DH à 12 000 DH». En d’autres termes, «pour deux employés à compétences égales et postes similaires, nous observons un grand écart», déplore-t-il. Un manque d’équité qui, à leur regard, est accentué par le système d’augmentation annuelle constitué de deux tranches. La première consiste en une augmentation générale de 2% accordée par la direction générale.
La direction disposée à négocier
La deuxième, quant à elle, est fixée à 4%, et son attribution laissée à la discrétion des chefs de service. «Au moment de l’évaluation de leurs subordonnés, ces derniers se basent souvent sur des critères autres que la compétence et la discipline», avance le délégué. Et de renchérir : «A cause de ce système, plus de 90% des salariés n’ont pas bénéficié de cette augmentation au titre de l’exercice écoulé». L’accès au système de retraite et à l’assurance maladie complémentaire figure également parmi la liste des doléances des travailleurs.
Ces revendications et bien d’autres sont à l’ordre du jour des négociations mensuelles engagées par l’UMT.
«Depuis le 4 juillet 2012, nous nous réunissons chaque premier jeudi du mois avec la direction dans l’objectif de trouver un terrain d’entente, mais en vain», déplore le délégué. Du coup, pour bien formaliser la démarche, un cahier de revendications a été présenté à la direction générale en avril 2013. «Ce document a été rejeté sous prétexte que nous n’avons pas la légitimité pour représenter le personnel de Renault», ajoute le représentant du personnel. Pour couper court aux arguments de la direction, l’élection des délégués du personnel a été organisée les 17 et 18 juillet 2013. «L’UMT a remporté la totalité des sièges», déclare non sans fierté Miloudi Moukharik, secrétaire général de l’UMT, avant d’ajouter qu’«à travers ce choix, les salariés de Renault ont voulu éviter tout pluralisme syndical qui risque de créer un effet de surenchères». Soutenus par plus de 3 000 employés, les délégués ont donc relancé les négociations en septembre. Relativement favorable aux négociations, la direction générale soumet à son tour un protocole d’accord. «Le contenu du protocole n’était pas à la hauteur des espérances des salariés. Nous avons alors déposé une contre-proposition qui n’a pas eu de suite», confie notre source.
Une prime de logement de 150 DH par mois promise
Après plusieurs semaines d’attente, les délégués décident, le 26 octobre, de passer à l’offensive et cela en accordant un délai de 3 jours avant le port du brassard. «Suite à cette décision nous avons reçu, le soir du 29, soit quelques heures avant le port du brassard, un appel de la part du gouverneur de Tanger qui nous a invités à nous réunir avec les représentants de la direction la soirée même dans les locaux de la wilaya», relate le délégué. Lors de cette séance de médiation, les deux parties sont parvenues à fixer un programme de réunions afin de trouver une issue, d’ici à fin novembre.
A ce jour, «nous avons pu trouver des solutions pour certaines revendications», confirme le représentant de l’UMT. Il s’agit principalement de l’accès au système de retraite. A ce niveau, les deux parties prévoient de créer une «caisse de solidarité sociale». Le financement de cette dernière sera prise en chage en partie par l’entreprise. Le reste sera couvert par des prélèvements sur les salaires.
Un deuxième point vient également d’être réglé, c’est celui des primes de logement. En effet, la direction s’est engagée à verser désormais 150 DH comme indemnité mensuelle de logement. En revanche, toutes ces promesses ne seront honorées que d’ici fin 2014. Conjoncture oblige, selon les représentants du personnel, la direction a déclaré ne pas avoir de budget suffisant pour financer ce projet social. A suivre…