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Affaires

Les crédits à  l’économie stagnent

Au terme du premier trimestre 2004, les encours se situent au même niveau
qu’en décembre 2003.
La collecte des dépôts augmente de 1,5%, aggravant la surliquidité
des banques.
Les crédits à la consommation chutent de manière drastique.

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L’appel lancé il y a quelques semaines par le Conseil national de la monnaie et de l’epargne (CNCE) à l’endroit des banques, les incitant à s’impliquer davantage dans le financement de l’économie, trouve toute sa pertinence dans les derniers chiffres relatifs au secteur bancaire. Les ressources et emplois du système bancaire à fin mars 2004, que le GPBM s’apprête à publier, témoignent d’une certaine atonie. Certes, depuis le début de l’année, la collecte des dépôts des banques commerciales a progressé de 1,49% par rapport à décembre 2003, à 274 milliards de DH mais, après la chute du mois de janvier (-1,9 %), les concours à l’économie font du surplace (-0,1 %), totalisant 158,65 milliards. Autant dire que, durant le premier trimestre de l’année en cours, les banques commerciales n’ont fait qu’entretenir davantage leur surliquidité au lieu de donner un coup de pouce à l’année prometteuse qui s’annonce.
Pourtant, l’évolution est loin d’être uniforme, aussi bien pour les banques elles-mêmes que pour les différentes catégories de crédit. Ainsi, au sein des banques, ce sont le Crédit Populaire du Maroc et la BCM qui mènent le bal en faisant progresser leurs encours respectifs de 4,1 % à 36,28 milliards de DH et de 3 % à 27,26 milliards et consolident, du coup, leurs parts de marché passant respectivement à 22,87 % et 17,18 %. En revanche, BMCE Bank cède 5,5 % à 25,1 milliards de dirhams et la SGMB voit ses encours baisser de 4,8 % à 17 milliards de DH.
L’analyse par marché fait ressortir que les concours aux sociétés de financement régressent de façon plus prononcée que l’ensemble des crédits, de 3,7 % à 15,34 milliards de DH. Ils traduisent ainsi le regain des émissions de BSF et ce malgré la concurrence acharnée observée entre les banques, qui tire considérablement à la baisse des taux qui sont octroyés sur ce segment de financement.
La relance entrevue en début d’année n’apparaît pas dans les chiffres
Pour ce qui est des créances sur la clientèle (principale composante), leur stagnation (+0,3 %) masque des évolutions divergentes entre les différentes catégories. C’est ainsi que les crédits de trésorerie dévissent de 1,5 % et confirment au passage une tendance observée depuis deux ans avec une quote-part (dans le total des créances sur la clientèle) qui, de 51 % à fin 2001, revient à 42,1 % à fin mars.
Quant aux crédits à l’équipement, un des indicateurs-clés de la propension à investir, ils opèrent une rupture radicale avec leur évolution remarquée en 2003 (+20 % par année glissante) en ne gagnant que 3,5 % à 34,33 milliards de DH. Cette décélération confirme (comme nous l’avons signalé auparavant) que cette croissance était en trompe-l’œil car ne s’appuyant que sur des emprunts consortiaux aussi colossaux que ponctuels, tels Altadis, Amendis, Taheddart, etc. Aussi, l’absence d’opérations d’envergure, à l’exception de celle de Redal (2,2 milliards de dirhams) opérée en janvier, mais dont la majeure partie des déblocages n’a pas encore été effectuée, conjuguée à un net recours des grandes entreprises au marché obligataire durant le trimestre écoulé (Lydec pour 1,07 milliard de DH, ODEP pour 700 MDH…), a nettement pesé sur ce retournement de tendance. Sur ce créneau, les plus dynamiques ont été la SGMB (+23,2 % à 3,2 milliards de DH) et Wafabank (+4,64 % à 4,65 milliards de DH).
La palme de la croissance de ce trimestre revient sans surprise aux crédits immobiliers qui se hissent de
6,2 % à 28,86 milliards de DH soit, linéairement, la même évolution que celle observée au cours de l’année écoulée (+24 % pour toute l’année 2003). Il semblerait ainsi que la demande globale s’assagisse dans le sillage des planchers atteints par les taux d’intérêt difficiles à pousser davantage à la baisse. Mais cette accalmie devra être de courte durée en raison de la possible accélération des programmes de logements sociaux.
Dans ce contexte, la BCM et BMCE Bank enregistrent des évolutions considérables. Leurs encours ont progressé respectivement de 28% et 15,7 % à 2,13 milliards de DH. La BMCE Bank semble d’ailleurs bien partie, après plusieurs semestres d’intenses efforts de rattrapage, pour gagner quelques places en 2004 derrière le trio de tête
composé du CPM (39,4 %), Wafabank (14,82 %) et la BCM (12,4 %).
Enfin, les crédits à la consommation perdent 1,35% à 9,12 milliards de DH dont 43,8 % reviennent au CPM en baisse, lui aussi, de 1,22 %. Une telle contre-performance contraste avec le bond de 13,7 % enregistré en 2003 et, couplée à la faible progression des encours des crédits des sociétés de financement (+1,8 % en 2003), suscite des interrogations quant à l’aptitude de la consommation intérieure à servir de locomotive à la croissance économique. A moins que ce ne soit la baisse du TEG et les règles de provisionnement qui poussent les sociétés spécialisées à être plus prudentes

Le taux de conten-tieux s’aggrave
Les banques marocaines entament l’année 2004 dans un climat d’hésitation, avec une collecte de dépôts toujours inscrite à la hausse, face à une utilisation des ressources un peu timorée. La dégradation significative de leur taux de contentieux moyen à l’issue du premier trimestre (15 % contre 13,2 % à fin décembre 2003) risque de les rendre encore moins réceptives aux discours les incitant à ouvrir davantage les vannes de crédit. Certains banquiers refusent d’attribuer la stagnation des crédits à l’économie à une quelconque frilosité.
On explique généralement cette situation par l’insuffisance des projets d’envergure ou bancables, ce qui empêche de compenser au moins les dossiers arrivés à échéance. Il reste que la faible progression des crédits d’investissement inquiète. L’économie semble tourner mais ne progresse pas