Affaires
Les finances publiques se redressent, les comptes extérieurs se dégradent
Le solde budgétaire en janvier a dégagé un excédent de 2,4 milliards de DH. Mouvance inverse sur le front extérieur avec une aggravation du déficit commercial. Tous les flux financiers sont en baisse sur les deux premiers mois de l’année.

En ce début de 2014, les finances publiques et les finances extérieures semblent emprunter des chemins opposés. Dans le premier cas, on observe une amélioration, tout au moins sur le premier mois de l’exercice (les données pour février n’étant pas encore publiées au moment où cet article est rédigé).
L’exécution de la Loi de finances sur le mois de janvier s’est en effet soldée par un excédent budgétaire de 2,4 milliards de DH, au lieu d’un déficit de plus de 1 milliard de DH au cours du même mois de 2013. Un tel résultat est plutôt rare, et quand il se produit il mérite d’être signalé ; même si cet excédent résulte davantage d’une baisse des dépenses (des biens et services et des intérêts de la dette) que d’une hausse des recettes, limitée à 2,3% et tirée principalement par la TIC et la TVA à l’importation. Il est clair, dans tous les cas, que le déficit budgétaire, qui a démesurément grossi à partir de 2009, ne peut pas être ramené à des proportions soutenables par le seul comportement des recettes.
L’action sur la dépense, quoi qu’on en dise, est également essentielle. Peut-être est-ce trop tôt pour tirer des plans sur la comète ! Et cependant, si cette tendance venait à se confirmer dans les prochains mois, elle pourrait conforter l’hypothèse du gouvernement d’un déficit ramené à 4,9% du PIB à l’issue de l’exercice 2014. Les réformes introduites dans le système de compensation et l’évolution pour le moment favorable des cours du pétrole pourraient y aider grandement.
C’est le mouvement inverse qui se produit dans les échanges extérieurs. Tandis que 2013 avait démarré sur l’amélioration du déficit commercial, l’année 2014 est inaugurée, pour ainsi dire, sur une aggravation de ce déficit. Selon les résultats préliminaires du commerce extérieur que vient de publier l’Office des changes au titre des deux premiers mois de 2014, le déficit commercial s’est aggravé de 4,7%, à -31,4 milliards de DH par rapport à la même période de 2013. Ceci résulte d’une hausse des importations (+3,8%) plus importante que celle des exportations (+2,8%).
Le recours à l’emprunt extérieur de façon plus importante que prévu pourrait s’imposer
La hausse des importations provient surtout du renchérissement des produits alimentaires (+60%, à 8,3 milliards de DH) en particulier du blé (+225%, à 3,7 milliards de DH), ainsi que des produits finis de consommation (+7,6%, à 10,6 milliards de DH) dont notamment les voitures de tourisme (+28,6%, à 1,7 milliard de DH).
Les autres groupes de produits, en revanche, ont tous accusé des baisses : -10,1% pour les biens d’équipement, -3,3% pour les produits bruts, -0,7% pour les demi-produits et -1% pour les produits énergétiques. Ceci n’est pas une bonne chose, car cela traduirait une baisse de la demande des entreprises en produits d’équipement et en demi-produits, mais peut-être est-ce une situation temporaire. En tout cas, au regard des anticipations de l’Exécutif en matière de croissance en 2014, les importations à destination de la machine économique devraient évoluer à un rythme plus élevé que ce qu’il a été donné d’observer sur ces deux premiers mois.
Les exportations, elles, ont réalisé des évolutions mitigées : +43,7%, à 6,34 milliards pour l’automobile, +23,1%, à 2,4 milliards pour les agrumes et primeurs, +12,2%, à 1,3 milliard pour l’électronique. Les phosphates et dérivés, le textile et cuir ont continué la baisse déjà enregistrée en janvier.
Mais les échanges extérieurs, ce n’est pas que les échanges commerciaux, il y a aussi les flux financiers. Ainsi, les envois des MRE ont baissé de 3,3%, à 8,8 milliards de DH, les investissements directs étrangers (IDE) de…60,1%, à 4,1 milliards de DH, tandis que les recettes touristiques se sont presque stabilisées à 7,95 milliards de DH (-0,9%).
Par rapport à cette évolution, les besoins de financement, qui vont être reflétés dans le solde du compte courant, pourraient s’avérer importants. Et sous cette hypothèse, le recours à l’emprunt extérieur de façon plus importante qu’il n’est prévu pourrait s’imposer. Peut-être est-ce en référence à cette hypothèse que l’agence Standard & Poor’s, il y a encore quelques jours, a cru devoir prédire que le Trésor serait plus actif sur les marchés financiers en 2014 ! L’agence ne dit pas de quel marché il s’agit (intérieur ou extérieur), mais la configuration des échanges extérieurs peut laisser penser que ce sera plutôt sur les marchés extérieurs.
Car il faudra bien desserrer la contrainte qui pèse sur les liquidités bancaires, alors que s’agissant des finances publiques le Trésor se trouve, pour le moment en tout cas, dans une relative aisance financière. On peut même s’avancer pour dire que celle-ci devrait perdurer, considérant que l’inconnue que constituaient jusqu’à une date récente les charges de compensation est désormais relativement maîtrisée (dans le sens où le montant correspondant est connu d’avance). Pour dire les choses avec d’autres mots, le souci de l’Exécutif désormais serait très probablement moins le déficit budgétaire que le déficit extérieur.
