Affaires
Les patrons marocains reprennent confiance
Les résultats du dernier baromètre de conjoncture réalisé par l’Institut français l’IFOP pour le compte de la CGEM. 38% des patrons se déclarent toujours inquiets. Ils étaient 58% en mars 2010.

Le moral des patrons marocains est meilleur qu’il y a un an. C’est en tout cas ce qui se dégage du dernier baromètre de conjoncture des entreprises marocaines, daté de février 2011 et réalisé par l’Institut français IFOP pour le compte de la Fondation CGEM , sur la base d’un échantillon de 602 dirigeants d’entreprises sondés entre le 26 janvier et le 7 février 2011.
Ce baromètre montre que l’appréhension des patrons marocains face à la crise est en train de s’apaiser puisqu’ils ne sont plus que 38% à être inquiets, alors qu’ils étaient 48%, il y a 6 mois, et 58%, en mars 2010. Toutefois, ce regain d’optimisme n’a pas la même intensité dans tous les secteurs sachant qu’ils sont encore 50% à se déclarer toujours inquiets dans le commerce et 44% dans le BTP. Le même constat vaut pour les régions : 47% des patrons sont toujours inquiets dans la région de Tanger-Tétouan, 45% dans l’Oriental, à Fès et Meknès et 44% dans le Gharb.
D’après l’enquête, 27% des patrons pronostiquent une amélioration de l’activité économique dans les six prochains mois, alors que 37% pensent qu’il n’y aura pas d’amélioration avant 2012 et 20% des dirigeants sondés pas avant le deuxième semestre 2012, ce qui montre qu’une partie non négligeable des patrons doute d’une reprise immédiate de l’activité.
D’où vient l’inquiétude de ces patrons, même si on considère qu’elle se dissipe par rapport aux mois précédents? D’abord, de la concurrence déloyale. Ils sont 34% à s’estimer menacés par ce phénomène. Menace qui est plus accentuée chez les commerçants (39%) et dans certaines régions frontalières comme Al Hoceima et Taza et même dans de grandes villes comme Fès et Meknès (39%).
L’aggravation de la situation économique inquiète 24% des dirigeants d’entreprises contre 22% en août 2010. Ce taux monte à 30% dans le secteur du transport et, d’une manière générale, il se situe à 31% pour les entreprises employant entre 50 et 249 salariés. En dehors de ces deux menaces, les sources d’inquiétude demeurent dans une moindre mesure le resserrement du crédit pour 12% des entrepreneurs, la baisse du carnet de commandes pour 11% et les problèmes liés au secteur d’activité (4%).
Autre souci qui hante les patrons et qui modère leur optimisme : l’avancée de l’informel. En effet, 37% des patrons interrogés estiment que l’économie informelle s’est accrue au cours des deux dernières années. Pour 22% des sondés, l’informel avance à cause du taux de la TVA, pour 20% en raison de l’impôt sur les sociétés et pour 17% à cause du niveau des charges sociales. L’impôt sur le revenu (IR) est cité par 12% seulement des interrogés comme responsable de l’informel.
Quoi qu’il en soit et en tenant compte du contexte économique actuel, 88% des patrons sont optimistes pour leur entreprise, 89% pour le secteur d’activité où ils exercent et 87% pour le climat général des affaires. Un tel niveau, soulignent les enquêteurs, n’a jamais été observé auparavant.
Dans la foulée, plus des 2/3 des entrepreneurs, soit 69%, pensent que le chiffre d’affaires de leur secteur devait augmenter en 2010 contre à peine 50%, lors du sondage d’août 2010. Ce sont les patrons dans l’agriculture, les BTP et le transport qui sont les plus catégoriques à ce sujet.
D’autre part, 36% des entrepreneurs pensent que la situation économique est meilleure dans le secteur où ils exercent contre 18% qui jugent qu’elle est moins bonne que dans les autres secteurs.
53% des patrons envisagent d’investir dans les trois prochains mois
Selon 55% des personnes interrogées, la santé financière des entreprises devra donc s’améliorer durant les trois prochains mois et restera stable pour 41%. Seulement 3% d’entre elles prévoient une détérioration.
Le même optimisme est affiché quand il s’agit pour les patrons d’avancer un pronostic sur le chiffre d’affaires en 2011, et ils sont 72% à anticiper une hausse du chiffre d’affaires et cette augmentation serait en moyenne de plus de 6%, sachant que pour cette estimation, plus de la moitié (55 %) des entreprises déclarent n’avoir aucune commande privée ou marché public.
