Affaires
Le projet de décret sur les indemnités des administrateurs retiré du circuit
Il n’a pas été discuté lors du conseil de gouvernement
du 23 octobre.
Le dossier est retourné à la Primature où a eu lieu une réunion
en début de semaine.
Les administrateurs accusent l’Etat d’appliquer la politique de «deux
poids deux mesures».
Les administrateurs, qui réclament l’alignement de leur traitement sur celui des ingénieurs, vont-ils finalement avoir gain de cause ? Ce qui est acquis pour le moment, selon une source sûre, c’est que le projet de décret relatif à la hausse (de 22 %) des indemnités décidée pour cette catégorie de fonctionnaires, mais refusée par eux, a été retiré du circuit d’adoption. Ce texte, signé le 15 octobre 2003 par Fathallah Oualalou, ministre des Finances et de la Privatisation, et Najib Zérouali, ministre chargé de la Modernisation des secteurs publics, avait été programmé pour le conseil de gouvernement de jeudi 23 octobre. «Mais, à la dernière minute, il a été retiré du menu du conseil», explique une source à Rabat. Serait-ce en raison du sit-in (à l’origine, il était prévu une marche) organisé à ce sujet la veille, à Rabat, par l’UMT, la CDT, l’UGTM et la FDT (Fédération démocratique du Travail) ? En tout cas, une délégation composée des représentants des quatre syndicats précités et de ceux de la Fédération des associations des administrateurs des administrations publiques (FADAP), a été reçue lundi 27 octobre à la Primature. Quatre heures de discussions au cours desquelles chacun a fait valoir ses arguments, mais au bout, la cause des administrateurs ne semble pas avoir avancé d’un iota.
Pour la Primature, l’alignement des indemnités des administrateurs sur celles des ingénieurs serait trop coûteux pour le budget de l’Etat, sachant que la masse salariale dans l’administration avoisine déjà les 13 % du PIB ; un niveau jugé excessivement élevé par la Banque mondiale et le FMI, mais pas seulement. De plus, raconte un participant à cette réunion, «pour rejeter notre demande, l’administration met en avant le fait qu’au sein de notre corps, il y a de tout : du bon, du moins bon et même du mauvais. Autrement dit, il ne serait pas équitable, nous dit-on, d’aligner quelqu’un qui est passé administrateur sans vraiment le mériter, sur l’ingénieur qui, lui, a fait de longues études pour accéder à ce statut».
L’Etat jugé responsable de la banalisation du statut des administrateurs
Pour les syndicats comme pour la FADAP, ces arguments ne tiennent pas la route. D’abord, expliquent-ils, le gouvernement ne peut s’en sortir comme ça, en invoquant une charge trop lourde pour le budget. «Pourquoi ce serait aux administrateurs, seuls, de faire des sacrifices pour que l’équilibre budgétaire soit préservé ? S’il y a des sacrifices à faire, nous sommes prêts à y aller, mais avec tout le monde». Sur le statut même de l’administrateur, les syndicalistes se disent tout simplement sidérés : «S’il y a dans notre corporation des gens qui ne méritent pas d’y être, la faute incombe à qui ? Certainement pas à nous. Qui décide des promotions exceptionnelles ? Qui, longtemps, a usé de l’article 14 de la fonction publique en vertu duquel, et jusqu’à son annulation par Abdellatif Filali, les ministres pouvaient faire passer au statut d’administrateur qui ils voulaient ? Alors, qu’on ne vienne pas aujourd’hui nous opposer des situations que l’Etat a lui-même créées !». Et puis, ajoute Driss Al Alaoui, responsable de la FADAP. : «Najib Zérouali n’a-t-il pas déclaré, devant les députés de la Nation, que les administrateurs allaient être alignés sur les ingénieurs? Pourquoi ce reniement ?».
Le fait que les administrateurs soient plus nombreux (environ 40 000 en comptant les assimilés) que les ingénieurs (quelque 16 000), peut-il justifier que l’on augmente ceux-ci plus substantiellement que ceux-là ? Sûrement, non. D’autant que, on le sait maintenant, c’est l’administration elle-même qui est à l’origine de cette «hypertrophie» du corps des administrateurs.
Mais hypertrophie ou pas, il y a dans ce corps des universitaires titulaires de licences, de DEA, de doctorats, c’est-à-dire des gens qui ont fait autant d’années d’études sinon plus que les ingénieurs. Pourquoi pénaliser ceux-là au motif que certains (quel est leur nombre ?) ont accédé au statut d’administrateur par des biais autres que les études? La réforme de la fonction publique urge. Mais en attendant, quelle solution pour les administrateurs ?