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Affaires

Le prix du poulet baisse à  11 DH le kilo sortie ferme, les éleveurs affirment vendre à  perte

Les intermédiaires profitent de l’abondance de l’offre pour imposer leurs prix. Le renchérissement des intrants et des délais de paiement plus longs aggravent leur situation. La fédération milite pour la réduction de la production de 12% d’ici fin 2012.

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Secteur Avicole Maroc 2012 04 10

Le secteur avicole est secoué par la baisse du prix du poulet de chair vif. Il s’établit ces derniers jours autour de 11 DH le kilo au départ des fermes. Or, les professionnels estiment que pour rentabiliser leurs investissements, le kilo devrait être facturé à 13,50 DH. Cela voudra dire que si on ajoute 3,50 DH pour couvrir le circuit intermédiaire et le transport, le consommateur devrait acheter un kg de poulet de chair autour de 17 DH. A la Fédération interprofessionnelle du secteur avicole (Fisa), on considère que les éleveurs vendent à perte et que cela risque, à terme, de provoquer des cascades de faillites.
Par le passé, ils ont pu obtenir des prix plus intéressants. En 2008, le kilo était vendu à 11,50 DH puis à 12,30 DH en 2009. Le prix s’est stabilisé à 11,20 DH en 2010 et est même monté jusqu’à 12,25 DH une année plus tard.
Pour Khaireddine Soussi, président de la Fisa, le problème actuel cache une autre réalité : l’envolée du prix du pétrole qui, elle, est derrière des surcoûts liés à un renchérissement des intrants comme le maïs et le tourteau. Et puis, ajoute Abderrahman Riadi, secrétaire général de l’association, il y a d’autres éléments qui se greffent au reste. Selon lui, il faut prendre en compte que pendant la période des grands froids, la performance des élevages baisse compte tenu de la hausse de la mortalité. Tout cela fait que le secteur est traversé par une lame de fond qui fera sûrement des victimes.
Que fait la fédération du secteur et qui faut-il interpeller, sachant que le prix est le résultat de la confrontation de l’offre et de la demande ? En fait, si les éleveurs vendent leurs produits au prix actuel, ils n’ont à s’en prendre qu’à eux-mêmes. Ce qui se passe, explique le président de la Fisa, c’est que, sous la pression des intermédiaires, l’éleveur qui s’est endetté pour la mise à niveau leur cède sa marchandise, contraint et forcé, de sorte à pouvoir payer le personnel, le banquier et les fournisseurs. L’autre élément qui aggrave la situation financière déjà fragile des éleveurs est «le délai de paiement qui atteint aujourd’hui 120 jours contre à peine 45 jours il y a quelques années», selon M. Riadi.
Si tous ces éléments sont palpables, on peut néanmoins se demander comment un secteur qui a réussi sa mise à niveau peut être si facilement mis à mal par sa propre corporation.
A cela, la fédération répond que la mise à niveau est surtout sanitaire et que le prix d’entrée reste accessible. L’investissement de départ n’est pas assez capitalistique pour que l’entrée dans le club soit verrouillée.

La production a augmenté de 4% à fin février

En tout, le secteur compte 6 030 élevages de poulets de chair dûment répertoriés par la fédération. C’est, entre autres, pour cela que nombre de professionnels sont aujourd’hui dans une mauvaise passe. Alors que fait, ou que peut faire la Fisa ? «Nous ne maîtrisons pas le circuit de commercialisation et nous n’arrivons pas à organiser et à regrouper les éleveurs pour qu’ils soient en mesure d’échapper à la voracité des intermédiaires. Nous agissons dans le sens de l’agrégation pour venir à bout de l’absurdité du circuit actuel», explique Khaireddine Soussi.
En attendant la mise en place des lents processus de protection des éleveurs qui doivent aussi aboutir à celle du consommateur, la Fisa opte pour la sensibilisation des professionnels qui sont incités à réduire leur offre.
Selon M. Soussi, des mesures pour réduire la production autour de 12% sont déjà en marche. Mais le processus est lourd et commence au niveau des couvoirs et des poulets reproducteurs.
Les chiffres à fin février 2012 montrent d’ailleurs une toute autre tendance, en contradiction avec les objectifs du président de la Fisa. La production a en effet augmenté de l’ordre de 4% par rapport à février 2011. On explique à la fédération que l’importation des reproducteurs de poulet a déjà commencé en août 2011, et comme le cycle de production du poulet de chair étant long, ce n’est qu’à partir de mai-juin 2012 que les premiers effets des mesures de sensibilisation se feront sentir pour n’être significatifs que vers la fin 2012. D’ailleurs, déjà sur les premiers lots importés, on ressent une réduction estimée à 10%. Ces mesures vont ramener la production à des proportions de nature à permettre à la loi de l’offre et de la demande de se rétablir. Reste à savoir par quel niveau d’augmentation des prix cela va se traduire.