Affaires
Les producteurs de contreplaqué menacés par les importations d’Egypte
Les expéditions en provenance d’Egypte ont augmenté de 85% en 2013. Cema Bois de l’Atlas, principal producteur de contreplaqué, estime que l’origine de ces importations est la Chine, dont les produits sont déjà frappés d’un droit antidumping. L’entreprise a introduit une requête auprès du ministère de l’industrie pour l’application d’une autre mesure antidumping contre les produits égyptiens.
Chassé par la porte, le contreplaqué chinois semble revenir par la fenêtre. Depuis l’application par le ministère de l’industrie d’un droit antidumping de 25% sur les importations de bois contreplaqué en provenance de Chine, en août 2012, les expéditions de ce produit vers le Maroc ont bien reculé. Le volume acheminé vers le marché national a en effet baissé de 44% entre 2012 et 2013, passant de 8 895 m3 à 4945 m3. Seulement, dans le même intervalle, les importations de contreplaqué en provenance d’Egypte sont montées en flèche.
Elles sont passées de 3 244 m3 à 6 000 m3, soit une augmentation de 85%. «Ces volumes correspondent en réalité au contreplaqué chinois qui n’est que transbordé par l’Egypte», certifie Ali Fassi Fihri, directeur général de Cema Bois de l’Atlas (Groupe Amrani), le principal producteur national de contreplaqué. «Nous avons pu établir, sur la base d’investigations sur place, que l’Egypte ne fait qu’apposer son certificat d’origine sur des produits chinois, ce qui est bien évidemment contraire à la loi», précise le directeur.
Cema Bois de l’Atlas a déjà dénoncé cette pratique auprès de la douane il y a quelques mois. Mais en l’absence d’une réglementation nationale contre le détournement des règles d’origine, l’administration se retrouve les mains liées, soutient le management de l’entreprise. Celle-ci s’est donc tournée depuis quelque peu vers le ministère de l’industrie pour demander l’application d’un droit antidumping contre les importations en provenance d’Egypte, en fournissant un ensemble de preuves.
La requête de Cema vise indirectement à contrer les produits chinois, mais également le panneau latté de fabrication égyptienne qui fait l’objet de dumping, selon les conclusions de l’entreprise.
En attendant de connaître la suite que donnera le ministère de l’industrie à cette requête, Cema Bois de l’Atlas boucle une année 2013 difficile. Son chiffre d’affaires baisse de plus de 15%, à près de 460 MDH. Le contreplaqué qui générait 80% de l’activité de l’entreprise n’en représente plus actuellement que 60%.
Frappé de surcroît par un redressement fiscal, l’industriel dégage au final un déficit de 50 MDH. A vrai dire, sur ses 5 derniers exercices, Cema n’a réalisé qu’une seule année bénéficiaire, 2010, et encore celle-ci a pu être sauvée grâce à une opération non récurrente de cession d’un terrain. C’est que l’opérateur connaît une série noire depuis 2009. Cette dernière année a été marquée par un conflit social qui a perturbé son activité. Par la suite, la demande étrangère de Cema s’est contractée dans le contexte de crise international.
L’interdiction d’exportation de bois brut national, entrée en vigueur en 2010, est venue enfoncer le clou pour l’entreprise qui acheminait de la matière première vers l’étranger. Plus récemment, la concurrence accrue sur le contreplaqué, cœur de métier de Cema, et son remplacement progressif sur le marché national par des produits alternatifs (MDF, panneaux de particules…) est venu aggraver la situation.
Mais l’entreprise prépare la riposte.
Elle a réalisé en 2013 une augmentation de capital de 200 MDH (les capitaux propres sont établis à 743 MDH à fin 2012). Ces ressources devraient servir à développer l’outil industriel afin de permettre à Cema de se lancer dans de nouvelles activités. Dans le viseur de l’entreprise, la fabrication de kits de cuisine et de meubles à base de panneaux de particules, des intrants qu’elle produit déjà.
Ces nouveaux produits devraient être commercialisés auprès des promoteurs immobiliers et des revendeurs. L’incursion de Cema sur ce nouveau marché est facilitée par l’application de la taxe forestière de 12% aux produits finis en bois importés introduite par la Loi de finances 2012. Ce prélèvement, qui ne s’appliquait jusqu’alors qu’à la matière première transformée au Maroc, renforce la compétitivité des prod uits locaux finis en bois.
