Affaires
Les hôtels misent sur le réveillon mais restent dans le flou pour 2009
Temps difficile pour la profession : décembre a été creux et ils craignent une fin d’année atone. Les professionnels sont divisés sur l’impact des réservations de dernière minute.

Les hôteliers font grise mine. Pour beaucoup, décembre est loin d’être satisfaisant et l’incertitude demeure quant au taux de remplissage pour les fêtes de fin d’année. «Le creux des réservations que nous connaissons pour la période jusqu’au 25 décembre 2008 a tendance à s’accentuer et l’on est loin du niveau de l’année dernière», souligne le directeur d’une grande chaîne. Cette affirmation est corroborée par Jean Jacques Boucher, DG de Fram au Maroc. «J’ai l’impression, dit-il, que nous commençons à recevoir de plein fouet les effets de la crise qui sévit en Europe, et contrairement aux années précédentes, on ne peut pas compter sur les ventes de dernière minute pour combler le déficit». M. Boucher bat aussi en brèche l’idée selon laquelle une destination comme le Maroc profitera, en raison de la proximité avec les marchés émetteurs, de l’annulation des voyages long courrier ou de leur report. En effet, selon nombre d’observateurs du monde du voyage, la tendance actuelle est au «voyage de proximité, sur une courte période, et à moindre frais». Du coup, les destinations lointaines, d’habitude demandées durant cette saison d’hiver, sont nettement en déclin. C’est vrai, reconnaît le patron de Fram, «mais pas pour toutes les destinations, car, en cette période de l’année aussi, les vols low cost ne le sont pas vraiment», tempère-t-il.
En d’autres termes, les sièges d’avions commercialisés par les compagnies low cost à des prix bas ont été vendus depuis longtemps, et de toutes les manières, ils ne représentent pas plus de 10% de la capacité d’un avion. Ceci est du reste aisément vérifiable quand on essaie de réserver par le biais d’Internet puisque, sur la majorité des sites des compagnies aériennes, les sièges sont soit complets, soit vendus à des prix inabordables, au-delà de 500 euros, par exemple, au départ des aéroports français ou belges vers les aéroports marocains. Et plus on se rapproche du 31 décembre, plus les prix des billets sont élevés.
Il n’y a plus de convergence d’intérêts entre les compagnies aériennes et les hôteliers
Mais, malgré cette conjoncture difficile, certains groupes hôteliers comme Accor restent sereins et considèrent qu’il n’y a pas péril en la demeure. Ils tablent précisément sur les fêtes de fin d’année pour terminer 2008 sur une note plus optimiste. Marc Thépot, DG d’Accor Maroc, tout en confirmant la faiblesse des ventes pour les premières semaines de décembre, annonce une bonne remontée pour les fêtes de fin d’année, que ce soit à Casablanca, Marrakech ou Agadir, grâce à la clientèle étrangère mais aussi marocaine. Cette dernière prend, en effet, de plus en plus d’importance auprès des hôteliers.
Le DG d’Accor Maroc souligne cependant que la grande inconnue reste l’évolution du marché durant les premiers mois de 2009. Cependant, contrairement à Jean Jacques Boucher de Fram, Marc Thépot croit, lui, au transfert vers le Maroc d’une clientèle européenne qui renonce aux destinations lointaines. «Le Maroc reste une destination qui a des atouts et peut tirer profit de cette conjoncture», analyse-t-il. Quoi qu’il en soit, fait remarquer un autre hôtelier, il n’y a plus vraiment convergence d’intérêt entre les compagnies aériennes et les hôteliers, car le monde du tourisme est devenu de plus en plus concurrentiel et ce sont les plus forts, c’est-à-dire les plus organisés, qui résistent. Et de poursuivre: «Il ne faut pas se leurrer, les compagnies aériennes ne sont pas les seules à user de techniques de vente pour augmenter leur chiffre d’affaires, les hôtels en font autant, et ne dévoilent pas toujours leurs cartes». Ainsi, selon un spécialiste, les hôtels structurés sont en train d’adopter de nouvelles approches comme le «yield management» ou «revenue management» qui peut se traduire par une augmentation du chiffre d’affaires allant jusqu’à 25 %. De quoi s’agit-il ? De ne pas seulement vendre des chambres, mais de les vendre «bien» en adoptant des prix variables selon la durée de séjour et la période de réservation. Ainsi, il arrive qu’un hôtel, même vide, propose à un client une suite à un prix intéressant pour ce dernier, en prétextant qu’il n’a plus de chambres libres. Même à ce prix, la suite restera plus chère qu’une chambre simple. En tout état de cause, si les hôteliers, selon leur niveau d’organisation et leur force de frappe marketing, gardent plus ou moins espoir pour les fêtes de fin d’année, ils sont unanimes concernant la suite : pas de visibilité pour le premier trimestre 2009.