Pour anticiper ou accompagner cette reprise, 53% des patrons sondés ont décidé d’investir au cours des trois prochains mois, soit une hausse de 10 points par rapport au dernier sondage d’août 2010. Les entreprises les plus engagées dans cette dynamique emploient 250 personnes et plus (72% de oui) et exercent généralement dans les BTP (61% de oui). Sur le plan géographique, c’est à Taza-Al Hoceima, dans l’Oriental, à Fès et Meknès qu’on obtient le plus grand nombre de réponses positives avec 63%.
Toujours dans le même groupe d’entreprises décidées à investir, 42% des patrons déclarent qu’ils vont consacrer plus de 500 000 DH à leurs projets, 18% entre 200000 et 500000 DH, 16% entre 100000 et 200 000 DH et 19% moins de 100000 DH.
En revanche, ceux qui n’ont pas l’intention d’investir dans les trois prochains mois (43%) justifient leur décision par des investissements antérieurs (62%), l’absence de nécessité de le faire à court terme (56%), la conjoncture actuelle (48%) ou encore par le refus des banques de leur accorder des crédits (13%).
Interrogés sur la fiscalité en vigueur, un dirigeant d’entreprise sur deux déclare la nécessité de voir la TVA réformée en priorité avant l’IS (24%), l’IR (17%) et les taxes locales (7%).
Pour la TVA, les entreprises de moins de 10 salariés sont en première ligne (57% l’ont citée en premier). La même proportion est enregistrée dans l’agriculture. Quant à l’IS, il gêne davantage les industriels du textile (44%) et les opérateurs de Taza-Al Hoceima, Fès, Meknès et de l’Oriental (29%). Toujours est-il que les opérateurs sont un peu moins obnubilés par cet impôt considéré comme une priorité dans 29 %, il y a 6 mois.
Enfin, s’agissant de l’emploi, 63% des patrons interrogés déclarent que le nombre de salariés dans leur entreprise est resté stable au cours des deniers mois, 28% ont vu cet effectif augmenter, particulièrement dans les services (33%), les entreprises de 250 salariés et plus (41%) et dans la région Tanger-Tétouan (37%). Dans les trois prochains mois, 38% de l’échantillon pensent recruter contre 27% en août 2010. Ces intentions sont plus marquées dans les entreprises de 50 à 249 salariés (45%) et, sur le plan sectoriel, au sein des BTP (46%). Contrairement à août 2010, ils ne sont plus que 4% à envisager une baisse de leurs effectifs.
L’insuffisance de compétences techniques est le principal défaut des candidats à l’emploi
Pour ceux qui ont eu à embaucher ou qui cherchent des collaborateurs, le marché s’avère moins fluide. En effet, 44% des patrons, au lieu de 42% précédemment, éprouvent des difficultés à trouver la bonne personne. Ce problème se pose généralement dans le textile (49%). La dernière initiative de l’Amith, en partenariat avec l’Office de la formation professionnelle et de la promotion du travail (OFPPT) et l’Agence nationale pour la promotion de l’emploi et des compétences (Anapec), de former 20 000 jeunes, dont 10 000 dans l’immédiat, montre à quel point ce secteur manque de compétences. Et l’enquête révèle que 53 % des patrons de sociétés de services sont dans le même cas, même si aucune requête publique pour palier le déficit n’est formulée. Il est aussi difficile de recruter dans les régions de Marrakech et Tadla-Azilal (57% de oui) tout comme dans le Souss et dans les provinces sahariennes (32%).
Les entraves au recrutement sont nombreuses. Naturellement, le fond du problème réside dans l’inadéquation entre la formation et l’emploi quand bien même 66 % de l’échantillon considèrent que la formation dispensée dans les écoles est très bonne (11%) ou assez bonne (55%). Les organismes de formation professionnelle sont jugés très bons par 15 % des patrons, alors que 50% leur attribuent la mention assez bien. Quant à la formation des universités, elle est notée très bien par 8% des sondés et assez bien par 41%.
Les compétences techniques citées dans 87% des cas constituent le principal écueil dans le processus de recrutement. Suivent la connaissance du marché ou du secteur (63%), les compétences relationnelles ( 57%), les compétences commerciales (55%), les compétences managériales (55%) et les compétences linguistiques (45%).
