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Les marges des promoteurs immobiliers résistent à la baisse des prix
Les marges nettes atteignent 25% dans le social et 50% dans le moyen standing. Outre la baisse des prix, la profession affirme pâtir de la rareté du foncier et du renchérissement des coûts des intrants de la main-d’œuvre. Les cycles d’exploitation sont plus longs.

Jamais un secteur n’a suscité autant de critiques, au cours de ces dernières années, que celui de la promotion immobilière à cause d’une rentabilité élevée sans lien avec la qualité du bâti. Aujourd’hui, nombre de promoteurs se plaignent de l’érosion des marges, tous segments confondus, comparativement à leur niveau d’antan. Il se trouve néanmoisn qu’elles demeurent intéressantes. De plus de 70% dans le segment social lors du lancement du dispositif, la marge nette s’affiche actuellement au minimum à 15% dans certaines villes et peut monter à 25% dans d’autres, rapportent des professionnels. Le resserrement est évident, mais très peu d’activités peuvent dégager un tel niveau de rentabilité. Ce constat s’applique principalement aux zones comme l’axe Kénitra-El Jadida. En revanche, à Tanger ou à Fès où l’offre dépasse la demande, les marges réalisées sont inférieures. Il y a toutefois une nuance à faire: «Les promoteurs qui ont constitué une réserve foncière du temps où les prix des terrains étaient bas peuvent dégager des marges supérieures à 40%», assure un promoteur. Il faut dire que la rareté du foncier, conjuguée à la hausse des coûts des intrants et de la main-d’œuvre ont fortement pesé sur les marges.
Le foncier pour le logement social peut atteindre 1 800 DH/m2 à Casablanca
L’extension des délais de réalisation (de l’acquisition du terrain à la commercialisation des biens construits) et l’accentuation de la concurrence, qui conduit les promoteurs à offrir des prestations plus attrayantes, ont aussi fait monter les coûts.
A Casablanca et Rabat, il devient presque impossible de se procurer un terrain pour le logement social à moins de 1000 DH/m2… Et encore, ce dernier se situe généralement en périphérie. Au centre —s’il y en a toujours—, il faut compter au moins 1 800DH/m2.
Pour mesurer l’impact des facteurs précités sur les marges dans le logement social, prenons l’exemple d’un appartement de 65 m2 pour lequel la part du foncier est estimée à 1 000 DH/m2, soit 65000 DH. En fait, la surface nette construite est autour de 50 m2. C’est en prenant en compte les distributions horizontales et verticales qu’elle atteint 65 m2 environ. A cela s’ajoute le coût de la viabilisation de 25 000 DH l’unité, qui comprend le raccordement aux réseaux d’assainissement, de conduites d’eau pluviale, d’électrification et de téléphonie, en plus des voiries et des plantations. Le coût de la construction, lui, est autour de 2 000 DH/m2, soit 130 000 DH l’appartement. En y additionnant 15 000 DH par appartement pour les frais d’ingénierie, les charges fixes de l’administration et l’investissement dans la communication & publicité, le coût global d’un logement social s’établit à 235000 DH. Pour un prix de vente de 290 000 DH, comprenant un remboursement de TVA de 40 000 DH, la marge nette peut atteindre 55 000 DH, soit 19%. En prenant en compte les mêmes charges, mais avec un impact foncier de 1 200 DH/m2, la marge nette tombe à 14%.
Les promoteurs plus rationnels dans la détermination des prix de vente
Dans le moyen standing, un autre élément vient jouer un rôle important dans la rentabilité des promoteurs, en plus du facteur terrain : le prix de vente moyen par zone. «Actuellement, les promoteurs réalisent des études de marché pour s’enquérir du prix psychologique qu’un acquéreur potentiel (hors segment économique et social) est prêt à payer, avant d’établir leurs business plans et d’entamer leurs projets», explique un professionnel du secteur. Ce qui n’était pas forcément le cas avant, puisque les promoteurs achetaient des terrains, construisaient et vendaient au prix souhaité, tout en assurant leur marge. Mais même en composant avec cette nouvelle donne, la marge peut varier de 30% à 50%.
Pour illustrer, prenons le cas d’un terrain de 1 500 DH/m2 pour un bien de 80 m2 nets, incluant un double salon, 2 pièces, une salle de bains et un débarras, soit 95 m2, parties communes comprises. Le coût du foncier totalise alors 142 500 DH pour un appartement. A ce prix s’ajoute le coût de la viabilisation de près de 50000 DH l’appartement, de la construction de 332 500 DH, à raison de 3 800 DH/m2, ainsi que diverses charges (ingénierie, taxes…) pour 50000 DH. Notons que le coût de construction peut commencer à 3 000 DH et aller crescendo en fonction de la qualité souhaitée. Et c’est sur ce dernier critère que les promoteurs se distinguent. S’ils ne lésinent pas sur les moyens au niveau de la sécurité, ils se différencient sur le plan de la finition. Du coup, le coût de revient d’un bien immobilier de moyen standing peut s’élever à 623 500 DH. Supposons aussi que le prix de vente moyen atteigne 12 000 DH/m2, soit 960 000 DH. Le promoteur réalise alors un gain de 336500 DH, soit une marge nette d’impôt de près de 30%.
Il faut souligner que les marges les plus importantes sont réalisées dans le haut standing. Ceci tient au fait que les coûts du terrain, de la viabilisation et de la construction sont plus ou moins similaires à ceux du moyen standing, alors que les prix de vente sont plus élevés en mettant en avant la qualité des matériaux utilisés…
