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L’électronique, mauvais élève de la classe des Métiers mondiaux du Maroc
Depuis 2005, les exportations du secteur évoluent en dents de scie. Les opérateurs nationaux occupent les derniers rangs dans la chaîne de valeur des donneurs d’ordre. STMicroelectronics réalise à elle seule 70% du chiffre d’affaires à l’export du secteur.

Encore une année difficile pour le secteur de l’électronique. Cette branche de l’industrie qui fait partie des Métiers mondiaux du Maroc (MMM) est en net retrait par rapport aux autres, notamment l’automobile dont les exportations ont progressé de 125% en 2012 et l’aéronautique qui affiche une croissance de 56%. En effet, depuis 2005, année du lancement du plan Emergence, l’électronique n’a fait qu’alterner des progressions timides et des régressions légères pour aboutir, in fine, à une quasi-stagnation. Ainsi, selon le bilan rendu public lors des dernières Assises de l’industrie, les exportations du secteur n’ont pas franchi la barre des 7 milliards de DH en 2012 contre 7,1 une année auparavant. Pis, en plus de 8 ans, le courant d’affaires à l’export n’a pas vraiment évolué par rapport à son niveau initial. En 2005 déjà, le secteur exportait pour environ 6,7 milliards de DH. Sa contribution aux exportations de l’ensemble des Métiers mondiaux du Maroc a même régressé de 8,2% en 2011 à 7,6% en 2012.
Déjà, en 2011, le ministre de tutelle de l’époque avait reconnu clairement que sur l’ensemble des MMM, l’électronique était celui qui avait le moins rempli ses objectifs. Pour leur part, les professionnels font leur mea culpa. «Depuis 2009, nous n’avons pu atteindre que 7 milliards de DH sur les 10 milliards qu’on escomptait, avec 3 000 postes créés. Nous restons ainsi très en deçà des objectifs assignés pour le secteur», reconnaît Farida Elasatey, présidente de l’Association du secteur de l’électronique (Asel) et DG de BM electronics. Pour autant, elle explique que cette situation n’est pas seulement due aux problèmes internes du secteur, elle traduit aussi la crise qu’il traverse en raison de sa très nette dépendance des donneurs d’ordre européens dont les commandes sont irrégulières depuis 2009. «Des marchés ont été concrétisés à l’international par de grands noms, notamment Airbus, Thalès et 3M, mais leurs retombées tardent à se faire sentir chez nous, vu que les entreprises marocaines n’occupent pas les premiers rangs sur la chaîne de valeur. Autrement dit, le modèle de sous-traitance adopté pour l’électronique, comme pour d’autres métiers mondiaux, fait en sorte que les opérateurs se placent généralement au 3e, 4e, voire au 5e rang, alors que les grands groupes se positionnent au premier et au deuxième rang et commencent à sous-traiter le reste du travail», ajoute-t-elle.
L’Association du secteur mise sur une croissance des exportations de 10% en 2013
Selon l’Asel, le secteur compte environ 65 petites et moyennes entreprises, dont cinq spécialisées dans les composants électroniques, tandis que le reste exerce dans l’électronique de spécialité qui comprend les produits complets, semi-complets et les pièces électroniques. Ces entités travaillent avec des donneurs d’ordre européens, français en premier lieu, qui opèrent dans l’aéronautique, l’industrie automobile, les télécoms, les équipements médicaux et le ferroviaire. «Il s’agit d’un secteur qui fournit de la haute technologie, destinée à 99% à l’export», explique Mme Elatasey. Selon elle, seule une partie insignifiante de la production est écoulée sur le marché local, ce qui renseigne parfaitement sur l’absence d’une industrie électronique nationale. «Si le Maroc est passé du statut d’importateur de produits électroniques à celui d’exportateur, c’est surtout grâce à la sous-traitance. Cela ne concerne pas les produits finis de consommation grand public qui continuent d’être importés pour leur grande majorité», nuance un autre professionnel.
Une des particularités du secteur est qu’une seule société, en l’occurrence STMicroelectronics, réalise 70% des exportations, soit 5 milliards sur les 7 milliards. Par conséquent, la performance de l’électronique est tributaire de la bonne tenue de l’activité de cette entité.
Cela dit, au vu des marchés contractés par les grands noms de l’industrie aéronautique et automobile en particulier, les professionnels sont plutôt confiants par rapport à l’exercice 2013. «Nous nous attendons à une croissance des exportations de l’ordre de 10% pour l’année en cours», anticipe Mme Elatasey, qui insiste sur la nécessité de l’accompagnement des pouvoirs publics pour que le secteur remplisse pleinement le rôle qui lui était assigné au départ.
